- Cardiologie
- UE 11
- Item 335
Important
Syndromes coronariens aigus
Introduction
La maladie coronaire est dans la majorité des cas due à la formation de plaques athéromateuses dans la paroi des artères coronaires (artères permettant la vascularisation du myocarde lors de la diastole appelées de la sorte du fait de l'aspect de couronne entourant le cœur en coronarographie).
A l'état basal, ces plaques diminuent la lumière des artères coronaires et ainsi l'apport sanguin au myocarde. Cet état peut entraîner une ischémie lors de l'augmentation du travail myocardique, notamment à l'effort, responsable de l'angor (ou angine de poitrine) d'effort.
Ces plaques peuvent faire l'objet de remaniements et de complications telles que des fissurations, des ruptures exposant ainsi la couche sous-endothéliale de la paroi artérielle et provoquant l'activation de la coagulation et la formation de thrombi. Selon leur importance, ces thrombi peut provoquer une occlusion de la lumière du vaisseau responsable d'une ischémie dans le territoire en aval, ou encore ils peuvent se fragmenter et être à l'origine d'emboles qui migreront dans les territoires en aval en provoquant des obstructions capillaires responsables d'ischémies de plus petits territoires. CES REMANIEMENTS AIGUS SONT RESPONSABLES DES SYNDROMES CORONARIENS AIGUS (SCA).
L'occlusion coronaire aiguë est responsable d'une nécrose myocardique qui est irréversible si elle se prolonge dans le temps sans prise en charge médicale. Un territoire myocardique nécrosé n'est plus apte à remplir sa fonction contractile, il reste immobile lors des battements cardiaques. Il est dit hypo voire akinétique en échocardiographie. Cette perte de myocarde fonctionnel est la porte d'entrée dans l'insuffisance cardiaque, qui sera d'autant plus importante que la zone de nécrose myocardique est étendue. Quand l'occlusion concerne des capillaires, par phénomènes emboliques, la nécrose est dite rudimentaire car elle ne concerne qu'une petite partie de la masse myocardique. La fraction d'éjection du ventricule gauche (FEVG) peut alors n'être que peu abaissée mais cette nécrose se traduit tout de même d'une élévation de la troponinémie.
Cette pathologie coronaire est fréquente, estimée entre 60 et 100 cas pour 100 000 personnes.
C'est un problème majeur de santé publique responsable d'un grand nombre de décès (46 000/an) et dont la prévention et le traitement sont primordiaux.
Angor chronique stable
Physiopathologie
Inadéquation besoin en O2/apport en O2
La douleur angineuse résulte d'un effort demandé au myocarde qui est trop important par rapport à l'apport en O2 qui lui est accordé. Cette inadéquation provoque donc une ischémie myocardique qui se traduit cliniquement par une douleur thoracique.
Cette inadéquation peut être due à différents mécanismes :
- dans 95 % des cas, elle est due à des sténoses athéromateuses coronariennes serrées. La présence de ces sténoses réduit la lumière des artères coronaires et donc le débit arrivant jusqu'aux cellules myocardiques. Au repos, les cellules en périphérie peuvent recevoir un apport en O2 suffisant, mais à l'effort, le manque d'apport est manifeste d'une part, par une augmentation des besoins du fait de l'augmentation du travail fourni par le cœur, et d'autre part, par une réduction de l'adaptation du débit à l'effort du fait d'un calibre réduit des vaisseaux qui ne permettent pas de faire passer beaucoup plus de sang pour une durée équivalente (débit coronaire limité à l'effort). Ce phénomène se traduit donc par une ischémie à l'effort, quand la demande en O2 est maximale, et la douleur thoracique apparaît
- parfois, les artères coronaires sont saines (absence de plaques athéromateuses), et l'inadéquation résulte d'une réduction du débit coronarien par un spasme coronaire. Malgré le fait que ce phénomène de spasme puisse apparaître sur des artères saines, la majorité des spasmes se font sur des artères athéromateuses (angor de Prinzmetal)
- plus rarement, elle peut être due à une augmentation des besoins en O2 du myocarde qui dépasse les capacités de débit d'un réseau coronaire sain. Les besoins en O2 sont augmentés dans les situations de hausse du débit cardiaque où la fréquence cardiaque, l'inotropisme et les pré- et post-charges augmentent. Ces conditions sont réunies dans certaines pathologies provoquant alors une insuffisance coronaire fonctionnelle (le réseau est sain mais ses capacités sont dépassées par la demande trop importante du cœur) comme le rétrécissement ou l'insuffisance aortique, l'anémie chronique, l'hyperthyroïdie, certains troubles du rythme cardiaque comme la fibrillation atriale à réponse ventriculaire rapide, les tachycardies, les crises aiguës hypertensives. Généralement, ces pathologies ne provoquent des douleurs angineuses qu'en présence d'un réseau coronaire sténosé
- exceptionnellement, un patient peut présenter un angor typique avec des artères saines et aucune pathologie pouvant expliquer cet angor. On parle d'angor à coronaires saines ou encore de syndrome X cardiaque dont la physiopathologie pourrait s'expliquer par un trouble de la microcirculation avec une dysfonction endothéliale.
Apports sanguins au myocarde
Le réseau coronaire assure la vascularisation de l'ensemble du myocarde. Cet afflux sanguin se fait uniquement en diastole (les artères coronaires se font écraser dans leur portion intramyocardique lors de la systole ventriculaire).
A noter que le seul mécanisme d'adaptation du débit coronaire est la vasodilatation des sphincters précapillaires.
Lors d'un effort, le débit coronaire peut être multiplié par 5 brutalement pour répondre au besoin augmenté en O2 du myocarde par la mise en jeu de plusieurs système vasodilatateurs :
- monoxyde d'azote, sécrété par les cellules endothéliales normales
- vasodilatation β2-adrénergique
- prostaglandine vasodilatatrice (prostacycline)
- vasodilatation d'origine métabolique (adénosine)
Mais lors de la présence de plaques d'athérome, cette physiologie est perturbée :
- RÉDUCTION GLOBALE DES CAPACITÉS VASODILATATRICES (altération de la synthèse du NO par les cellules endothéliales des artères athéromateuses) pouvant évoluer vers un spasme coronaire inapproprié
- AMPUTATION DE LA RÉSERVE DE DILATATION CORONAIRE EN AVAL DES STÉNOSES CORONAIRES DE PLUS DE 50-70 % responsable d'ISCHÉMIE TRANSITOIRE, essentiellement à l'effort. Au-delà de 90 % de réduction du calibre artériel, le débit coronaire de repos peut être altéré et responsable d'ischémie de repos (permanente). Le seuil ischémique dépend de nombreux facteurs dont le degré de sténose en amont, la présence d'une circulation collatérale, l'existence d'une hypertrophie ventriculaire gauche (HVG).
Les apports d'O2 peuvent également être altérés lors d'une diminution de la saturation en O2 du sang (anémie, hypoxie, intoxication au CO) ou lors d'une diminution du débit cardiaque (grandes bradycardies, état de choc).
A noter que l'on parle de STÉNOSES CORONAIRES SIGNIFICATIVES lorsqu'elle atteint :
- 70 % pour les principaux troncs épicardiques (IVA, diagonales, circonflexe, marginales, coronaire droite)
- 50 % pour le tronc commun.
Les apports peuvent être également altérés par atteinte des artères coronaires mais de nature non athéromateuse comme par exemple les coronarites radiques dans les suites d'une radiothérapie thoracique ou après chimiothérapies (5 FU) ou encore les coronarites ostiales post syphilitiques.
Besoins myocardiques en O2
Ces besoins dépendent de 3 paramètres :
- LA FRÉQUENCE CARDIAQUE ;
- L'INOTROPISME (contractilité myocardique)
- LA TENSION PARIÉTALE DU VENTRICULE GAUCHE, dépendante de la dimension du VG (diamètre de la cavité, épaisseur pariétale), de la précharge (pression télédiastolique du VG) et de la postcharge (pression artérielle systolique) selon la loi de Laplace. (T = P x d / 2e avec T la tension pariétale, P la postcharge, d le diamètre de la cavité (précharge) et e l'épaisseur pariétale)
L'augmentation des besoins en O2 est la cause la plus fréquente des ischémies intermittentes. Les thérapeutiques anti-angineuses visent donc à palier ces augmentations des besoins en O2 pour restaurer un équilibre entre apport et besoin en O2 du myocarde.
Conséquences de l'ischémie myocardique
L'ischémie myocardique est à la base des techniques d'imagerie (scintigraphie) permettant de voir si une sténose est responsable effectivement d'une altération du tissu myocardique d'aval et si il y a ou non un intérêt à traiter cette sténose (principe du test fonctionnel pour visualiser l'intérêt d'un traitement). A partir du moment où le sang ne circule plus dans une artère coronaire, une «cascade ischémique» va se dérouler selon l'ordre chronologique suivant :
- 1. DIMINUTION DE LA PERFUSION MYOCARDIQUE (objectivable par la scintigraphie myocardique)
- 2. PASSAGE EN MÉTABOLISME ANAÉROBIE (formation de lactates)
- 3. DYSFONCTION DIASTOLIQUE (troubles de la relaxation)
- 4. DYSFONCTION SYSTOLIQUE, zones hypo voire akinétiques dans le territoire irrigué par l'artère atteinte (objectivable par l'échographie de stress)
- 5. apparition de MODIFICATIONS ECG en faveur d'une ischémie (modifications du segment ST et de l'onde T dans un premier temps) que l'on peut mettre en évidence lors d'un ECG enregistré lors d'un effort
- 6. apparition de la DOULEUR ANGINEUSE au bout de quelques secondes à quelques minutes mais, fait très important, elle peut être absente! En effet, l'ischémie est indolore chez 20 % des coronariens et chez 40 % des coronariens diabétiques ! (Pensez systématiquement à un SCA chez un sujet diabétique qui décompense son diabète, ECG systématique).
A noter, 2 situations particulières :
- HIBERNATION MYOCARDIQUE : ischémie chronique responsable d'une altération de la fonction contractile des segments myocardiques en aval d'une sténose. Lors de la revascularisation, ce segment de myocarde va pouvoir retrouver sa fonction contractile
- SIDÉRATION MYOCARDIQUE : situation observée lors d'une ischémie aiguë, responsable d'une altération de la fonction contractile des segments myocardiques en aval d'une sténose, avec un retour rapide à une vascularisation normale, comme on peut trouver dans l'angor spastique ou un IDM rapidement revascularisé. Cette partie du myocarde ne va retrouver une contractilité normale qu'après quelques jours malgré la rapidité de la vascularisation.
Forme anatomo-clinique de l'athérome coronarien
Nous avons vu que les SCA étaient en très grande majorité secondaires à la présence d'athérome au sein des artères coronaires. Hors, c'est lors de complications spécifiques des plaques d'athérome qu'apparaissent les SCA. La complication principale étant la rupture de plaque, entraînant une exposition des couches sous-endothéliales au flux sanguin et la formation d'un thrombus endoluminal.
La formation de cette thrombose coronarienne peut avoir 3 types de conséquences :
- MORT SUBITE
- INFARCTUS DU MYOCARDE
- dans les cas où la thrombose n'est pas complète, on parle alors d'ANGOR INSTABLE.
Diagnostic
Signes fonctionnels
Douleur angineuse typique
Comme toute douleur, son analyse doit être précise pour apprécier son origine. On doit ainsi faire préciser : son siège, ses irradiations, sa qualité, son intensité (échelle numérique ou EVA), son évolution, ses facteurs aggravants ou atténuants.
