- Cardiologie
- UE 8
- Item 234
Important
Troubles de la conduction intracardiaque
Définitions
Rappels anatomiques
Les troubles de la conduction intracardiaque sont secondaires à soit un ralentissement soit un blocage des voies de conduction intracardiaque. La transmission du signal de la contraction myocardique est assurée par la propagation d'un influx électrique suivant une voie préférentielle prédéterminée pour assurer la diffusion de cet influx à l'ensemble du myocarde permettant une contraction myocardique efficace de l'ensemble du muscle de manière synchrone.
Cet influx naît au niveau du nœud sinusal (NS ou nœud de Keith-Flack dans certains ouvrages) qui est un regroupement de cellules myocardiques atriales ayant des propriétés "pacemaker" (traduit littéralement "donneur de rythme"), situé dans l'atrium droit au niveau de l'abouchement de la veine cave supérieur, donnant le rythme cardiaque par dépolarisation régulière. Une fois l'influx donné par le NS, il se propage de proche en proche dans l'atrium droit sans voie de conduction bien individualisable pour arriver au niveau du nœud atrioventriculaire (NAV ou nœud d'Aschoff-Tawara dans certains ouvrages), situé dans la partie basse de l'atrium droit permettant de récupérer tous les influx propagés dans l'atrium droit et de les synchroniser avant de faire poursuivre la conduction électrique à l'étage ventriculaire (coup de frein nodal).
Après ce NAV, les voies de conduction se poursuivent par le faisceau de His, se situant à proximité de la valve tricuspide et à la partie supérieure du septum interventriculaire (risque de lésion de cette voie de conduction lors de la chirurgie de la valve aortique avec bloc de conduction secondaire +++). Par la suite, le faisceau de His se divise dans le septum interventriculaire en 2 branches, une branche droite destinée au ventricule droit et une branche gauche destinée au ventricule gauche, se divisant à son tour en une hémibranche antérieure gauche et une hémibranche postérieure gauche. Pour finir, toutes ces branches de conduction se terminent au niveau de l'endocarde des ventricules en un ensemble de filets nerveux nommé réseau de Purkinje. Il est à noter que la pathologie conductrice intracardiaque peut toucher toutes ces structures à n'importe quel niveau.
Rappels physiologiques
Chaque niveau de conduction a son rôle propre et une pathologie de la conduction qui lui est propre, individualisable sur l'ECG ou le Holter ECG.
On décrit ainsi des atteintes nodales (lésion localisée au NS ou au NAV) et des lésions des voies de conduction. On parlera ainsi de dysfonction sinusale en cas d'atteinte de la fonction "pacemaker" du NS. On parlera de bloc atrioventriculaire (BAV) en cas d'atteinte de la jonction atrioventriculaire ou des voies de conduction entre le NS et le NAV.
On définit ainsi dans les troubles conductifs atrioventriculaires l'atteinte nodale (supra-hissienne) de l'atteinte du faisceau de His et de celle située en aval de celui-ci (hissienne et infra-hissienne) pour des raisons de gravité avec une fréquence d'échappement plus lente dans les atteintes hissiennes et infra-hissiennes (l'échappement, correspondant à une redistribution de la fonction "pacemaker" aux cellules myocardiques fonctionnelles situées en aval du bloc, ne pouvant être que ventriculaire).
Comme annoncé ci-dessus, on distingue le tissu nodal (NS et NAV) du tissu de type Purkinje constitué du faisceau de His, des branches de ce faisceau et enfin du réseau de Purkinje en lui-même. Ces tissus sont des tissus myocardiques différenciés ayant la particularité d'avoir perdu leur fonction contractile et ne servant ainsi qu'à la conduction de l'influx électrique intracardiaque.
Lorsqu'une structure de conduction est atteinte, il peut y avoir une redistribution de la fonction "pacemaker" en aval de l'atteinte pour permettre une poursuite de l'activité cardiaque contractile, on parle alors d'échappement. Plus cet échappement est situé haut sur les voies de conduction (supra-hissien), plus il est rapide et mieux toléré. On peut retenir ainsi pour fixer les idées les ordres de grandeur suivants concernant la fréquence d'échappement :
- 40 - 50 BPM pour un échappement situé au niveau du NAV ;
- 35 - 45 BPM pour un échappement situé au niveau du faisceau de His ;
- < 30 BPM pour un échappement situé au niveau des branches du faisceau de His ou au niveau ventriculaire.
Il est à noter qu'il n'y a pas de voies de conduction électrique intra-atriales spécialisées mais la conduction se fait de proche en proche au niveau des cellules myocardiques atriales.
Il est également important de préciser que la conduction intraventriculaire ne se fait pas uniquement par les voies de conduction dédiées (ce qui serait dramatique en cas d'atteinte d'une voie de conduction par absence de possibilité de compensation de cette perte d'influx envers une zone plus ou moins étendue du myocarde). En effet, la conduction peut également se faire de proche en proche au niveau intraventriculaire et interventriculaire permettant ainsi d'assurer la dépolarisation des zones myocardiques situées en aval de la lésion des voies de conduction. Cependant, cette conduction se fait plus lentement que par les voies physiologiques et la contraction myocardiques de ces zones se fait avec un retard comparé aux zones saines. Ce retard se visualise sur un ECG par un allongement du QRS par allongement de la dépolarisation ventriculaire qui a un aspect différent selon la partie du myocarde concernée : retard droit vs retard gauche dans les blocs de branche, cf plus loin).
La clinique en lien avec ces atteintes est différente selon les structures touchées. Effectivement, une dysfonction sinusale et les BAV peuvent être symptomatiques (ou non) avec notamment des syncopes, alors que les blocs de branche ne sont jamais symptomatiques s'ils sont isolés.
Dysfonction sinusale
Physiopathologie et mécanismes
Une dysfonction sinusale correspond à une atteinte du NS pouvant se caractériser soit par un arrêt de fonctionnement du NS, soit par une non-transmission de son activité à l'atrium droit par bloc sino-atrial (BSA), les deux mécanismes étant indiscernables en pratique.
Cette atteinte est fréquente chez les sujets âgés, avec une prévalence croissante avec l'âge (mécanisme dégénératif +++). Elle est souvent associée à une FA dans le cadre d'une maladie de l'oreillette ou syndrome bradycardie-tachycardie.
Il est important de savoir comment le NS est innervé et vascularisé! Le NS est sous la dépendance du système nerveux autonome (SNA) et notamment des nerfs vagues (composante parasympathique ++). Ainsi, il peut arriver qu'une dysfonction sinusale soit uniquement de mécanisme vagal, notamment chez le sujet jeune pouvant faire porter le diagnostic de dysfonction sinusale extrinsèque.
Le NS est généralement vascularisé par l'artère coronaire droite (risque de trouble conductif en cas d'occlusion aiguë de la CD) mais peut aussi être vascularisé par la circonflexe selon la dominance du réseau coronaire du patient (dominance droite ou gauche).
Il est à noter qu'une dysfonction sinusale peut également apparaître à la suite d'utilisation de médicaments bradycardisants, notamment les β-bloquants.
A la suite d'une dysfonction sinusale, l'échappement rythmique résultant est généralement haut situé au niveau de l'atrium ou du NAV.
étiologies
Une dysfonction sinusale, comme évoquée précédemment, peut être occasionnée par une cause extrinsèque :
- PRISE MÉDICAMENTEUSE : β-bloquant, inhibiteur calcique bradycardisant (vérapamil, diltiazem), ivabradine (inhibiteur des canaux calciques If au niveau du NS), amiodarone et autres anti-arythmiques, digitalique, clonidine ;
- HYPERTONIE VAGALE CHEZ LE SUJET TONIQUE (athlète notamment) et réflexe vagal (malaise vasovagal) ;
- Parfois liée à la prise d'un médicament non cardiotrope.
Parmi les causes intrinsèques de dysfonction sinusale, on retrouve :
- CAUSES CARDIAQUES : atteinte idiopathique dégénérative liée à l'âge +++, coronaropathie, cardiomyopathie, HTA, myocardite, péricardite, tumeurs cardiaques, malformations cardiaques complexes
- MALADIES SYSTÉMIQUES OU MALADIES DE SURCHARGE ;
- MALADIES NEUROMUSCULAIRES
- CAUSES POST-CHIRURGICALES telles que la chirurgie valvulaire ou la transplantation
- HYPERTENSION INTRACRÂNIENNE, syndromes méningés
- HYPOTHERMIE
- SEPTICÉMIE
- ICTÈRES RÉTENTIONNELS SÉVÈRES
- HYPOXIE, HYPERCAPNIE OU ACIDOSE SÉVÈRES
- HYPOTHYROÏDIE
Clinique
Elle peut prendre différentes présentations cliniques :
- ASYMPTOMATIQUE
- LIPOTHYMIES, SYNCOPES voire symptômes trompeurs à type de faux vertiges, dyspnée d'effort, asthénie chronique, angor
- PALPITATIONS OU EMBOLIES ARTÉRIELLES en cas de FA associée
- DÉTÉRIORATION DES FONCTIONS COGNITIVES chez les personnes âgées.
Diagnostic
On peut évoquer une dysfonction sinusale devant les constations suivantes :
- BRADYCARDIE EN SITUATION D'ÉVEIL < 60 bpm ou absence d'accélération de la fréquence cardiaque à l'effort (incompétence chronotrope = impossibilité d'atteindre 80 % de la fréquence cardiaque maximale théorique, qui pour rappel est donnée par la formule : 220 - âge (en années)) ;
- PAUSES RYTHMIQUES SANS VISUALISATION D'ONDES P, considérées comme pathologiques au-delà de 3 secondes
- BLOC SINO-ATRIALE du 2ème degré sur l'ECG
- BRADYCARDIE avec rythme d'échappement atrial ou jonctionnel
- SYNDROME BRADYCARDIE-TACHYCARDIE
Le diagnostic de certitude se fait toujours à l'aide d'un enregistrement ECG ou par Holter ECG (méthode de référence).
L'aspect ECG habituel est celui de pauses avec tracé plat de longueur variable sans ondes P bloquées (contrairement au BAV). Ces pauses prolongées correspondent à des périodes d'asystolie jusqu'au retour d'une onde P ou l'apparition d'un rythme d'échappement.
On distingue 3 types de bloc sino-atrial :
- TYPE 1 : allongement de la conduction sino-atriale n'entraînant pas de traduction ECG
- TYPE 2 : blocage complet et intermittent de la conduction sino-atriale se traduisant par des pauses avec un intervalle P-P qui reste un multiple de l'intervalle P-P présent lorsque le rythme est ne présentait pas de pauses
- TYPE 3 : blocage complet et total de la conduction sino-atriale se traduisant sur l'ECG par une absence d'onde P et le plus souvent par un échappement jonctionnel se traduisant par une bradycardie voire par une asystolie en cas d'absence d'échappement.
On peut également évoquer une dysfonction sinusale devant une bradycardie sinusale marquée inappropriée (notamment chez un patient éveillé).
Prise en charge
La constatation de ce type d'anomalies ECG ou la suspicion de ce diagnostic impose une confirmation diagnostique que ces anomalies sont bien responsables des symptômes présentés par le patient. Il est alors classique d'avoir recours à un Holter ECG pour mettre en évidence une corrélation entre les anomalies ECG et les symptômes du patient. Cependant, un Holter ECG normal ne permet pas d'exclure le diagnostic et il faut savoir répéter les enregistrements si besoin voire les prolonger (enregistrement > 24h). En cas de symptômes peu fréquents, un enregistreur externe de longue durée pourra être proposé.