La douleur angineuse typique est le signe majeur de l'angor stable. Pour qu'il soit défini comme stable, cette douleur doit également l'être, c'est-à-dire apparaissant pour le même degré d'effort. Cette douleur survient donc classiquement à l'effort (augmentation du débit cardiaque et des besoins en O2 du myocarde). L'effort étant à concevoir au sens large : la marche (surtout par un temps froid, en côte, contre le vent), les rapports sexuels, la défécation, la période post-prandiale ... En général, la douleur a un début brutal (le patient pouvant dire l'heure exacte du début) et cède en moins de 10 minutes après l'arrêt de l'effort (le temps que les besoins en O2 reviennent à leur état basal). Après la prise de trinitrine sublinguale, elle doit disparaître en moins d'une minute. (D'où l'indication aux patients coronariens de toujours avoir leurs comprimés de TNT sur eux)
La douleur est typiquement de siège rétrosternal, médiothoracique, en barre, s'étendant d'un pectoral à l'autre, parfois verticale et plus rarement précordiale.
Elle irradie classiquement dans les 2 épaules, les avant-bras, les poignets et les mâchoires voire dans le dos.
Elle est constrictive +++, avec sensation de poitrine serrée dans un étau (d'où son appellation d'angine de poitrine), angoissante (d'où le nom angor).
Son intensité est variable, pouvant aller de la simple gêne thoracique à la douleur insoutenable voire syncopale. Une classification de la sévérité de la douleur thoracique a été créée par la Canadian Cardiovascular Society (CCS) :
Classe 1 | Activités quotidiennes non limitées. L'angor survient lors d'efforts soutenus, abrupts ou prolongés |
Classe 2 | Limitation discrète des activités quotidiennes. L'angor survient à la marche rapide ou en côte, en montagne, après le repas, par temps froid, lors d'émotions, au réveil |
Classe 3 | Limitation importante de l'activité physique. L'angor survient au moindre effort (marche à plat sur une courte distance, 100-200 m) |
Classe 4 | Impossibilité de mener la moindre activité physique sans douleur |
Douleur angineuse atypique
La douleur angineuse peut en effet être différente de celle décrite précédemment et poser ainsi des difficultés diagnostiques. Elle est plus souvent atypique dans certaines catégories de personnes : les femmes, les personnes âgées et les diabétiques.
Elle peut alors être de siège épigastrique (notamment dans les infarctus inférieurs) ou alors se limiter à ses irradiations sans douleur thoracique. L'angor peut aussi être totalement indolore chez 20 % des coronariens et chez 40 % des diabétiques (neuropathie diabétique).
La clinique peut aussi se décliner sans douleur thoracique mais se caractériser par une blockpnée d'effort (impossibilité de vider l'air de ses poumons lors de l'expiration), un équivalent de douleur thoracique.
La clinique peut également se limiter à des palpitations en rapport avec des troubles du rythme d'origine ischémique. Si l'ischémie est étendue, des signes d'insuffisance ventriculaire gauche peuvent être présents, notamment une dyspnée d'effort.
Retenir que la survenue de signes cliniques à l'effort qui disparaissent à l'arrêt de l'effort a une très grande valeur diagnostique en faveur d'un angor.
Ischémie silencieuse d'effort
Comme nous l'avons vu précédemment, l'ischémie myocardique peut tout à fait être indolore, de manière plus fréquente chez les sujets diabétiques du fait de la neuropathie causée par l'hyperglycémie chronique.
Cette ischémie, non parlante cliniquement peut être dépistée par une épreuve d'effort avec enregistrement ECG, pouvant être associée à une scintigraphie ou une échographie pour améliorer la sensibilité et la spécificité de cette épreuve d'effort chez les patients à risque.
Lorsque cette ischémie silencieuse est confirmée par 2 examens concordants, sa prise est en charge est la même que les angors typiques.
La société française de cardiologie (SFC) a recommandé en 2004 les indications de dépistage de l'ischémie myocardique chez le diabétique dans les cas suivants :
- patient âgé de plus 45 ans présentant un diabète de type 1 depuis plus de 15 ans et au moins 2 FDR cardiovasculaire.
- diabétique de type 1 et âgé de plus de 45 ans avec un désir de reprendre une activité sportive
- diabétique de type 2 depuis plus de 10 ans ou âgé de plus de 60 ans et présentant au moins 2 FDR cardiovasculaire
- quels que soient l'âge, l'ancienneté et le type de diabète :
- existence d'une atteinte vasculaire extracardiaque ou protéinurie isolée ;
- existence d'une microalbuminurie associée à 2 FDR cardiovasculaire.
Examen clinique
Il doit être systématique, même si il est en général normal, pour rechercher les FDR cardiovasculaire (hérédité cardiovasculaire, âge, tabagisme, dyslipidémie, diabète, HTA, surpoids ...) et des lésions ayant les même facteurs de risque que les plaques athéromateuses notamment :
- UN SOUFFLE AORTIQUE ÉVOCATEUR D'UN RÉTRÉCISSEMENT AORTIQUE pouvant être responsable d'un angor avec un réseau coronaire sain par insuffisance coronaire fonctionnelle
- UN SOUFFLE VASCULAIRE SUR LES AXES VASCULAIRES PRINCIPAUX (carotide, aortique, fémoral) à la recherche d'une autre localisation de la maladie athéromateuse
- une HTA
Il doit aussi rechercher des causes qui peuvent aggraver l'ischémie myocardique telles qu'une anémie ou une hyperthyroïdie mais également des signes cliniques en faveur de diagnostics différentiels.
Examens complémentaires
ECG
L'ECG est un examen important dans la maladie coronaire à la recherche d'une ischémie mais un ECG normal n'exclut pas le diagnostic et il faut savoir le refaire ultérieurement à la recherche de signes d'ischémie (sus ou sous décalage du segment ST, onde T négative). De même, l'ECG intercritique est le plus souvent normal hormis dans les cas d'antécédents d'infarctus du myocarde (ondes Q de nécrose) ou d'hypertrophie ventriculaire gauche pouvant rentrer dans le cadre d'une HTA ou d'une valvulopathie. Il est alors intéressant d'avoir un tracé de référence (à l'instar d'un chiffre de créatininémie de référence en néphrologie pour juger de la réalité d'une insuffisance rénale aiguë) pour pouvoir apprécier les modifications ECG.
L'ECG percritique (réalisé au cours d'une douleur angineuse) est très rarement normal et montre des anomalies qui régressent à la disparition de la douleur, celle-ci pouvant être spontanée ou secondaire à la prise de trinitrine sublinguale. Ces modifications ECG, qui intéressent essentiellement le segment ST et l'onde T sont localisatrices du territoire de l'ischémie.
Ce petit croquis a pour vocation de vous rappeler la terminologie utilisée dans la description d'un ECG.
Ainsi, au cours d'un angor, on peut rencontrer différentes anomalies ECG :
- Sous-décalage du segment ST > 1 mm (lésion sous-endocardique)
- Négativation de l'onde T (ischémie sous-épicardique) ;
- Grande onde T ample, pointue et symétrique (ischémie sous-endocardique)
- Sus-décalage du segment ST (lésion sous-épicardique) comme on peut l'avoir dans un angor de Prinzmetal ou dans un ischémie transmurale. Dans ce cas, le test à la trinitrine permet d'avoir le diagnostic car il permet le retour à ligne isoélectrique si le sus décalage est en lien avec un angor de Prinzmetal, alors qu'il n'a pas cette efficacité lors d'une authentique occlusion coronaire
- Pseudo-normalisation des ondes T (patient ayant à l'état basal des ondes T négatives que l'on ne retrouve pas sur l'ECG réalisé)
- des troubles du rythme ventriculaire d'origine ischémique.
Pour rappel, le segment ST physiologique est isoélectrique, c'est-à-dire que ce segment de l'ECG est plat. L'onde T normale est quant à elle asymétrique et positive sauf en VR et éventuellement en D3 et V1. Les termes ECG de courant de lésion et d'ischémie sont des descriptions électriques qui ne sont pas obligatoirement corrélés à une réalité anatomo-clinique. Pour plus de clarté, le tableau suivant récapitule les anomalies ECG.
Ischémie | Lésion | |
---|---|---|
Sous-endocardique | Onde T | Segment ST |
Sous-épicardique | Onde T | Segment ST |
A noter que les artères coronaires sont situées au niveau de l'épicarde, ainsi, le secteur du myocarde à souffrir en premier de l'ischémie est la couche sous-endocardique.
Pour que la couche sous-épicardique soit ischémique et provoque un sus-décalage du segment ST, on considère qu'il faut une occlusion coronaire, responsable d'une ischémie dite transmurale touchant toute l'épaisseur du myocarde.
ECG d'effort
Cet examen se pratique au cours d'une épreuve d'effort et consiste à enregistrer le tracé ECG (12 dérivations) d'un sujet au cours d'un effort sur bicyclette ou tapis roulant dans le but de dépister une ischémie survenant à l'effort (douleur thoracique et/ou modifications ECG évocatrices). L'épreuve d'effort doit se faire sous contrôle de 2 intervenants dont au moins un médecin avec obligatoirement du matériel de réanimation dans la salle d'examen. Au cours de l'épreuve sont monitorés le tracé ECG, le profil tensionnel et la fréquence cardiaque. L'épreuve d'effort permet ainsi d'évaluer la présence d'une ischémie et sa tolérance en précisant son seuil d'apparition et la charge atteinte (puissance atteinte lors de l'épreuve en Watts).
L'épreuve d'effort est dite positive si apparaissent une douleur thoracique et/ou un sous-décalage du segment ST horizontal ou descendant supérieur à 1 mm voire l'apparition d'un bloc de branche gauche.
Voici un exemple d'ECG lors d'une épreuve d'effort jugée positive (sous-décalage du segment ST disparaissant progressivement à l'arrêt de l'effort) :
ELLE EST DITE NÉGATIVE si aucune douleur thoracique d'allure angineuse ou aucune modification ECG n'apparaissent et que l'épreuve a été menée jusqu'au moins 85 % de la fréquence cardiaque maximale théorique (FMT) du patient. (FMT = 220 - âge (en années)). Positive ou négative, il faut toujours préciser la raison qui a motivé l'arrêt de l'épreuve (positivité, épuisement, troubles du rythme ventriculaire, poussée hypertensive sévère à l'effort ...).
Malgré ses critères, l'épreuve peut parfois être ininterprétable (FMT non atteinte, anomalies ECG à l'état basal gênant l'interprétation comme un bloc de branche gauche ou la présence d'un pacemaker). En cas d'anomalies préexistantes de la repolarisation sur un ECG de repos, on peut considérer comme un critère de positivité une diminution d'au moins 2 mm du segment ST à l'effort.
A noter que lors d'une épreuve d'effort, un sous-décalage du segment ST n'a pas de valeur localisatrice, au contraire d'un sus-décalage.
On conçoit donc que l'épreuve d'effort n'est pas une épreuve anodine dépourvue de risques et présente de ce fait des contre indications et des critères de gravité signant une atteinte ischémique importante.
Les critères de gravité d'une épreuve d'effort sont les suivants :
- ÉPREUVE POSITIVE POUR UNE PUISSANCE FAIBLE (< 60 Watts)
- SOUS-DÉCALAGE IMPORTANT DU SEGMENT ST (> 3 mm)
- SOUS-DÉCALAGE DIFFUS DU SEGMENT ST ;
- SIGNES CLINIQUES ET ECG PROLONGÉS APRÈS L'ARRÊT DE L'EFFORT (> 6 min)
- FAIBLE AUGMENTATION DE LA PA (PAS < 120 mmHg) et de la fréquence cardiaque lors de l'effort
- SIGNES D'HYPEREXCITABILITÉ VENTRICULAIRE (extrasystoles ventriculaires)
- SUS-DÉCALAGE DU SEGMENT ST
Les contre indications à la réalisation d'une épreuve d'effort sont les suivantes :
- IMPOSSIBILITÉ DE RÉALISER L'EFFORT (sujet très âgé, invalide, artériopathie des membres inférieurs ...)
- RÉTRÉCISSEMENT AORTIQUE SERRÉ SYMPTOMATIQUE +++, CARDIOMYOPATHIE HYPERTROPHIQUE (risque syncopal)
- SCA ET INFARCTUS DU MYOCARDE datant de moins de 5 jours, ANGOR INSTABLE
- INSUFFISANCE CARDIAQUE CONGESTIVE SÉVÈRE
- TROUBLES DU RYTHME VENTRICULAIRE SÉVÈRE
- EMBOLIE PULMONAIRE ET THROMBOSE VEINEUSE PROFONDE
- FIBRILLATION ATRIALE RAPIDE
- HTA > 220/120 mmHg
- TROUBLES DE LA CONDUCTION CARDIAQUE DE HAUT DEGRÉ NON APPAREILLÉS
Enfin, il faut également souligner le fait que l'épreuve d'effort n'est pas infaillible. En effet, il peut y avoir des faux positifs et des faux négatifs. Pour cela, il faut toujours se baser sur le risque qu'a le sujet de présenter une maladie coronarienne et interpréter les résultats selon cette probabilité pré-test jugée par le clinicien. Une épreuve négative n'exclut pas une maladie coronarienne d'autant plus si le sujet cumule plusieurs facteurs de risque cardiovasculaire. On peut ainsi estimer que la probabilité d'avoir une maladie coronarienne augmente ou diminue de 20 à 30 % en fonction que l'épreuve d'effort est positive ou négative.
Tomoscintigraphie myocardique de perfusion d'effort
C'est une technique d'imagerie fonctionnelle. Le sujet va faire une épreuve d'effort et au moment du pic de l'effort, nous allons injecter en intraveineux un traceur isotopique (thallium ou technétium). Une deuxième injection sera réalisée lors de la récupération. Cet isotope a la propriété de se fixer sur les zones myocardiques normalement perfusées et ne se fixent pas (ou moins bien) sur les zones ischémiques.
Elle permet ainsi de localiser les zones ischémiques par une diminution de la captation du traceur au moment de l'effort correspondant à une zone vascularisée par une artère coronaire sténosée.
Si le patient se trouve dans l'incapacité de réaliser l'effort nécessaire, on peut remplacer l'effort fourni par l'injection d'un vasodilatateur coronaire (dipyridamole) voire coupler cette injection à l'effort si il est sous-maximal. A noter que l'utilisation du dipyridamole est contre indiquée en cas d'asthme, de BPCO, de blocs de conduction de hauts degrés. Si besoin, il peut être antagonisé par la théophylline. Il ne reproduit donc pas l'effort physique demandé mais il est responsable d'une vasodilatation différentielle entre les artères saines et les artères athéromateuses, ces dernières se dilatant moins bien du fait de leurs lésions.
Les résultats sont présentés sous forme de clichés. En effet, une gamma caméra est utilisée pour récupérer et analyser le rayonnement de l'isotope injecté. Ces clichés correspondent à des coupes du myocarde (longitudinale, transversale, sagittale) permettant de cartographier les zones ischémiques au sein du cœur. Ainsi, la gamma caméra va réaliser 2 séries d'images, l'une au pic de l'effort et l'autre après 4 heures de récupération pour permettre de comparer la vascularisation au repos et à l'effort. On se retrouve alors avec 3 types de résultats :
- SEGMENTS NORMAUX : fixation isotopique normale à l'effort et en récupération ;
- SEGMENTS ISCHÉMIQUES : diminution de la fixation isotopique à l'effort mais normalisation lors de la récupération ;
- SEGMENTS NÉCROSÉS : absence de fixation isotopique à l'effort et au repos.
Cette technique d'imagerie a donc son indication dans la recherche d'une ischémie myocardique lorsque l'ECG d'effort est impossible ou que sa valeur prédictive positive est insuffisante (épreuve positive alors que la probabilité clinique de maladie coronarienne est faible). Elle est donc particulièrement recommandée chez les sujets avec une probabilité pré-test jugée intermédiaire (entre 20 et 80 %). Elle a en effet une meilleure sensibilité et spécificité que l'épreuve d'effort, des valeurs localisatrice et pronostique également supérieures. Une scintigraphie normale évite de pratiquer une coronarographie inutile.
Elle est cependant coûteuse et irradiante. De plus, il est à noter que l'existence d'un bloc de branche gauche rend l'interprétation d'une scintigraphie myocardique d'effort aléatoire.
Echocardiographie d'effort ou après dobutamine
Cet examen consiste en une échocardiographie pratiquée alors que le sujet fourni un effort, dans l'optique de dépister d'éventuelles anomalies de la contraction, au niveau de certains segments myocardiques, induites par l'effort et traduisant une ischémie.
Lorsque l'effort ne peut pas être fourni par le sujet, il peut être remplacé par l'injection de dobutamine (inotrope et chronotrope positifs) sous contrôle ECG et échocardiographique.
Ainsi, différentes coupes seront enregistrées pour comparer la contractilité à un effort sous-maximal, maximal et en phase de récupération. Cet examen permet donc également de localiser l'ischémie en visualisant les segments se contractant de manière anormale.
Ses indications sont les mêmes que la scintigraphie et le choix entre ses 2 techniques dépend essentiellement des habitudes des praticiens. Par rapport à la scintigraphie, cette technique à une sensibilité légèrement inférieure mais une meilleure spécificité.
IRM de stress
De faible disponibilité, cet examen n'est que rarement utilisé dans cette indication. Son principe est d'évaluer l'apparition de trouble cinétique segmentaire après injection de dobutamine ou d'anomalies de la perfusion après injection d'adénosine (même effet que le dipyridamole).
Coronarographie
Technique d'imagerie interventionnelle invasive consistant à monter une sonde par voie artérielle rétrograde (fémorale ou plus fréquemment radiale pour un risque d'hématome moins important) jusqu'à l'ostia des artères coronaires et à injecter sélectivement dans chaque ostium, avant et après dérivés nitrés, un produit de contraste iodé pour visualiser l'anatomie des artères coronaires et détecter les lésions sténosantes ou des spasmes artériels. Au décours de cet examen, on peut également réaliser si besoin une ventriculographie avec mesure de pression du ventricule gauche.
Ainsi, pour pouvoir interpréter une coronarographie, il faut connaître l'anatomie des artères coronaires.
Le réseau coronaire prend naissance à partir des ostia qui sont situés au niveau des sinus de Valsalva antérieurs droit et gauche, juste au-dessus de la valve aortique.
Ainsi, on décrit 2 artères coronaires qui vont se diviser pour vasculariser l'ensemble du myocarde. La coronaire gauche, correspondant au tronc coronaire gauche sur le schéma ci-dessus, se divise en artère interventriculaire antérieure (IVA) parcourant le sillon interventriculaire antérieur et contournant l'apex cardiaque, et l'artère circonflexe parcourant le sillon auriculoventriculaire gauche. L'IVA donne par la suite naissance à des branches septales qui perforent le septum interventriculaire et des diagonales (Dg) qui parcourent la face antérolatérale du VG. L'autre branche de la coronaire gauche, l'artère circonflexe (CX), donne naissance aux artères marginales qui parcourent la partie latérale du VG. Elle est dite dominante lorsqu'elle se termine par l'artère interventriculaire postérieure (IVP) qui parcoure le sillon interventriculaire postérieur et est dite hypoplasique lorsqu'elle ne donne qu'une seule artère marginale. Enfin, le système est dit équilibré lorsque l'IVP naît de la coronaire droite et que la CX se termine par une artère marginale en position rétroventriculaire gauche.
L'artère coronaire droite contourne le sillon auriculoventriculaire droit et se termine dans le sillon auriculoventriculaire postérieur par l'IVP lorsque le système est équilibré ou que la coronaire droite est dominante.
Ainsi, si l'on vous demande d'interpréter une coronarographie, pas de panique! Si vous voyez, comme sur le cliché ci-dessus, une seul vaisseau en continu qui ne se divise pas, vous êtes en face d'une artère coronaire droite. Si il y a une division, c'est une coronaire gauche avec l'IVA et la CX. Pour distinguer IVA et CX, il faut trouver les artères septales qui sont issues de l'IVA, ces artères sont classiquement verticales car elles pénètrent dans le septum. Une fois au clair avec l'anatomie, il va falloir rechercher les sténoses qui correspondent à une réduction du calibre de l'artère comme il est montré sur le cliché ci-dessous (sténose de la coronaire droite estimée à environ 30 %).
La coronarographie permet donc de visualiser les sténoses et de les caractériser (nombre, localisation, longueur, sévérité, calcifications ...). Elles sont considérées comme significative lorsqu'elles sont > 70 % de la lumière (> 50 % pour les sténoses du tronc commun). La sévérité est d'autant plus importante que la sténose est proximale et située sur une artère coronaire principale. De ce fait, les sténoses qui touchent le tronc commun ou l'IVA sont considérées comme étant de mauvais pronostic.
La coronarographie permet ainsi de localiser la lésion sténosante responsable d'une ischémie myocardique et cette localisation peut également être appréciée sur l'ECG avec une correspondance entre les dérivations montrant une ischémie et l'artère touchée comme le montre le tableau suivant :
Territoires ECG | |
---|---|
Coronaire gauche (IVA + CX) antéro-septal (IVA) : V1-V2-V3 apical : V4 latéral haut (CX) : D1-aVL latéral bas (CX) : V5-V6 antérieur étendu : de V1 à V6-D1-aVL postérieur ou basal (CX) : V7-V8-V9 | Coronaire droite inférieur (CD ou CX selon dominance) : D2-D3-aVF ventricule droit : V3r-V4r inférieur + antéro-septal |
La coronarographie permet aussi de réaliser une ventriculographie du VG avec mesure de pression au sein de cette cavité. Elle consiste à injecté un produit de contraste iodé directement dans le VG pour visualiser la cavité et la fonction contractile du VG. Les acquisitions se font selon 2 incidences (voir schéma ci-dessous), oblique antérieure gauche et droite.
Ainsi, on peut voir la contraction des différents segments du myocarde et visualiser si elle est normale ou non. Une contraction physiologique est dite normokinétique. Si elle est diminuée on parle d'hypokinésie, voire d'akinésie si elle est absente et de dyskinésie si on assiste à une extension paradoxale du myocarde en systole. Il est à noter que toutes ces anomalies peuvent n'atteindre qu'un segment limité du myocarde, typiquement dans les petits infarctus, mais l'atteinte peut également être diffuse dans les infarctus étendus. Voici des images correspondant à une ventriculographie du VG.
La ventriculographie permet également de calculer les différents volumes des cavités myocardiques et la fraction d'éjection du VG (FEVG). Différents volumes sont ainsi calculés :
- LE VOLUME TÉLÉDIASTOLIQUE (VTD) : volume de remplissage du VG. Normale : 100 mL/m2 ;
- LE VOLUME TÉLÉSYSTOLIQUE (VTS) : volume restant après l'éjection ventriculaire. Normale : 35 mL/m2 ;
- LE VOLUME D’ÉJECTION SYSTOLIQUE (VES) : volume éjecté lors d'une systole. Normale : 65 mL/m2 (VES = VTD-VTS).