L'incompétence chronotrope se diagnostique lors d'une épreuve d'effort sur tapis roulant permettant de mettre en évidence l'absence d'accélération sinusale à l'effort.
Si on suspecte un mécanisme vagal, on peut proposer un test d'inclinaison (tilt test) dans l'optique de reproduire la symptomatologie et d'en faire le diagnostic. On peut également rechercher une hyperréflectivité sinocarotidienne par compression pendant 5 secondes d'une carotide puis de l'autre avec tracé ECG simultané après avoir réalisé une auscultation cervicale permettant de s'assurer de l'absence de souffle à ce niveau (risque d'AVC si sténose athéromateuse carotidienne et massage sinocarotidien). On parle effectivement d'hyperréflectivité en cas de pause > 5 secondes ou de chute de la PA > 50 mmHg, contrairement à la réponse physiologique qui n'est qu'une modeste bradycardie. Pour écarter une hypertonie vagale, on peut également proposer un test à l'atropine.
Dans le cadre d'une dysfonction sinusale, il n'y a pas d'indication de réaliser une exploration électrophysiologique.
L'enquête étiologique devant ce trouble de la conduction doit comporter au minimum une échocardiographie, les autres examens étant réalisés sur point d'appel.
Traitement
Une bradycardie mal tolérée impose la restauration rapide d'une fréquence ventriculaire adaptée. La mauvaise tolérance dans ce cadre pathologique pouvant correspondre à une angine de poitrine, une insuffisance cardiaque, une hypotension artérielle ou encore des signes neurologiques.
Il est à noter que dans le cadre des bradycardies et de leur traitement, les bradycardies par BAV sont toujours plus graves que celles secondaires à une dysfonction sinusale en raison d'un risque plus élevé de torsades de pointes.
Les moyens tachycardisants utilisables dans le traitement des bradycardies sont : ATROPINE, CATÉCHOLAMINES (isoprénaline), STIMULATION CARDIAQUE TEMPORAIRE (percutanée ou transthoracique).
TRAITEMENT SPÉCIFIQUE DE LA DYSFONCTION SINUSALE : son traitement passe uniquement par l'implantation d'un stimulateur cardiaque lorsqu'elle est symptomatique, avec preuve du lien de causalité entre bradycardie et symptômes, et uniquement en l'absence de cause réversible. Une exception à cette règle peut être l'impossibilité de stopper des traitements bradycardisants requis pour contrôler une FA ou une angine de poitrine. L'indication du stimulateur peut être élargie aux bradycardies sévères diurnes inappropriées < 40 bpm à symptômes modestes ou absents ou non corrélés à la bradycardie.
Sur avis spécialisé, l'hyperréflectivité sinocarotidienne peut parfois justifier un appareillage lorsqu'elle est syncopale.
Blocs atrioventriculaires (BAV)
Physiopathologie et mécanismes
L'influx naissant dans le nœud sinusal, il parvient ensuite au niveau du nœud atrioventriculaire puis au faisceau de His qui constitue la seule voie de communication entre atrium et ventricule cheminant dans le septum interventriculaire membraneux. Un bloc AV à ce niveau coupe toute communication entre atrium et ventricule.
Les BAV sont fréquents chez le sujet âgé. Tout comme le NS, le NAV est sous étroite dépendance du système nerveux autonome. Il est vascularisé le plus souvent par une branche de l'artère coronaire droite naissant au niveau de la croix des sillons (artère du NAV). Le faisceau de His et ses branches sont vascularisés par la première branche septale de l'artère interventriculaire antérieure et par l'artère du NAV.
En cas de BAV complet, il peut apparaître un rythme d'échappement dans le faisceau de His avec une fréquence cardiaque comprise entre 35 et 50 bpm. Par contre, en cas de BAV situé au niveau du faisceau de His ou au niveau infra-hissien, l'échappement est alors ventriculaire avec un rythme d'échappement instable (15-30 bpm) associé à une gravité plus importante et une plus mauvaise tolérance.étiologies
- DÉGÉNÉRATIVES : fibrose avec ou sans calcifications du squelette fibreux du cœur (maladies de Lev ou de Lenègre)
- RÉTRÉCISSEMENT AORTIQUE DÉGÉNÉRATIF par coulées calcaires au niveau du NAV et du faisceau de His ;
- CAUSES ISCHÉMIQUES DU SCA :
- CAUSES INFECTIEUSES :
- CAUSES EXTRINSÈQUES :
- Maladies de système ou cardiopathies de surcharge (lupus, syndrome de Gougerot-Sjögren, spondylarthrite ankylosante)
- Maladies neuromusculaires
- Causes post-chirurgicales : chirurgie valvulaire essentiellement au niveau aortique
- Postcathétérisme par traumatisme mécanique des voies de conduction ou comme complication d'une ablation par radiofréquence de maladie de Bouveret notamment
- Postradiothérapie
- Cause néoplasique
- Hyperkaliémie (responsable d'une hypoexcitabilité du myocarde)
- Cause congénitale (lupus avec BAV complet néonatal par présence maternelle des anticorps anti-SSA).