Une FEVG est considérée comme normale lorsqu'elle est supérieure à 55 % en faisant le rapport entre le volume d'éjection systolique et le volume télédiastolique. (VES/VTD)
Il est tout de même à noter que la coronarographie est un examen invasif et n'est pas sans risque. En effet, les complications sont rares mais elle peut se compliquer d'AVC ischémique par mécanisme embolique, de complications locales au niveau du point de ponction vasculaire (hématome, fistule artérioveineuse), troubles du rythme, dissection ou thrombose coronaire, infarctus du myocarde, insuffisance rénale aiguë liée au produit de contraste iodé, réaction allergique au produit de contraste utilisé.
La coronarographie est donc un examen important en cardiologie et indiquée essentiellement lors de manifestations suspectes d'angor avec un examen recherchant une ischémie myocardique revenant positif ou chez un patient asymptomatique ayant une ischémie documentée sur des tests réalisés en raison d'un terrain à risque (ischémie silencieuse). Elle peut également être utilisée directement à visée diagnostique dans les situations suivantes :
- ANGOR DE CLASSE 3 résistant au traitement (sans évaluation non invasive au préalable)
- ARYTHMIE VENTRICULAIRE GRAVE
- EN CAS DE RÉCIDIVE ANGINEUSE PRÉCOCE, invalidante après revascularisation coronaire
- EXAMENS FONCTIONNELS NON CONTRIBUTIFS OU DISCORDANTS avec une probabilité de maladie coronaire suffisante.
En plus des possibilités offertes décrites ci-dessus par la coronarographie, on peut également y ajouter d'autres épreuves :
- LE TEST AU MÉTHERGIN® : l'injection intraveineuse de ce produit va provoquer une vasoconstriction anormale (spasme) dans l'angor à composante spastique qui sera alors visualisé par la coronarographie
- FRACTIONAL FLOW RESERVE (FFR) : lorsqu'on doute du caractère fonctionnel d'une sténose (c'est-à-dire du fait qu'elle puisse entraîner une ischémie), on peut étudier sa réserve coronaire (FFR) à l'aide d'une sonde munie d'un capteur doppler. On injecte alors localement un vasodilatateur (adénosine) qui doit augmenter le flux dans l'artère coronaire au-delà d'un certain seuil. Si ce n'est pas le cas (FFR < 0.75), on considère que la sténose entraîne un barrage significatif à l'augmentation du flux et confirme ainsi le retentissement fonctionnel. Il en résulte alors l'indication à une dilatation de cette artère.
- ÉCHOGRAPHIE ENDOCORONAIRE : permet d'analyser la paroi des artères coronaires à l'aide sonde ultrasonique introduite dans l'artère. Elle permet de caractériser les lésions et de mesurer la surface artérielle au niveau des zones pathologiques.
Scanner coronaire ou coroscanner
Sans injection, il permet de calculer le score calcique (reflet des calcifications coronaires et important FDRCV si il est > 400).
Avec injection, il permet de visualiser l'arbre coronaire avec une analyse possible de la lumière des artères et également de leur paroi mais il ne renseigne pas sur le caractère fonctionnel d'une lésion coronaire. C'est un examen peu invasif mais dont les résultats sont limités par les calcifications artérielles (hyperdensité spontanée intense) ou si le rythme cardiaque est trop rapide ou irrégulier. Il est irradiant et sa répétition régulière n'est ainsi pas envisageable.
De plus, la valeur prédictive positive du coroscanner est faible, ainsi si on ne se basait uniquement sur cet examen, beaucoup de coronarographies seraient réalisées inutilement. Il n'est de ce fait pas recommandé dans le diagnostic de la maladie coronaire stable.
Stratégie diagnostique chez un patient avec un angor chronique stable
La 1ère étape de la prise en charge consiste à évaluer cliniquement le risque du patient de présenter une maladie coronarienne (probabilité pré-test) avant de réaliser tout examen paraclinique. A partir de cette probabilité, nous choisirons les examens les plus rentables en terme de diagnostic, traitement ultérieur, effets indésirables ...
Cette probabilité tient compte des paramètres suivants :
- TYPE DE LA DOULEUR (douleur angineuse typique, atypique, ou encore d'allure non angineuse)
- ÂGE
- SEXE
- FDRCV
- ASPECT DE LA REPOLARISATION SUR L'ECG DE REPOS.
Ainsi, la probabilité pré-test de la maladie coronarienne peut être faible (< 20 %), intermédiaire (20-80 %) ou forte (> 80 %).
En cas de probabilité faible, on réalisera un coroscanner ou un ECG d'effort en 1ère intention.
En cas de probabilité intermédiaire, on réalisera un ECG d'effort ou un test d'ischémie couplé à une imagerie fonctionnelle.
En cas de probabilité forte, on réalisera une coronarographie avec généralement un ECG d'effort ou un test d'ischémie d'ischémie couplé à une imagerie fonctionnelle réalisé au préalable à visée pronostique et pour localiser l'ischémie.
Si un patient a déjà été revascularisé pour une maladie coronarienne, on préférera réaliser un test d'ischémie avec imagerie fonctionnelle pour localiser l'ischémie par rapport à ses lésions antérieures.
Pronostic
Les facteurs de mauvais pronostic de la maladie coronarienne sont les suivants :
- CLINIQUE : angor de classe 3-4 ;
- ERGOMÉTRIQUE : seuil ischémique bas, obtenu pour une charge faible ou une fréquence cardiaque faible (< 130 bpm), avec retour tardif du segment ST à la ligne isoélectrique après l'arrêt de l'effort, baisse de la PA à l'effort ;
- ISOTOPIQUE OU ÉCHOGRAPHIQUE D'EFFORT : plusieurs segments ischémiques, altération de la FEVG (< 40 %) ;
- CORONAROGRAPHIQUE : la coronarographie est indiquée à visée pronostique lorsque les tests fonctionnels sont en faveur d'un haut risque ou si l'angor est sévère ou avant chirurgie extracardiaque si les tests fonctionnels sont positifs. Les anomalies de mauvais pronostics sont les lésions pluritronculaires, du tronc coronaire gauche ou de l'IVA proximale.
Traitement
Il faut distinguer dans le traitement de l'angor chronique stable : le traitement de la crise et le traitement de fond. Dans les deux versants du traitement, des moyens médicamenteux et non médicamenteux seront utilisés et il faudra insister auprès des patients sur la nécessité d'une très bonne observance.
Traitement de la crise angineuse :
Lors de l'apparition d'une douleur angineuse dans un contexte d'angor chronique stable (essentiellement à l'effort), il est alors nécessaire d'arrêter l'effort fourni pour permettre une diminution des besoins en O2 du myocarde ischémique, et de prendre des dérivés nitrés par voie sublinguale (d'où l'importance de bien dire aux patients de toujours avoir ces médicaments sur eux). Ils agissent en quelques secondes et peuvent être pris avant un effort important à titre préventif. Leurs potentiels effets secondaires sont des céphalées et un risque d'hypotension si le sujet est debout au moment de la prise (les dérivés nitrés sont vasodilatateurs).
Correction des FDRCV :
Que ce soit pour le traitement de fond ou de la crise, il est important que le sujet applique les recommandations relatives à la réduction de son risque cardiovasculaire. Cette correction de ses FDRCV rentre ici dans le cadre de la prévention secondaire :
- ARRÊT DÉFINITIF DU TABAGISME
- RÉGIME HYPOLIPÉMIANT ET HYPOCALORIQUE SI SURPOIDS
- PRATIQUE D'UNE ACTIVITÉ PHYSIQUE RÉGULIÈRE
- TRAITEMENT DE L'HTA avec un objectif < 140/90 mmHg
- ÉQUILIBRATION du diabète
- STATINE ET INHIBITEUR DE L'ENZYME DE CONVERSION (IEC)
- Statine : objectif LDL-c < 1g/L ou 0.7 g/L suivant les recommandations (prévention secondaire)
- IEC : ramipril ou périndopril 10 mg/j
Médicaments anti-ischémiques (anti-angineux) en traitement de fond
Ils sont proposés en 1ère intention et principalement représentés par les β-bloquants en l'absence de contre indication. Les anti-calciques et l'ivabradine sont indiqués en cas d'intolérance aux β-bloquants ou en association avec ces derniers.
β-bloquants :
C'est le traitement de fond de base de l'angor d'effort.
Ils ont pour objectif de diminuer les besoins en O2 du myocarde en diminuant la fréquence cardiaque, l'inotropisme et la post-charge (pression artérielle).
Leurs contre indications sont à connaître : asthme, BPCO très sévère (antagonise l'effet β2 adrénergique bronchique), bradycardie sévère (< 45-50 bpm), BAV 2 ou 3. On peut noter également comme contre indication relative le phénomène de Raynaud et l'angor de Prinzmetal du fait de l'effet vasoconstricteur de ces molécules (antagonise l'effet β-adrénergique au niveau vasculaire).
La posologie optimale des β-bloquants ramène la fréquence cardiaque à 60 bpm au repos et à 130 bpm à l'effort.
En cas de FEVG altérée (< 35 %), on utilise un β-bloquant ayant une AMM dans le cadre de l'insuffisance cardiaque comme le bisoprolol (CARDENSIEL®).
Inhibiteurs calciques :
Ils diminuent la post-charge et l'inotropisme. Ils ont une action vasodilatatrice coronaire et systémique justifiant leur prescription en 1ère intention en cas de suspicion de composante spastique (angor de Prinzmetal). Leur principal effet secondaire est l'œdème des membres inférieurs.
Il est à noter que les inhibiteurs calciques non bradycardisants (dihydropyridines : amlodipine, nifédipine) peuvent être prescrits en association avec les β-bloquants alors que ce n'est pas possible avec les bradycardisants (diltiazem, vérapamil).
Ivabradine :
C'est un inhibiteur des canaux calciques If situés au niveau du nœud sinusal (qui est le pacemaker physiologique du cœur). Il a ainsi une action bradycardisante pure et peut être associé aux β-bloquants. Il présente comme principaux effets secondaires une bradycardie et des phosphènes.
Dérivés nitrés à libération prolongée :
Ils restaurent la fonction endothéliale et favorisent ainsi la sécrétion de NO (action vasodilatatrice). Ils diminuent ainsi le travail cardiaque par baisse la pré-charge et de la post-charge et par effet coronaro-dilatateur. Ils se prennent per os ou sous forme de timbre transdermique posé 18 heures par jour dans les formes cliniques invalidantes. Leurs effets secondaires sont possiblement des céphalées et un échappement thérapeutique avec un terme une inefficacité.
Molsidomine :
Analogue pharmacologique du NO, il a le même mécanisme d'action que les dérivés nitrés. Il n'y a pas d'échappement thérapeutique à cette molécule permettant une efficacité constante lors d'une utilisation au long cours.
Nicorandil :
Activateur des canaux potassiques ATP-dépendants, il a une action vasodilatatrice et aurait un effet protecteur sur le myocarde. Il peut être à l'origine d'ulcérations cutanéo-muqueuses graves mais rares.
Médicaments antiagrégants plaquettaires (posologies à connaître)
Aspirine :
C'est le médicament phare de la maladie athéromateuse. C'est un inhibiteur de l'activation plaquettaire passant par la voie du thromboxane A2 (inhibition de la COX1 plaquettaire et endothéliale).
Son indication est systématique chez tout patient coronarien en l'absence de contre indication (allergie, ulcère gastroduodénal). Il doit être utilisé à une posologie de 75 à 150 mg/j (classiquement 75 mg/j).
Clopidogrel :
C'est un inhibiteur de l'activation plaquettaire passant par la voie de l'ADP. Cette molécule est une prodrogue nécessitant obligatoirement un métabolisme hépatique pour être actif, il se prend donc systématiquement par voie entérale. Il est indiqué en cas de contre indication à l'aspirine. Il peut également être prescrit en 1ère intention en cas d'atteinte plurivasculaire ou en association avec l'aspirine au cours de l'implantation d'une endoprothèse (4 semaines après un stent nu et classiquement un an après un stent actif). Sa posologie est de 75 mg/j.