- de siège nodal dans l'infarctus du myocarde inférieur de bon pronostic, par atteinte de l'artère coronaire droite, car le plus souvent régressif et de mécanisme vagal, répondant bien à l'atropine
- de siège hissien ou infra-hissien dans l'infarctus antérieur, de très mauvais pronostic car témoin d'infarctus étendu avec atteinte lésionnelle des voies de conduction pouvant être responsable d'une insuffisance cardiaque voire d'un choc cardiogénique
- endocardite bactérienne de la valve aortique avec abcès septal
- myocardite de la maladie de Lyme
- rhumatisme articulaire aigu (n'existe plus en France)
- myocardite virale
- prises médicamenteuses : β-bloquant, inhibiteur calcique bradycardisant, amiodarone ou autre anti-arythmique, digitalique
- hypertonie vagale (chez le sportif) ou réflexe vagal (malaise vasovagal)
Clinique
Un BAV peut:
- être ASYMPTOMATIQUE comme dans le cas du BAV du 1er degré et de la plupart des BAV du 2ème degré ;
- s'accompagner de LIPOTHYMIES ou de véritables syncopes à l'emporte pièce sans prodromes (syndrome d'Adams-Stokes) avec récupération rapide de la conscience sans déficit ou confusion post-critique. Mais parfois, il peut être associé à des symptômes plus trompeurs tels que de faux vertiges, une dyspnée d'effort, une asthénie chronique ou une angine de poitrine ;
- aggraver une insuffisance cardiaque ;
- être révélé chez la personne âgée par une détérioration des fonctions cognitives ;
- être révélé ou s'accompagner de fibrillation ventriculaire consécutive à une torsade de pointes secondaire à un allongement de l'intervalle QT.
Diagnostic
Les blocs atrioventriculaires se déclinent en 3 degrés. Il faut également décrire son caractère paroxystique ou permanent, congénital ou acquis et surtout le siège présumé du bloc.
Ainsi, les blocs nodaux sont le plus souvent responsables de BAV 1 ou BAV 2 Möbitz 1 voire de BAV 3 avec échappement à QRS fins à 35-50 bpm.
Les blocs hissiens ou infra-hissiens surviennent au préalable sur des blocs de branche ou des BAV 2 Möbitz 2. Ils sont particulièrement dangereux lorsqu'ils sont complets du fait d'un risque de décès par asystolie et torsades de pointes. Dans ces cas, le rythme d'échappement est inconstant, instable et lent (< 30 bpm).
Afin de déterminer le siège du bloc, on peut s'aider de la morphologie du QRS. Généralement des complexes QRS avec une durée < 120 ms sont très en faveur d'un bloc nodal. Plus le bloc est haut situé, moins il est potentiellement grave car plus l'échappement sera haut situé, même au niveau ventriculaire, plus il sera rapide et mieux toléré.
Les BAV sont généralement associés à une clinique comprenant une bradycardie en situation d'éveil, lipothymie, syncope.
On décrit ainsi 3 grands types de BAV dont les sièges d'atteintes peuvent être décrits comme tels :
Supra-hissien ou nodal | Hissien ou infra-hissien | Symptômes | |
---|---|---|---|
BAV 1 | Oui | + / - | Non |
BAV 2 Möbitz 1 | Oui | Non | + / - |
BAV 2 Möbitz 2 | Non | + / - | + / - |
BAV de haut degré | Oui | Oui | Oui |
BAV à complexes QRS fins | Oui | Non | Oui |
BAV à complexes QRS larges | + / - | Oui | Oui ++ |
BAV du 1er degré (BAV 1)
Il correspond à un ralentissement constant de la conduction atrioventriculaire au niveau du nœud atrioventriculaire se traduisant par un allongement de l'intervalle PR > 0.2 sec (1 grand carreau sur le papier ECG). L'intervalle PR est constant.
Dans le BAV 1, tous les QRS sont précédés par une onde P! Il est le plus souvent secondaire à un bloc nodal et est bénin.
A noter qu'un BAV 1 peut être physiologique chez les patients sportifs ayant un tonus vagal important, bradycardes du fait d'une diminution des vitesses de conduction intracardiaque.
BAV du 2ème degré (BAV 2)
BAV 2 Möbitz 1
(ou périodes de Luciani-Wenckebach) :
Ce bloc correspond à un allongement progressif de l'intervalle PR jusqu'à ce qu'une onde P soit bloquée (non suivie d'un QRS) et suivie d'une onde P conduite avec un intervalle PR plus court que le dernier, cette séquence se répétant. Il correspond à un allongement progressif de la conduction intracardiaque au niveau de nœud AV. Ainsi, la caractéristique importante de ce type de BAV est que l'intervalle PR n'est pas constant +++. Il est secondaire à une atteinte nodale et a un pronostic favorable. Les QRS sont généralement fins (< 120 ms).
BAV 2 Möbitz 2 :
Ce type de bloc correspond à un blocage complet, intermittent de la conduction AV par atteinte du faisceau de His ou au niveau infra-hissien. Contrairement au Möbitz 1, il n'y a pas d'allongement progressif de l'intervalle PR mais il survient brutalement, sans élément annonciateur, une onde P bloquée. Ces ondes P bloquées peuvent survenir tous les 3 ou 4 complexes QRS et on parle alors respectivement de bloc 3/1 et 4/1. Il s'agit d'un bloc infra-nodal (hissien ou infra-hissien) avec un pronostic potentiellement grave car il peut évoluer vers le BAV complet. Le plus souvent, les complexes QRS sont larges dans ce type de bloc. L'intervalle PP est constant, de même que l'intervalle PR lorsque les ondes P sont conduites.
BAV de haut degré (parfois assimilé au Möbitz 2)
Il est proche sur le plan physiopathologique du Möbitz 2 mais il se caractérise par la présence de plusieurs ondes P bloquées de manière consécutive ou par une conduction rythmée avec par exemple 2 ondes P bloquées pour une conduite (bloc 3/1). Il évolue également vers le BAV complet. A l'instar du Möbitz 2, le bloc est en règle général infra-hissien avec des QRS le plus souvent larges.
BAV 2 de type 2/1
Dans ce cas particulier, il est impossible dire de dire si il fait partie des BAV de type Möbitz 1 ou 2 (allongement progressif rapide responsable d'un blocage immédiat ou alors pas d'allongement progressif. Seule l'exploration électrophysiologique endocavitaire permettra d'identifier s'il s'agit d'un Möbitz 1 ou 2). Sur les tracés ECG, on retrouve un complexe QRS pour 2 ondes P où une est bloquée et une est conduite de manière répétitive. Dans ce cas, on peut s'aider de la largeur des QRS pour déterminer le siège du bloc.
BAV 3 (BAV complet)
On assiste dans ce type de BAV à une véritable dissociation atrioventriculaire où aucune onde P n'est conduite à l'étage ventriculaire. Les atria et les ventricules sont totalement indépendants.
C'est un bloc complet et permanent qui peut être soit en rapport avec une atteinte nodale soit en rapport avec une atteinte hissienne ou infra-hissienne. Les ventricules battent ainsi à une fréquence inférieure à celle des atria du fait d'un échappement de hauteur variable selon le siège du bloc. Les intervalles PP et RR sont constants mais dissociés. La largeur du QRS et la fréquence d'échappement permettent d'orienter vers le siège du bloc (plus la fréquence est basse, les QRS larges, plus le siège du bloc est bas situé et l'échappement bas situé avec un pronostic défavorable et nécessite un traitement urgent). Lors d'un BAV complet, l'intervalle QT s'allonge et le patient peut présenter des torsades de pointes avec risque de décès.
A noter que les ondes P peuvent manquer en cas de FA sous-jacente et que dans ce cas le rythme cardiaque d'un patient en FA sera régulier du fait de la dissociation atrioventriculaire.
Prise en charge
Dans un premier temps il faut en faire le diagnostic sur un ECG et par la suite il faut recherche une étiologie aiguë pouvant expliquer la trouble de la conduction intracardiaque, curable ou réversible spontanément et notamment un SCA dans le territoire inférieur dans le BAV complet, des prises de traitements bradycardisants ou encore une myocardite.
En cas de bloc permanent, un ECG suffit à enregistrer le trouble de la conduction et à en faire le diagnostic. En cas de bloc paroxystique, il faut réaliser un Holter-ECG voire même une épreuve d'effort pour rechercher une éventuelle aggravation du bloc à l'effort.
Si le siège suspecté du bloc est infra-hissien (QRS larges), il faut envisager une étude électrophysiologique endocavitaire (EEP) permettant de mesurer l'intervalle de conduction HV (His-ventricule) dont la norme est entre 35 et 55 ms et dont une valeur > 70 ms en faveur d'un bloc de conduction. L'EEP est surtout utile pour les BAV 2 difficiles à classer comme le BAV 2/1 ou le BAV 1 avec des QRS larges. L'EEP peut également être envisagée dans le cas de troubles conductifs mineurs suspects d'être symptomatiques et associés à des conductifs paraoxytiques notamment dans les cas retrouvant un BAV 1 ou BAV 2 Möbitz 1 ou une association BBD + HBAG ou BBG isolé.
Les BAV paroxystiques peuvent être révélés par des syncopes et suspectés devant la constatation d'un bloc de branche ou d'un bloc bifasciculaire.
L'enquête étiologique lors de la prise en charge d'un trouble de la conduction doit comporter au minimum une ETT et un dosage des marqueurs de nécrose myocardique (troponine).
Traitement
Les BAV 3 nécessitent l'implantation d'un stimulateur cardiaque permanent (pacemaker) en l'absence de cause curable (SCA) ou réversible (hyperkaliémie, médicament bradycardisant) dans la majorité des cas.
Les BAV 2 Möbitz 2 nécessitent également un pacemaker lorsqu'ils sont évocateurs d'un siège infra-hissien ou s'ils sont symptomatiques et ce quelque soit l'âge du patient.
Les BAV 2 Möbitz 1 asymptomatiques et la très grande majorité des BAV 1 ne nécessite pas de mise en place de stimulateur cardiaque.
La gravité des BAV dans les SCA antérieurs et la rapidité de leur installation justifient la mise en place préventive d'une sonde d'entraînement électrosystolique (SEES) s'il est constaté une alternance BBG et BBD ou un BBD avec un HBAG ou un HBPG ou encore devant un BBG pour certains s'il n'était pas présent auparavant.
En pratique, la prise en charge d'un BAV de haut degré justifie une hospitalisation en USIC pour surveillance scopique continue. Il est nécessaire d'arrêter tous les traitements bradycardisants, de corriger une hyperkaliémie si nécessaire (et de rechercher une disparition du trouble conductif après correction). En cas d'arrêt cardio-circulatoire, une réanimation cardiorespiratoire est nécessaire. En cas de bradycardie importante, le patient doit être placé sous isoprénaline dont le débit de perfusion sera à adapter à la fréquence cardiaque du patient (fonction chronotrope positive) avec un objectif de fréquence cardiaque aux alentours de 60/min.
Dans le cas particuliers des BAV secondaires à un infarctus du myocarde inférieur, l'atropine peut être utilisée et suffit en général compte tenu du mécanisme vagal de ce BAV.
L'implantation du pacemaker n'est pas une urgence en soi et peut être réalisée dans les 24-48 heures si la tolérance est bonne.
On parle de trouble conductif chronique lors que le BAV persiste plus de 15 jours et dans ce cas l'indication à pacemaker doit être discuter même s'il est asymptomatique.
Cas particuliers
Tableau de BAV complet sur IDM inférieur
Dans 13 % des cas, ce type de BAVc est souvent précédé d'un BAV du 1er degré puis du 2ème degré à QRS fins, parfois asymptomatique et très exceptionnellement à QRS larges ou de type Möbitz 2. Au stade de BAV 3, l'échappement est à QRS larges dans 40 % des cas et fins dans 60 % des cas.