Revascularisation myocardique
Elle peut être proposée à visée fonctionnelle lorsque les symptômes persistent malgré un traitement anti-ischémique optimal ou à visée pronostique lorsque les lésions menacent un territoire myocardique étendu.
Il existe 2 types de technique de revascularisation myocardique : l'intervention coronaire percutanée et la chirurgie coronaire.
Intervention coronaire percutanée :
Elle correspond habituellement à une angioplastie coronaire par ballonnet complétée par l'implantation d'une prothèse endocoronaire, plus couramment appelée stent. D'un point de vue pratique, elle consiste à introduire dans l'artère coronaire sténosée, au cours d'une coronarographie, un cathéter à ballonnet et à le gonfler au contact de la sténose pour la dilater comme il est montré sur le schéma ci-dessous. Le stent est serti autour du ballonnet et sera implanté lors de son inflation et laissé en place.
Après cet acte, la cicatrisation de l'artère provoque chez certains patients une prolifération de tissu artériel pouvant conduire à la réapparition de l'obstacle endoluminal. On parle de resténose.
Contre cette complication spécifique, des moyens thérapeutiques ont été développés en recouvrant les stents d'un produit antimitotique, on parle alors de stents actifs, par opposition aux stents non recouverts de ce genre de produits, appelés stents nus. Les stents actifs nécessitent par contre un traitement antiplaquettaire prolongé pendant un an du fait d'un risque de thrombose de stent tardive plus important que les stents nus (ce délai d'un an tend à être réduit à 6 mois).
Attention à bien différencier resténose et thrombose de stent. Une resténose correspond à réépithélialisation du stent créant de nouveau une sténose alors qu'une thrombose correspond à une agrégation plaquettaire au niveau du stent.
En plus de cette technique, certaines lésions doivent être traitées par des méthodes plus complexes comme l'athérectomie rotative (en cas de lésions coronaires très calcifiées) ou le «cutting balloon». Des stents résorbables sont à l'étude.
Chirurgie coronaire :
Elle consiste en la réalisation d'un pontage aorto-coronarien (PAC) qui réalise un court-circuit entre l'aorte en amont et l'artère coronaire en aval de la sténose. Cette chirurgie peut être pratiquée avec ou sans utilisation d'une circulation extra-corporelle (CEC). Les greffons utilisés pour ces pontages sont préférentiellement artériels (essentiellement mammaires internes et plus rarement gastro-épiploïque) ou radial) mais parfois veineux (veine saphène).
Si l'on utilise l'artère mammaire interne, le pontage va consister à dériver cette artère pour l'implanter sur un ou plusieurs troncs coronaires. Si c'est la veine saphène qui est utilisée, on va alors la prélever au niveau de la jambe, et la faire s'aboucher en amont de la sténose sur l'aorte et en aval sur un tronc coronaire.
Stratégie thérapeutique :
En l'absence de FDR particuliers, le traitement médical est prescrit seul en 1ère intention.
Cette prise en charge thérapeutique peut être retenue à l'aide du moyen mnémotechnique suivant
C BASIC
- Correction des FDRCV
- β-bloquants
- Statines
- IEC
- Clopidogrel si mise en place d'un stent (nu ou actif) ou seul à la place de l'aspirine en cas de contre indication ou intolérance à cette molécule
La revascularisation myocardique est proposée en cas de persistance des symptômes malgré un traitement anti-angineux optimal si :
- l'ischémie myocardique est étendue (objectivée par des tests fonctionnels) ;
- la procédure proposée est à risque acceptable et la chance de succès suffisante ;
- le patient, informé de manière appropriée, souhaite l'intervention.
La revascularisation chirurgicale peut être pour améliorer le pronostic vital, essentiellement chez les sujets présentant :
- UNE STÉNOSE DU TRONC CORONAIRE GAUCHE
- UNE STÉNOSE TRITRONCULAIRE PROXIMALE ET UNE FEVG ALTÉRÉE OU UNE ISCHÉMIE ÉTENDUE OU UN DIABÈTE
- UNE STÉNOSE DE L'IVA PROXIMALE ET UNE ISCHÉMIE ANTÉRIEURE
- UNE STÉNOSE ET UNE ALTÉRATION DE LA FEVG potentiellement réversible (viabilité myocardique effective).
Dans les autres situations, la revascularisation chirurgicale peut tout de même être proposée pour améliorer le pronostic fonctionnel. (sténoses mono ou pluritronculaires symptomatiques après échec du traitement médical ou si le patient en accepte les risques et si le risque opératoire est acceptable)
Particularités liées à une forme d'angor : l'angor de Prinzmetal
C'est un angor qui survient sur des artères athéromateuses ou saines et dont le mécanisme d'apparition est un vasospasme artériel.
Le spasme est une vasoconstriction importante d'une ou de plusieurs artères coronaires qui entraîne une réduction importante du calibre des vaisseaux, visible en coronarographie, à l'origine d'une ischémie myocardique transitoire sévère pouvant être transmurale.
Dans 30 À 60 % DES CAS, CE SPASME SE PRODUIT SUR UNE ARTÈRE ATHÉROMATEUSE. Mais, dans certains cas, spécialement chez les sujets jeunes, le spasme peut se produire sur des artères apparaissant saines lors de la coronarographie. Ces derniers patients sont alors volontiers porteurs d'autres symptômes vasospastiques comme un syndrome de Raynaud. Il faut aussi noter que le tabac a un rôle aggravant cette composante spastique. Le spasme peut également se produire lors d'un processus athérothrombotique à l'occasion d'un SCA. A noter qu'en dehors de ce cadre pathologie, devant un toxicomane qui présente des symptômes de SCA, il faut penser à l'intoxication à la cocaïne qui est une cause classique de spasme coronaire.
Cliniquement, les douleurs de l'angor de Prinzmetal surviennent principalement au repos, à prédominance nocturne en 2ème partie de nuit voire à la récupération d'un effort important. Dans l'angor spastique sur une artère athéromateuse, les douleurs peuvent survenir lors d'efforts particuliers comme des efforts statiques, une exposition au froid, un acte sexuel voire même le stress. Ces épisodes douloureux sont généralement intenses, prolongés (> 10 min) accompagnés de sueurs et classiquement sensibles à la trinitrine (TNT) sublinguale.
L'ECG percritique objective un sus-décalage transitoire du segment ST, s'accompagnant souvent d'une hyperexcitabilité ventriculaire (extrasystoles, salves de TV) ou d'un BAV. Ces troubles rythmiques et conductifs disparaissent sans traitement, parallèlement à la régression de l'ischémie qui les a provoqués.
La coronarographie est indispensable pour déterminer s'il s'agit d'un spasme sur artère saine ou athéromateuse. Ainsi, si les artères sont saines et s'il n'a pas été documenté d'ischémie par un ECG, il est nécessaire de procéder à un test de provocation du spasme par injection IV de Méthergin® pour aboutir au diagnostic. Cette molécule déclenche un rétrécissement voire de manière plus fréquente une occlusion artérielle visible à la coronarographie et a pour conséquence de reproduire la douleur et les modifications ECG caractéristiques. Ce test doit être réalisé lors d'une coronarographie pour pouvoir lever ce spasme induit par administration intracoronaire de trinitrine ou d'un dérivé nitré.
Le traitement de cet angor spastique se base sur l'administration d'inhibiteurs calciques, à fortes doses, en associant généralement 2 molécules (nifédipine + vérapamil ou nifédipine + nicorandil). Les β-bloquants sont classiquement contre indiqués car peuvent potentiellement favoriser le spasme en libérant le tonus vasoconstricteur β-adrénergique de toute inhibition β-adrénergique, mais cette contre indication n'est que relative. L'efficacité du traitement se juge sur la clinique, le holter si des troubles du rythme étaient présents, voire dans certains cas la négativation du test au Methergin®.
S'il est bien pris en charge, le pronostic de cette affection est bon. Par contre s'il est méconnu, le risque de constitution d'un infarctus du myocarde ou d'une mort subite est conséquent.
SCA sans sus-décalage du segment ST (SCA ST-) :
angor instable et IDM sans sus-décalage du segment ST (IDM ST-)
Généralités
Définition - terminologie
Les SCA ST- regroupent l'angor instable (AI) et les IDM ST- (ou NSTEMI en anglais pour non ST segment elevation myocardial infarction).
La différence entre AI et IDM est la présence d'une élévation de la troponinémie dans les IDM et son absence dans l'AI alors que les présentations cliniques sont similaires.
Le référentiel de cardiologie présente un schéma permettant d'être au clair avec ces notions.
L'IDM ST- est en général de taille limité, et dans la majorité des cas, un ECG réalisé à distance ne retrouve pas d'onde Q de nécrose.
Cette classification a l'air très théorique mais chaque situation a une prise en charge et un risque qui lui est propre. En effet, un SCA ST- ne se prend pas en charge comme un angor stable car l'instabilité clinique (angor instable) traduit la survenue d'une lésion coronaire athérothrombotique non occlusive qui peut rapidement se compliquer d'une occlusion aiguë par extension du thrombus. C'est donc une urgence qui justifie l'administration rapide d'un traitement antiagrégant et anticoagulant en USIC.
Cette situation est également différente des IDM ST+ dont l'origine est une occlusion coronaire aiguë dont la complication principale est la nécrose du myocarde en l'absence de désobstruction rapide.
A noter que la fréquence des SCA ST- est plus élevée que celle des IDM ST+, les patients atteints sont plus âgés et présentent plus de comorbidités. La mortalité initiale est plus faible mais le pronostic à 6 mois est identique et même plus péjoratif ultérieurement. C'est une atteinte que l'on peut juger moins sévère à la phase aiguë mais à ne pas négliger lorsqu'on connait cette évolution!
Physiopathologie
Comme il l'a été développé dans l'angor chronique stable, le point de départ de toute cette pathologie est dans la majorité des cas la présence de plaques athéromateuses qui vont se compliquer de ruptures ou d'érosions à l'origine d'une réaction thrombotique locale aboutissant à une obstruction vasculaire partielle voire complète. Le thrombus plaquettaire formé favorise la vasoconstriction coronaire paroxystique par sécrétion de substances vasoconstrictrices expliquant le caractère souvent spontané de l'angor instable (l'effort s'accompagnant d'une vasodilatation). Ce thrombus peut par ailleurs se fragmenter et provoquer ainsi des foyers de micronécrose par embolies capillaires. Cette nécrose est détectée dans le sang par le dosage d'un marqueur : la troponine. Ce marqueur s'élève dès que la masse nécrosée dépasse 1 gramme de tissu myocardique. Dans les SCA ST- avec élévation de la troponine, la nécrose reste en général limitée. Elle n'est pas détectée par les techniques d'imagerie conventionnelles et n'affecte pas de manière significative la FEVG.
Diagnostic d'un SCA ST-
Interrogatoire
Les caractéristiques de la douleur angineuse sont les mêmes que dans l'angor stable mais les circonstances de survenue sont différentes. Le diagnostic peut être d'emblée évoqué dans ces situations :
- ANGOR SPONTANÉ PROLONGÉ (> 20 min), régressif spontanément ou après absorption de trinitrine sublinguale (prédominance nocturne). Cette forme de SCA était autrefois dénommée «syndrome de menace d'IDM» ;
- ANGOR D'EFFORT, INAUGURAL ET APPARU RÉCEMMENT, CLASSE 2 OU 3 DE LA CCS (angor de novo) ;
- AGGRAVATION RÉCENTE D'UN ANGOR STABLE JUSQUE LÀ, angor d'effort survenant pour des efforts plus faibles ou cédant plus lentement à l'arrêt de l'effort ou après prise de trinitrine sublinguale (angor crescendo) ;
- ANGOR APPARAISSANT DANS LE MOIS SUIVANT LA CONSTITUTION D'UN IDM.
Cependant, il faut également souligner la présence de formes atypiques : la douleur peut être atypique notamment épigastrique de repos, thoracique en coup de couteau voire pseudo-pleurétique. Mais dans ces cas, elle n'est pas influencée par la mobilisation des muscles de la région douloureuse (douleur pariétale), ni par la respiration profonde (douleur pleurale) ni provoquée par une mauvaise position. Pour rapporter cette douleur atypique à un SCA, on est orienté par le terrain du patient qui présente classiquement plusieurs FDRCV ou des antécédents cardiovasculaires.
Examen clinique
Habituellement normal, il permet d'éliminer d'autres causes cardiaques ou non cardiaques de douleurs précordiales. Il vise également à dépister des FDRCV et les autres localisations potentielles de la maladie athéromateuse. Il recherche également une instabilité hémodynamique (râles crépitants, galop pouvant orienter vers une insuffisance cardiaque aiguë) et peut exceptionnellement mettre en évidence un souffle systolique précordial transitoire en faveur d'une insuffisance mitrale transitoire par ischémie du pilier de la valve mitrale.
ECG
C'est l'examen de 1ère intention à réaliser dès que le diagnostic de SCA est suspecté. Au service des urgences, il doit être réalisé moins de 10 minutes après le 1er contact médical. Il est important de savoir répéter les ECG pour voir l'évolution du tracé 6 heures après le 1er ou lors de récidives douloureuses et si possible les comparer à un tracé antérieur. La mise en évidence de modifications de la repolarisation (segment ST et onde T) permet de confirmer l'origine ischémique des symptômes.
Il faut souligner que la modification dynamique du tracé est plus utile que celle d'une anomalie fixe car elle permet d'adapter la prise en charge qui n'est pas forcément la même selon les anomalies détectées.
Modifications de l'ECG percritique (durant la douleur) :
L'anomalie la plus caractéristique est le sous-décalage du segment ST horizontal ou descendant, ≥ 1 mm dans 2 dérivations contiguës.
Le sus-décalage du segment ST horizontal ou convexe vers le haut est rarement observé et régresse après l'administration de trinitrine permettant ainsi le diagnostic différentiel avec un SCA ST+.
L'inversion de l'onde T n'a de valeur que lorsque cette variation est supérieure à 1 mm. Elle peut correspondre à l'apparition de grandes ondes T négatives ou une repositivation d'une onde T préalablement négative (pseudo-normalisation de l'onde T).
A noter qu'un ECG normal rend le diagnostic d'insuffisance coronaire peu probable.
Anomalies de l'ECG postcritique (après la douleur) :
Elles sont à confronter aux ECG antérieurs pour ne pas faire de mauvaise interprétation du fait de pathologies cardiaques associées. Cet ECG peut également être normal sans exclure pour autant le diagnostic. La répétition des ECG est donc nécessaire pour confirmer une ischémie myocardique en mettant en évidence une modification secondaire du tracé :
- SOUS-DÉCALAGE > 1 mm dans plusieurs dérivations
- ONDE T NÉGATIVE ET PROFONDE
Dosage de la troponine
Il est important de retenir que LES TROPONINES T ET I SONT DES MARQUEURS SPÉCIFIQUES DE LA NÉCROSE MYOCARDIQUE. Ainsi, l'élévation de la troponinémie dans les suites d'un accident coronaire non occlusif traduit une occlusion capillaire d'origine embolique.
Il est important d'avoir des notions de la cinétique de la troponinémie pour pouvoir interpréter ses résultats et adapter la prise en charge thérapeutique. Ainsi, elle est dosable dans le sang dès 3-4 heures après le début de l'épisode ischémique. Le 1er dosage doit être effectué dès le 1er contact médical et le résultat rapidement obtenu (< 60 min après l'admission) mais on ne doit pas attendre ce résultat pour commencer le traitement qui est une urgence. Il doit être renouvelé 6 heures après pour en apprécier la cinétique (augmentation/diminution/stabilisation) et 3-6 heures après une récidive douloureuse. Le retour à la normale est rapide en 2-3 jours. Ainsi, dans ce délai, un dosage de troponinémie haute lors d'une douleur thoracique est difficilement interprétable (queue de troponine correspondant à leur décroissance pour revenir dans les limites de la normale, celle-ci étant toujours élevée au moment du dosage). On peut alors être amené à utiliser d'autres marqueurs dont l'élévation et le retour à la normale sont plus courts mais dont la spécificité est plus faible comme la myoglobine ou les CPK-MB.
A noter tout de même que les derniers dosages ultrasensibles de la troponinémie pourraient permettre de récuser le diagnostic en cas de normalité du fait de leur cinétique d'apparition plus précoce (2 dosages séparés de 3 heures).
Cependant, la troponinémie ne doit être dosée que lorsque le diagnostic est suspecté car beaucoup d'affections sont susceptibles d'augmenter la troponinémie notamment une dissection aortique, une valvulopathie aortique, une myocardite, les tachycardies supraventriculaires ou jonctionnelles, une bradyarythmie sévère, une insuffisance cardiaque sévère, une embolie pulmonaire, une insuffisance rénale, un AVC, une hémorragie méningée et également toute défaillance viscérale sévère ... Dans ces situations, la cinétique de la troponinémie ne montre pas d'augmentation mais plutôt une stagnation.
Echocardiographie
Elle est recommandée pour éliminer les diagnostics différentiels, surtout lorsque l'ECG est normal ou qu'il y a un doute diagnostique : syndrome aortique aigu, péricardite ou myocardite.
Par ailleurs, une radiographie thoracique est également réalisée systématiquement pour éliminer ou rechercher un diagnostic différentiel.
Pronostic d'un SCA ST-
Situations à très haut risque
Elles justifient une prise en charge similaire au STEMI, c'est-à-dire une coronarographie en urgence dans les 120 minutes suivant le 1er contact médical, éventuellement précédée de l'administration d'un inhibiteur des récepteurs glycoprotéiques IIb/IIIa (anti GP IIb/IIIa) :
- ANGOR RÉFRACTAIRE
- RÉCIDIVE ANGINEUSE DOCUMENTÉE (sous-décalage ST ou onde T négative profonde) sous traitement médical optimal
- INSUFFISANCE CARDIAQUE GAUCHE (œdème aigu du poumon ou état de choc), instabilité hémodynamique
- TROUBLES DU RYTHME VENTRICULAIRE DANGEREUX (TV ou FV).
Situations à haut risque
Ces patients justifient une coronarographie rapide. Le risque doit être évalué de manière objective par un score de risque recommandé : le score GRACE (Global Registry of Acute Coronary Events). Il prend en compte l'âge, la fréquence cardiaque, la pression artérielle systolique, la créatininémie, les signes d'insuffisance ventriculaire gauche, la survenue d'un arrêt cardiaque, le sous-décalage du segment ST et l'élévation de la troponinémie. Le score est calculé par ordinateur et permet de prédire le risque de décès ou d'IDM hospitalier et ultérieur.
Ainsi on décrit 2 types de conduite à tenir selon les caractéristiques de ces patients :
- INDICATION DE CORONAROGRAPHIE À 24 HEURES :
- INDICATION DE CORONAROGRAPHIE À 72 HEURES :
- score GRACE > 140 ;
- élévation significative de la troponinémie (à répéter si la 1ère est négative) ;
- modifications dynamiques du segment ST ou de l'onde T sur l'ECG percritique.
- score GRACE entre 109 et 140
- diabète
- insuffisance rénale
- FEVG < 40 %
- angor post-infarctus récent (< 1 mois)
- angioplastie coronaire récente (< 6 mois)
- antécédent de pontage aorto-coronarien.
Situations à bas risque
Ces situations répondent aux critères suivants :
- score GRACE < 109
- pas de récidive douloureuse
- pas de manifestations d'insuffisance cardiaque
- pas d'anomalie ECG à l'admission ni de modification dans les 6-9 heures
- pas d'élévation de la troponinémie à l'admission ou 6-9 heures plus tard
Dans ces situations, la coronarographie est indiquée uniquement si un test fonctionnel a effectivement documenté une ischémie inductible.
Traitement
Dès le diagnostic, le patient est à prendre en charge en USIC (unité de soins intensifs cardiologiques) ou UDT (unité de douleur thoracique) par transport médicalisé pour réalisation d'un monitorage ECG et d'un dosage de la troponinémie complété par un bilan standard comprenant la créatininémie, la glycémie, et une NFS. Le traitement est alors initié dès que le diagnostic est confirmé ou considéré comme très probable.
Moyens thérapeutiques
Tout commence par la mise en condition du patient arrivé en USIC avec mise en place d'une perfusion sur voie veineuse périphérique avec du sérum glucosé à 5 % ou du sérum physiologique (débit de l'ordre de 500 mL/24h). Si le patient est en OAP, il faut également penser à dispenser une oxygénothérapie si la SpO2 est inférieure à 90 % et à le traiter (position demi-assise, dérivés nitrés, diurétiques de l'anse ...).
Antiagrégants plaquettaires :
- ASPIRINE à une posologie comprise entre 160 et 325 mg en injection intraveineuse directe (IVD) puis 75 mg/j per os au long cours. Elle est associée à une prise d'inhibiteur de la pompe à protons (IPP) pour les patients présentant des antécédents d'hémorragie gastro-intestinale ou d'ulcère peptique ou présentant d'autres facteurs de risques tels qu'une infection à Helicobacter pylori, un âge ≥ 65 ans ou encore l'usage concomitant d'anticoagulants ou de stéroïdes. C'est l'antiagrégant plaquettaire utilisé en 1ère intention et en systématique lors d'un SCA
- INHIBITEURS DES RÉCEPTEURS PLAQUETTAIRES P2Y12 : associés à l'aspirine et contre indiqués en cas d'antécédents d'AVC hémorragique. Quelque soit le type de stent mis en place, cette bithérapie (avec l'aspirine) est poursuivie sur une durée d'un an après avoir été donnée à une dose de charge. 3 médicaments sont disponibles :
- INHIBITEURS DES RÉCEPTEURS AUX GLYCOPROTÉINES IIB/IIIA : administrés en bolus IV, en cas d'angioplastie complexe, suivi d'une perfusion (abciximab, eptifibatide, tirofiban).
- clopidogrel (Plavix®) : 600 mg per os en dose de charge puis 75 mg/j ;
- prasugrel (Efient®) : 60 mg per os puis 10 mg/j. A noter que ce médicament est contre indiqué chez les patients âgés de plus de 75 ans, ou pesant moins de 60 kg ou encore présentant des antécédents d'AVC ou d'AIT ou une cirrhose Child C ;
- ticagrelor (Brilique®) : 180 mg per os puis 90 mg 2 fois par jour ;
Anticoagulant :
Un traitement anticoagulant doit être associé au traitement antiplaquettaire à la phase aiguë pour éviter l'extension du thrombus plaquettaire. Les médicaments utilisables dans cette indication sont :
- HÉPARINE NON FRACTIONNÉE (HNF) : 60-70 UI/kg en IVD (≤ 5 000 UI) puis 12-15 UI/kg/h (≤ 1 000 UI/h) en IVSE avec un objectif de TCA entre 1.5 et 2.5 fois la normale. Cette forme d'héparine est la seule utilisable en cas d'insuffisance rénale sévère (car son élimination se fait par le système réticulo-endothélial et non les reins) ;
- HÉPARINE DE BAS POIDS MOLÉCULAIRE (HBPM) : énoxaparine (Lovenox®) 100 UI/kg/12h en injection sous cutanée ;
- BIVALIRUDINE (ANGIOX®) : 0.1 mg/kg en IVD puis 0.25 mg/kg/h ;
- FONDAPARINUX (ARIXTRA®) : utilisable à la posologie de 2.5 mg/j en sous cutanée dans le SCA ST- mais n'a pas d'AMM dans le SCA ST+!