Ce type de BAV est parfois favorisé par les bêtabloquants ou la reperfusion et dans ce cas les bêtabloquants sont à arrêter. Il est, en règle générale, régressif en passant par le BAV 2 puis 1 et répond bien à l'atropine +++. Cependant, en raison du risque d'asystolie, il peut être nécessaire de mettre en place une sonde d'entraînement électrosystolique.
Si le BAV n'est pas régressif au bout de 15 jours, le trouble conductif devient alors chronique et il faut discuter l'indication d'un pacemaker (5 %).
Ce BAV dans cette situation correspond à une atteinte de l'artère du NAV, de bon pronostic en soi mais associé à une surmortalité secondaire à l'atteinte myocardique étendue.
Tableau de BAV dégénératif du sujet âgé
Les symptômes peuvent être atypiques sur ce terrain (activité réduite, bas débit cérébral) et il faut toujours évoquer une origine iatrogène. Le recours au Holter ECG est souvent nécessaire à la recherche d'un trouble conductif paroxystique.
Tableau de BAV congénital
Il représente 3-5 % des BAV et touche préférentiellement les filles (60 %). Dans plus d'un tiers des cas, la mère du cas index était atteinte d'un lupus ou d'un syndrome de Gougerot-Sjögren avec un anticorps anti-SSA chez la mère et anti-ribonucléoprotéine soluble chez l'enfant. Le diagnostic peut être fait dans le cadre d'une bradycardie fœtale ou néonatale. Le risque principal est l'évolution vers une insuffisance cardiaque et le décès par torsades de pointes, mais l'enfant peut être asymptomatique. L'association à une cardiopathie congénitale ou une fréquence ventriculaire < 50 bpm sont aussi des signes de gravité.
Blocs de branche
Physiopathologie et mécanismes
Après le NAV, le faisceau de His, au sein du septum interventriculaire, va se diviser en une branche droite et une branche gauche, comme vu précédemment, qui elle-même va se diviser en une hémi-branche antérieure fine et une hémi-branche postérieure épaisse.
Ces branches issues du faisceau de His ne sont que peu sensibles au système nerveux autonome (contrairement au NS et au NAV). En distalité, elles se ramifient en un réseau de Purkinje qui sont des cellules peu sensibles à l'ischémie et quasiment dépourvues d'activité mécanique (cellules conductrices). Lorsque l'on parle de bloc de branche, cela sous-entend qu'il y a un ralentissement voire une interruption de la conduction dans une branche.
Parmi les blocs de branche, on en distingue 2 types en fonction du type d'atteinte :
- LES BLOCS DE BRANCHE ORGANIQUES : il existe alors une altération organique du tissu conductif, le plus souvent irréversible (ischémie myocardique +++) ;
- LES BLOCS DE BRANCHE FONCTIONNELS : le plus souvent droits, au cours d'une tachycardie ou d'une bradycardie, la conduction est interrompue ou ralentie car l'influx tombe pendant la phase réfractaire du tissu conductif.
étiologies
Le bloc de branche droit (BBD) isolé peut être bénin et considéré comme une variante de la normale, qu'il soit incomplet ou complet. Il est quasiment systématiquement observé dans la plupart des cardiopathies congénitales touchant le VD et surtout dans la pathologie pulmonaire (cœur pulmonaire aigu ou chronique (CPA, CPC), embolie pulmonaire ...).
Le BBG quant à lui n'est jamais considéré comme bénin mais soit dégénératif, soit associé à une cardiopathie (HTA +++). C'est donc en quelque sorte un "marqueur" de cardiopathie.
Les causes ischémiques des BBD et BBD sont en rapport avec une atteinte infra-hissien des voies de conduction et sont ainsi grevés d'un mauvais pronostic en lien avec un infarctus étendu.
Les autres causes sont les mêmes que celles pouvant donner des BAV avec notamment l'hyperkaliémie, les médicaments bloquant les courants sodiques comme les anti-arythmiques de classe I comme la Flécaïne® ou les antidépresseurs tricycliques.
Clinique
Un bloc de branche s'il est isolé est toujours asymptomatique. Ainsi, il peut être découvert soit fortuitement sur un ECG systématique soit au cours du suivi d'une maladie cardiovasculaire.
Si un bloc de branche est accompagné de lipothymies ou de syncopes, on lui assigne alors une valeur de gravité car il peut signer la présence d'une cardiopathie sous-jacente (BBG +++) ou peut suggérer un BAV paroxystique à l'origine des symptômes (les voies de conduction ventriculaires saines se limitant alors à la branche droite).
Diagnostic
Comme tous les troubles conductifs, le diagnostics se fait par enregistrement électrocardiographique.
On définit ainsi, selon la largeur des QRS, le caractère complet ou incomplet du bloc et selon la morphologie du complexe QRS, sa localisation droite ou gauche (aspect de retard droit ou gauche).
Ainsi on parle de bloc :
- INCOMPLET : durée du QRS < 120 ms. Il n'a que peu de valeur sémiologique et clinique et nécessite une simple surveillance et bilan étiologique
- COMPLET : durée du QRS > 120 ms.
En cas de découverte d'un BBG, il faut rechercher une cardiopathie et en cas de BBD une pathologie pulmonaire.
En cas de bradycardie associée ou dans le cadre d'un bilan étiologie de lipothymie/syncope, on peut être amené à réaliser une EEP.
Aspect ECG du BBD complet :
- QRS larges avec une durée > 120 ms
- ASPECT DE RETARD DROIT avec aspect RsR' en V1, qR en aVR et qRs en V6 avec une onde S le plus souvent arrondie et empâtée
- ONDES T NÉGATIVES EN V1-V2 (trouble de la repolarisation secondaire au trouble conductif) voire en V3 ne devant pas faire évoquer une ischémie myocardique dans ce contexte
- DÉVIATION AXIALE DROITE RARE (généralement le BBD n'entraîne pas de déviation axiale)
Aspect de BBG complet :
- Durée du QRS > 120 ms
- Déviation axiale gauche possible
- Aspect rS ou QS en V1, QS en aVR et R exclusif en V6
- Ondes T négatives dans le territoire latéral DI, aVL, V5-V6, ne devant pas faire évoquer une ischémie dans ce contexte. On peut trouver un léger sus-décalage du segment ST en V1-V2-V3 ne dépassant pas 1 mm et ne devant pas orienter vers une pathologie ischémique myocardique sans clinique évocatrice
Le BBG peut parfois gêner à l'interprétation d'un ECG d'infarctus du myocarde antérieur. Dans cette situation, on peut rechercher le signe de Cabrera permettant théoriquement de distinguer un IDM antérieur d'un BBG par la présence d'un crochetage de la branche ascendante de QS de V1 à V4. Il n'est cependant pas présent de manière systématique lors d'un infarctus.
Lorsqu'un BBG est effectivement présent à l'état basal chez un patient présentant une douleur thoracique, il est intéressant de regarder attentivement la repolarisation. En effet, dans un BBG, la repolarisation est toujours inversée par rapport à l'axe du QRS d'où un aspect QS en V1-V2 avec sus-décalage ST et RsR' en V5-V6 avec sous décalage ST. Ainsi, même en présence d'un BBG, un sus-décalage ST en V5-V6 ou un sous-décalage en V1-V2 est en faveur d'un IDM à la phase aiguë.
Bloc de branche non spécifique :
Cette désignation correspond à un bloc de branche siégeant anatomiquement sur la branche gauche par atteinte du tissu de conduction distal avec une durée du QRS > 120 ms mais qui ne répond pas aux critères morphologiques du BBG. Il peut être observé chez les patients ayant présenté un infarctus sévère ou atteint d'une insuffisance cardiaque.
Hémibloc ou bloc fasciculaire antérieur gauche (HBAG) :
- Déviation axiale gauche entre -45 et -75° ;
- QRS fins avec durée < 120 ms
- Aspect qR en DI - aVL, rS en DII, DIII et aVF avec onde S en DIII plus profonde qu'en DII, onde S en V6. (aspect Q1S3)
Hémibloc ou bloc fasciculaire postérieur gauche :
- Déviation axiale droite > 100° en l'absence de pathologie du VD ou de morphologie longiligne ;
- QRS < 120 ms ;
- Aspect RS ou Rs en DI - aVL, qR en DII, DIII et aVF (aspect S1Q3).
L'HBPG est plus rare que l'HBAG car l'hémibranche postérieure est plus épaisse et donc plus difficilement atteinte que l'hémibranche antérieure.
On parle de bloc bifasciculaire lorsqu'un hémibloc est associé à un BBD.
Bloc trifasciculaire :
Un bloc trifasciculaire est une forme grave de trouble de conductif de siège le plus souvent infra-hissien. Ce type de bloc doit être suspecté dans les cas suivants :
- alternance BBD-BBG ;
- BBD associé à un HBAG alternant avec un HBPG ;
- association BAV 1 + BBD + HBAG ou HBPG.
Prise en charge
La constatation sur un ECG d'un BBG doit faire rechercher une HTA méconnue ou une cardiopathie sous-jacente et à défaut être considéré comme un bloc dégénératif.
La constatation d'un BBD chez un sujet jeune, asymptomatique avec un examen clinique normal peut être considéré comme une variante de la normale, d'autant plus si le BBD est incomplet.
En cas de syncope sur cardiopathie, un bloc de branche isolé ne peut à lui seul être tenu comme une indication fiable que la perte de connaissance est due à un BAV paroxystique. Dans ce contexte de cardiopathie, il faut surtout retenir la possibilité d'une tachycardie ventriculaire à l'origine de la syncope.
En l'absence de documentation de BAV 2 ou 3 chez un patient porteur d'un bloc de branche et présentant des pertes de connaissance, une EEP est nécessaire.
La constatation d'un BBG large chez un insuffisant cardiaque gauche sévère en stade III de la classification NYHA doit faire discuter l'implantation d'un défibrillateur automatique implantable triple chambre à visée de resynchronisation ventriculaire pour éviter la désynchronisation lors de la systole ventriculaire entre le VD et le VG du fait du retard de la contraction secondaire au bloc. (lors d'un bloc de branche gauche, la dépolarisation du VG se fait en retard par rapport au VD où la conduction électrique est physiologique. Le retard gauche s'explique par la conduction de proche en proche jusqu'à ce que tout le VG soit dépolarisé, avec un retard par rapport au VD se traduisant sur l'ECG par les éléments décrits auparavant).
Traitement
Le traitement des blocs de branche passe principalement par le traitement de la cause de ce bloc si il y a en une (hyperkaliémie, surdosage médicamenteux). Ils ne justifient jamais de mise en place de stimulateur hormis dans les cas symptomatiques ou en cas de preuve de BAV paroxystique. Dans le cas des insuffisants cardiaques sévères, un stimulateur biventriculaire peut améliorer la symptomatologie en permettant de resynchroniser la contraction des 2 ventricules.
En cas de constatation d'un bloc de branche, une surveillance clinique et ECG est nécessaire du fait de l'évolutivité de l'atteinte des voies de conduction (hormis dans les BBD bénins).
Formes cliniques typiques
Bloc bifasciculaire du sujet âgé avec perte de connaissance
Le plus souvent, on retrouve l'association BBD + HBAG. On peut aussi y retrouver un BAV 1 associé. Dans ces situations, il faut rechercher une cardiopathie sous-jacente qui peut avoir été responsable d'une TV à l'origine de la syncope. Il faut alors souvent avoir recours à une EEP pour mesurer la conduction infra-hissienne pouvant motiver, en cas d'allongement de la conduction, l'implantation d'un stimulateur cardiaque.