Concernant le traitement antithrombotique lors d'un SCA, le patient doit donc recevoir une double antiagrégation plaquettaire et un traitement anticoagulant à la phase aiguë. Il continuera sa double antiagrégation pendant un an pour au final ne prendre au long cours que l'aspirine ou un inhibiteur des récepteurs P2Y12 en cas de contre indication à l'aspirine.
Anti-ischémiques :
- β-BLOQUANTS (TYPE ATÉNOLOL) : en systématique dans un SCA en l'absence de contre indication. En cas de FEVG altérée, il faut utiliser un β-bloquant ayant l'AMM dans l'insuffisance cardiaque tel que le bisoprolol. Ils sont contre indiqués en cas de choc cardiogénique et/ou d'OAP massif et bien entendu en présence des contre indications classiques de cette classe médicamenteuse (asthme, bradycardie, BAV de haut degré ...)
- DÉRIVÉS NITRÉS PAR VOIE SUBLINGUALE (Natispray®) : indiqués pour soulager l'angor. Ils peuvent également être utilisés par voie IV (Risordan®) à la posologie de 1 mg/h IVSE pouvant être augmentée si nécessaire et si la tension le permet (la pression artérielle systolique devant être supérieure à 100 mmHg pour autoriser leur utilisation)
- ANTICALCIQUES : utilisés en particulier lorsqu'une composante spastique majeure est suspectée (sus-décalage ST transitoire) ou chez les patients présentant une contre indication aux β-bloquants : vérapamil (Isoptine®), diltiazem (Tildiem®). A noter que les dihydropyridines (nifédipine) sont contre indiquées lorsqu'elles sont prescrites seules.
Intervention coronaire percutanée :
La coronarographie permet de visualiser la lésion coupable du SCA et, dans le même temps, de la traiter par l'implantation d'une prothèse endocoronaire (stent), permettant de stabiliser la plaque rompue et de supprimer l'obstacle au flux sanguin. L'abord artériel est préférentiellement radial pour diminuer le risque hémorragique de la procédure qui, rappelons-le, est effectuée sous traitement anticoagulant à dose maximale. En général, le traitement anticoagulant (HNF ou HBPM, ou fondaparinux) est interrompu en fin de procédure mais le traitement antiplaquettaire est poursuivi.
Evaluation du risque hémorragique
Il y a une balance bénéfice-risque majeure à évaluer lors de ce traitement. En effet, un traitement anticoagulant puissant permet de limiter l'extension du thrombus de manière plus efficace mais expose à un risque de complications hémorragiques (digestive, cérébrale ...) important et de mauvais pronostic. Ceci dit, en voulant limiter ce risque par la diminution de la dose des anticoagulants, on expose alors le patient au risque de récidive ischémique.
Des scores d'évaluation de ce risque ont ainsi été développés tel que le score CRUSADE prenant en compte l'hématocrite, la clairance de la créatinine, la fréquence cardiaque, le sexe, les symptômes éventuels d'insuffisance cardiaque, les antécédents vasculaires, un diabète et la PA systolique. A noter que ce risque hémorragique augmente avec l'âge.
Parmi les moyens thérapeutiques utilisables cités, certains sont plus à risque hémorragique comparés aux autres notamment les nouveaux inhibiteurs des récepteurs P2Y12 (prasugrel et ticagrelor), l'énoxaparine en cas d'insuffisance rénale (par accumulation) et après 75 ans et enfin les anti-GPIIb/IIIa. A contrario, certains diminuent ce risque notamment le fondaparinux, qui est de ce fait recommandé en 1ère intention chez les patients devant bénéficier d'une coronarographie (hormis les situations à très haut risque), et la bivalirudine dont l'indication est limitée en association aux anti-GPIIb/IIIa à la place de l'HNF.
Stratégies thérapeutiques
Traitement commun à tous les patients | ||
---|---|---|
correction des FDRCV, statine, aspirine, inhibiteurs des récepteurs P2Y12, anticoagulants, anti-ischémiques (β-bloquant, dérivés nitrés +/- anticalcique), IPP | ||
Patients à bas risque Utiliser préférentiellement le clopidogrel comme inhibiteur des récepteurs P2Y12 et le fondaparinux comme anticoagulant. | Patients à haut risque (troponine positive) Utiliser préférentiellement le ticagrelor ou le prasugrel comme inhibiteur des récepteurs P2Y12 et l'énoxaparine ou l'héparine comme anticoagulant. | Patients à très haut risque Utiliser les mêmes médicaments que chez les patients à haut risque. Les anti-GPIIb/IIIa peuvent être utilisés dans l'angor réfractaire, au cours puis au décours immédiat d'une angioplastie coronaire. |
Infarctus du myocarde
Généralités
Définition
Il correspond à une nécrose myocardique d'origine ischémique.
L'ESC a proposé une classification des différents types d'IDM :
- TYPE 1 : spontané ;
- TYPE 2 : secondaire à un déséquilibre entre apports et besoins en O2 du myocarde (tachycardie, anémie, hypotension artérielle ...) ;
- TYPE 3 : décès au cours d'un SCA ST+ avant le dosage de la troponine ;
- TYPE 4 : survenant au décours d'une intervention coronaire percutanée ;
- TYPE 5 : survenant au décours d'un pontage aorto-coronarien.
A noter que le type 1 regroupe 2 entités physiopathologiques et cliniques distinctes :
- IDM AVEC SUS-DÉCALAGE PERSISTANT DU SEGMENT ST traduisant une occlusion coronaire épicardique brutale et se traitant par une désobstruction en urgence de l'artère ;
- IDM SANS SUS-DÉCALAGE PERSISTANT DU SEGMENT ST habituellement secondaire à une occlusion capillaire par un embole provenant d'une lésion coronaire en amont où l'objectif de la prise en charge est de prévenir l'occlusion coronaire aiguë.
Physiopathologie
Comme vu précédemment, la rupture ou la fissuration d'une plaque athérothrombotique va induire une réaction thrombotique locale avec formation d'un thrombus plus ou moins occlusif et qui au fur et à mesure des remaniements va finir par être totalement occlusif. Il reste généralement fixé au niveau de la lésion mais peut s'étendre de part et d'autre de celle-ci et également se fragmenter, migrant alors sous forme de petits emboles responsables d'infarctus rudimentaire, en particulier sous l'effet du traitement antithrombotique utilisé en phase aiguë.
Cette occlusion est alors responsable d'une anoxie prolongée qui va provoquer une nécrose progressive s'étendant à tout le territoire auparavant vascularisée par cette artère. Cependant, cette nécrose progressive peut être ralentie :
- SI LE MYOCARDE À RISQUE EST ALIMENTÉ PAR UNE CIRCULATION COLLATÉRALE (communication entre une artère saine et l'artère occluse en aval de l'occlusion permettant de shunter la lésion) ;
- SI LE MYOCARDE A ÉTÉ PRÉCONDITIONNÉ À CETTE COMPLICATION : en effet, lorsque le myocarde subit régulièrement des épisodes ischémiques transitoires, il augmente sa tolérance à une ischémie prolongée.
Dans tous les cas, si l'ischémie se prolonge au-delà de 12 heures, on peut considérer que le segment à risque est nécrosé (la plus grande partie l'étant dans les 2 premières heures).
L'ischémie aiguë est détectable par l'échocardiographie par la mise en évidence d'une akinésie du segment concerné avec, en réaction compensatrice, une hyperkinésie transitoire des segments controlatéraux permettant ainsi de limiter la baisse de la FEVG. Si le myocarde est rapidement reperfusé, cette akinésie peut être réversible (sidération myocardique). Cette hyperkinésie compensatrice n'est possible que si le réseau coronaire non soumis à l'anoxie aiguë est sain. L'existence de lésions athéromateuses sévères au niveau du réseau coronaire expose à un risque de complications hémodynamiques à type de choc cardiogénique par impossibilité du reste du myocarde de compenser la diminution de la contractilité d'un segment myocardique. En l'absence de reperfusion, cette akinésie évolue vers la nécrose mais l'hyperkinésie réactionnelle s'atténue progressivement et on voit alors apparaître une diminution de la FEVG et une dilatation du VG par remodelage. Ces dernières manifestations de l'ischémie myocardique sont responsables sur le long terme de l'insuffisance cardiaque chronique survenant après un infarctus du myocarde. A noter que l'altération du VG favorise la survenue de troubles du rythme ventriculaire sévères et que les inhibiteurs de l'enzyme de conversion de l'angiotensine (IEC) ont pour rôle notamment la prévention de ce remodelage ventriculaire.
Au delà de ce phénomène physiologique de remodelage ventriculaire post ischémique, l'évolution peut se faire de manière pathologique avec passage d'une akinésie vers une dyskinésie (c'est-à-dire une contraction anormale) pouvant aboutir à la formation d'un anévrisme ventriculaire gauche.
Diagnostic
Il peut être inaugural ou survenir chez un sujet qui a des antécédents cardiovasculaires. Il est souvent précédé de crises angineuses récurrentes (angor instable ou SCA ST-). Le diagnostic doit être rapide et principalement basé sur la clinique et le tracé ECG pour permettre une reperfusion rapide.
Clinique
La clinique typique d'un IDM est la douleur angineuse précordiale, rétrosternale en barre, constrictive, souvent intense, irradiant dans les avant-bras, poignets, mâchoires, dos ou épaules. Elle survient généralement au repos, est prolongée (> 30 min) et trinitro-résistante. Elle peut également être accompagnée de signes neuro-végétatifs tels que nausées, vomissements, sueurs, éructations ...
Tout comme dans les SCA, cette clinique peut être atypique à type de simple brûlure rétrosternale, douleur de l'épigastre (surtout dans les IDM du territoires inférieur), des bras, épaules, poignets, mâchoires, dos sans douleur précordiale.
Il faut retenir que la douleur peut manquer et que les IDM indolores se retrouvent surtout chez les diabétiques. Dans ce cas, les IDM peuvent passer inaperçus et être découverts fortuitement lors de la réalisation d'un ECG devant des ondes Q absentes lors du dernier ECG réalisé voire lors d'une complication tel qu'un trouble du rythme, une poussée d'insuffisance cardiaque ...
Le reste de l'examen clinique est généralement normal mais doit être réalisé à la recherche de complications (insuffisance ventriculaire droite et/ou gauche, choc cardiogénique, insuffisance mitrale d'origine ischémique, CIV) et pour éliminer les diagnostics différentiels.
ECG
La lésion typique d'un IDM à la phase aiguë est un sus-décalage du segment ST (onde de Pardee : sus-décalage du segment ST englobant l'onde T).
Cependant, la lésion la plus précoce à apparaître est une amplification de l'onde T qui se trouve alors pointue, ample et symétrique.