BBG de l'infarctus antérieur
Un BBG est observé dans 10 % des cas, à type de bloc uni-, bi- ou trifasciculaire, soit préexistant soit acquis pendant l'infarctus.
Si le BBG est secondaire à l'IDM, il est alors le témoin de séquelles septales importantes avec risque de survenue brutale d'un BAV complet et asystolie ou trouble du rythme ventriculaire associé.
Tableau de bloc de branche alternant
Ce type particulier de bloc de branche associe un BBD et un BBG ou une alternance entre HBAP et HBPG sur un fond de BBD. Cet aspect ECG peut s'observer au cours d'un bilan de syncope du sujet âgé ou après un infarctus antérieur. Il correspond à une forme grave de trouble conductif puisque c'est un bloc trifasciculaire et un équivalent de BAV paroxystique de siège infra-hissien.
Stimulation cardiaque
Le stimulateur cardiaque évoqué dans le cadre du traitement de ces troubles conductifs correspond à un système formé d'une pile (boitier) que l'on implante au niveau sous cutané relié à des sondes que l'on fixe par voie endocavitaire en passant par voie veineuse (sous clavière en général) au niveau des cavités cardiaques droites (oreillette et/ou ventricule selon l'indication voire également dans le VG en cas de resynchronisation ventriculaire avec un pacemaker triple chambre).
Le mode de fonctionnement du PM est défini par 3 lettres selon le modèle suivant : SDF pour stimulation, détection, fonctionnement. La 1ère lettre correspond à la cavité stimulée par le PM : A pour l'atrium droit, V pour le VD ou D pour l'atrium et le ventricule droits. La 2ème lettre correspond à la cavité détectée avec de nouveau le choix entre A, V ou D. Enfin la 3ème lettre correspond au mode fonctionnement du PM qui peut, en fonction de la l'activité cavitaire détectée, inhiber son fonctionnement (I pour inhibition), stimuler un influx électrique endocavitaire (T pour trigger) ou bien avoir les deux fonctions et s'adapter selon l'activité électrique détectée (D).
Par exemple un PM réglé en mode VVI, comme on peut le voir dans les dysfonctions sinusales avec fibrillation atriale, va détecter une activité électrique ventriculaire et inhiber son fonctionnement si il en perçoit une (il ne délivrera pas d'impulsion électrique car le ventricule a une activité ventriculaire de manière physiologique ne justifiant pas l'activité du pacemaker sur cette impulsion). Mais dans le cas contraire il enverra un influx électrique pour palier à l'absence d'activité physiologique du nœud sinusal. La détection d'une activité ventriculaire spontanée va donc inhiber le PM.
Dans le cas d'un PM réglé en mode DDD (comme il peut l'être lorsqu'il est implanté dans le cadre d'un BAV complet), il est apte à détecter l'activité électrique atriale et ventriculaire droite et cette détection va soit inhiber ou stimuler le PM en fonction de l'activité électrique détectée.
En pratique :
La pose d'un PM est réalisée dans des conditions d'asepsie chirurgicale dans un bloc opératoire ou une salle de cathétérisme. Il est nécessaire de s'assurer de la perméabilité des axes veineux supérieurs avec recours au doppler si nécessaire. Il faut arrêter les anticoagulants et antiagrégants plaquettaires en prévention des complications hémorragiques. Une consultation d'anesthésie n'est pas obligatoire (anesthésie locale) mais il est nécessaire de prévoir un bilan pré transfusionnel en prévention de complications hémorragiques potentielles. Une radiographie thoracique doit être réalisée afin de s'assurer de l'absence de pathologie malformative et de pneumothorax pré interventionnel (complication possible du geste afin de s'assurer ou non de son caractère iatrogène). Il est nécessaire également en dehors de la situation de l'urgence vitale immédiate de récolter le consentement éclairé du patient.
En l'absence de complication, il est nécessaire de garder un alitement de 24h en post opératoire avec réalisation d'une radiographie post-opératoire afin de s'assurer de l'absence de pneumothorax iatrogène et pour visualiser la localisation des sondes endocavitaires. Dans le cadre de la surveillance des potentielles complications, il est nécessaire de surveiller la loge où le PM a été implanté et la cicatrice (complications infectieuses et hémorragiques). Un contrôle transcutané du PM pour vérification du fonctionnement de celui-ci est nécessaire dans la semaine post-opératoire.
Il est remis au patient une carte d'identité de l'appareil et il est nécessaire de poursuivre un suivi régulier d'abord à 2-3 mois puis de manière annuelle. Les contrôles du PM permet d'analyser la fonction mémoire du PM et analyser si il y a des événements de troubles rythmiques enregistrés. Ils permettent également d'interroger les fonctions du PM pour s'assurer que le mode de fonctionnement est toujours optimal et que la batterie restante est suffisante et dans le cas contraire il convient de programmer un remplacement du boitier. (durée de vie moyenne d'un PM : 7-8 ans)
Concernant la vie avec un pacemaker, il est à noter que la présence d'un pacemaker peut contre indiquer la réalisation d'une IRM du fait du risque de désynchroniser le PM, déplace les sondes, les altérer, d'échauffer localement la loge du boitier. Des PM de dernière génération peuvent cependant être IRM compatibles.
Les conseils généralement donnés à ces patients sont de ne pas rester trop longtemps au milieu des portiques de magasin, de prévenir les médecins de ce dispositif implantable (IRM, tracé ECG modifié et repolarisation non interprétable), d'éloigner le téléphone portable du boitier.