Ce sus-décalage débute au point J (point marquant l'intersection entre la fin du complexe QRS et le début du segment ST) et englobe l'onde T avec les caractéristiques suivantes :
- convexe vers le haut et siège en regard des territoires ischémiques
- ≥ 1 mm dans les dérivations frontales et ≥ 2 mm dans les dérivations précordiales
- sur au moins 2 dérivations contiguës
- présent dès les premières minutes de l'occlusion artérielle aiguë
Ce sus-décalage étant un signe direct et localisateur de l'ischémie aiguë, il permet ainsi d'indiquer la topographie de l'ischémie et de savoir quelle est l'artère potentiellement en cause (déjà développée dans un tableau récapitulatif antérieurement) :
- ANTÉRIEURE (antéroseptale (IVA) : V1-V2-V3 ; antérieure étendue : V1 à V6, D1, aVL) ;
- LATÉRALE (CX) : D1-aVL (haute) ; V5-V6 (basse) ;
- INFÉRIEURE (CD ou CX): D2-D3-aVF ;
- BASALE (postérieure) (CX) : V7-V8-V9.
Point important : chez un patient présentant une douleur thoracique, un ECG per-critique normal élimine quasiment un infarctus du myocarde. Il faut malgré tout savoir refaire l'examen pour éliminer ce diagnostic et rechercher en parallèle un diagnostic différentiel.
Le sus-décalage du segment ST peut cependant être masqué par la présence d'une bloc de branche gauche (BBG). En effet, un BBG typique peut donner un authentique sus-décalage ayant pour origine un trouble de la repolarisation secondaire à ce trouble de la conduction. Mais, un BBG récent, non connu auparavant associé à une symptomatologie typique, a valeur de sus-décalage.
Ainsi, un BBG ancien rend difficile le diagnostic d'IDM antérieur (sus-décalage ST dans les dérivations antérieures). Le signe de Cabrera permet théoriquement de distinguer un IDM antérieur d'un BBG par la présence d'un crochetage de la branche ascendante de QS de V1 à V4. (ci-dessous en V3 et V4.)
Lorsqu'un BBG est effectivement présent à l'état basal chez un patient présentant une douleur thoracique, il est intéressant de regarder attentivement la repolarisation. En effet, dans un BBG, la repolarisation est toujours inversée par rapport à l'axe du QRS d'où un aspect QS en V1-V2 avec sus-décalage ST et RsR' en V5-V6 avec sous décalage ST. Ainsi, même en présence d'un BBG, un sus-décalage ST en V5-V6 ou un sous-décalage en V1-V2 est en faveur d'un IDM à la phase aiguë.
Contrairement au BBG, le BBD n'interfère pas dans le diagnostic ECG d'IDM.
Sur ces exemples, le sus-décalage est flagrant. En réalité, il peut être nettement moins marqué et son évolution naturelle tend vers sa résolution, d'où l'intérêt d'une prise en charge diagnostique et thérapeutique rapide et efficace. Il peut également être absent et à rechercher dans des dérivations non présentes sur un ECG 12 dérivations classiques. Il faut ainsi réaliser un ECG 18 dérivations (12 dérivations en ajoutant sur un 2nd tracé ces nouvelles électrodes précordiales : V3r, V4r, VE, V7, V8, V9). Ces dérivations permettent ainsi de rechercher un sus-décalage du segment ST présents dans les territoires du ventricule droit (V3e, V4r, VE) ou de la partie postérieure du cœur (basale : V7-V8-V9). Ces atteintes peuvent être suspectées par des images en miroir à type de sous-décalage du segment ST dans les dérivations antérieures.
Effectivement, une lésion ECG présente sur une dérivation, sera également présente sur la dérivatin opposée à la précédente et avec une polarité opposée. Ces images en miroir obéissent à la règle de l’électroneutralité du cœur : à un instant donné, toute polarité positive à un endroit du cœur, s’accompagne d’une polarité négative diamétralement opposée. Ainsi, un sous-décalage du segment ST dans les dérivations antérieures peut répondre à des IDM inférieurs et basaux ; un sous-décalage du segment ST dans les dérivations inférieurs peut répondre à des IDM antérieurs et latéraux ; de même que des grandes ondes R en V1-V2 peuvent être le miroir d'une Q dans le territoire basal.
Enfin, les modifications ECG répondent à une chronologie spécifique qu'il convient d'avoir en tête :
- La présence d'ondes Q témoignent d'une nécrose myocardique transmurale et restent présentes sur l'ECG comme séquelles ischémiques localisatrices du territoire ayant été atteint. Une onde Q doit être considérée comme d'origine ischémique lorsqu'elle dure plus de 0.04 secondes (1 petit carreau) pour une amplitude de plus d'1/3 de l'onde R.
A noter que le segment ST doit revenir à la ligne iso-électrique en moins de 3 semaines. Si il n'est pas iso-électrique au bout de 3 semaines, il faut évoquer un anévrisme ventriculaire. Les ondes T peuvent rester négatives indéfiniment ou se repositiver sans valeur pronostic particulière.
Attention : l'association d'une douleur thoracique prolongée (> 30 min) et de signes ECG révélateurs suffit pour poser le diagnostic d'IDM ST+. La biologie confirmera le diagnostic a posteriori.
évolution
Un SCA ST+ justifie la mise en place immédiate d'une stratégie de reperfusion myocardique par essentiellement 2 moyens : fibrinolyse intraveineuse ou intervention coronaire percutanée.
Evolution clinique : syndrome de reperfusion
Lorsque le traitement a permis la reperméabilisation de l'artère atteinte, on assiste à une régression rapide de la douleur angineuse et du sus-décalage du segment ST (< 60 min) qui revient à la ligne iso-électrique, suivie par la négativation des ondes T qui pourront se repositiver ultérieurement. Une onde Q peut également se constituer dans les territoires ayant été atteints, sans valeur pronostique (séquelle ischémique).
A noter qu'en l'absence de reperfusion, l'évolution est identique mais plus lente et que dans ce cas l'onde Q est plus fréquente (marqueur d'une nécrose transmurale mais peut être absente dans les SCA ST- avec élévation de la troponine rentrant dans le cadre d'un infarctus dit sous-endocardique, qui, rappelons-le, est la couche à souffrir en premier de l'anoxie).
On peut noter à la phase aiguë de l'infarctus et persistant pendant 24-48 heures un fébricule à 38 °C traduisant une réaction inflammatoire non spécifique de l'organisme à la nécrose.
Evolution ECG : onde Q de nécrose
L'évolution ECG du tracé d'un IDM a été développé plus haut sur le schéma (onde de Pardee, segment ST, onde T).
L'onde Q est un signe direct de nécrose (comme l'est le sus-décalage du segment ST) lorsqu'elle est significative, c'est-à-dire qu'elle dure plus de 0.04 sec et qu'elle est profonde (≥ 1 mm ou ≥ 1/3 de l'onde R la suivant). Elle apparaît dans un délai variable, en moyenne à partir de la 6ème-12ème heure. Dans les suites, lorsqu'elle est apparue, elle persiste classiquement indéfiniment comme une séquelle d'IDM ayant une valeur localisatrice. Il faut cependant retenir qu'elle n'est pas systématique et qu'elle ne traduit pas toujours une nécrose étendue. A noter également qu'un BBG masque les ondes Q de nécrose (aspect QS dans les dérivations antérieures) mais qu'une onde Q d'apparition récente a valeur de nécrose.
Au final, l'onde Q a surtout une utilité dans le diagnostic a posteriori d'un IDM car elle rentre dans la définition OMS de l'IDM : 2 des 3 critères que sont la douleur typique, l'élévation enzymatique et l'onde Q.
Evolution biologique : élévation de la troponine
Lors de la nécrose du myocarde, des marqueurs enzymatiques, pour la plupart non spécifiques, sont libérés dans le circulation générale selon une certaine cinétique :
- MYOGLOBINE : marqueur le plus précoce, à partir de 2-3h après le début de l'anoxie. Son pic survient vers 8-12h et sa normalisation au bout de 24-36h ;
- CRÉATINE PHOSPHOKINASE (CPK) : élévation dès la 6ème heure, pic vers la 36ème heure, normalisation au 3ème-4ème jour. Si une reperfusion rapide est assurée, le pic est plus précoce (vers la 12ème heure). Cette enzyme n'est pas spécifique du myocarde mais son isoenzyme CPK-MB est plus spécifique du myocarde. Le taux est à considérer comme pathologique lorsqu'il est supérieur à 2N ;
- TRANSAMINASE GLUTAMIQUE OXALOACÉTIQUE (ASAT, SGOT) : élévation dès la 8ème heure, pic à la 24ème heure et normalisation au bout de 8-14 jours (abandonné) ;
- LACTATE DÉSHYDROGÉNASE (LDH) : élévation à partir de la 24ème heure, pic vers le 3ème-4ème jour.
Actuellement, le marqueur recommandé en 1ère intention est la troponine. C'est la marqueur le plus spécifique, en particuliers les isoformes I ou T. Très sensible, ce marqueur s'élève dès que la nécrose myocardique avoisine 1 gramme. Le seuil de détection est atteint dès 4h et peut le rester au-delà de 10 jours après l'épisode ischémiques (queue de troponine).
Début | Pic | Fin | |
---|---|---|---|
Myoglobine | 2-3 h | 8-12 h | 24-36 h |
Troponine | 4 h | 24 h | > 10 j |
CPK | 6 h | 36 h | 3-4 j |
ASAT | 8 h | 24 h | 8-14 j |
LDH | 24 h | 3-4 j | 8 j |
Ainsi, le diagnostic de nécrose myocardique est confirmé lorsque les taux de troponine (ou CPK-MB à défaut) sont élevés (2 dosages nécessaires pour confirmer l'élévation et la cinétique) dans les suites d'un épisode ischémique. Un prélèvement doit donc être obtenu à l'admission, à 6-9 heures et à 12-24 heures.
Lorsqu'un diagnostic très précoce doit être obtenu (tableau atypique, récidive après revascularisation), il est recommandé de réaliser un dosage immédiat d'un marqueur peu spécifique s'élevant rapidement (myoglobine) et de confirmer par un dosage ultérieur de la troponine.
Le taux atteint par les marqueurs de la nécrose est généralement proportionnel à la taille et au pronostic de l'IDM (sauf en cas de revascularisation précoce où le pic sera précoce et cette corrélation ne sera alors pas exacte).
Le diagnostic d'une récidive d'IDM repose sur la mise en évidence d'une réascension des CPK-MB (normalisation plus rapide que la troponine) dans les suites d'une récidive angineuse importante, impliquant une aggravation du pronostic.
Il est enfin à noter que les autres examens biologiques n'ont pas de valeur diagnostic :
- l'IDM est à l'origine d'UN SYNDROME INFLAMMATOIRE NON SPÉCIFIQUE AVEC AUGMENTATION DE LA VS (après 2-3 jours), du fibrinogène. On note aussi une hyperleucocytose à PNN, par démargination du fait du stress induit, maximale au 2ème-3ème jour pouvant persister une semaine voire plus ;
- LE TAUX DE CHOLESTÉROL TOTAL EST ABAISSÉ durant plusieurs mois et la glycémie peut être élevée transitoirement à l'admission. En l'absence de diabète connu, il faut alors contrôler la glycémie à distance (3 mois).
Diagnostics différentiels
Les principaux diagnostics à envisager sont les causes de douleur thoracique : péricardite aiguë, embolie pulmonaire, dissection aortique, pathologies sous-diaphragmatiques telles que cholécystite aiguë, ulcère gastroduodénal perforé ou pancréatite aiguë.
Deux autres diagnostics sont également à avoir en tête du fait de leurs potentielles similitudes avec l'IDM :
- MYOCARDITE AIGUË : douleur thoracique, modifications ECG avec sus-décalage du segment ST et élévation de troponine. La coronarographie permet d'éliminer une occlusion ou une sténose coronaire critique. L'IRM cardiaque permet de faire le diagnostic en montrant un réhaussement tardif dans des zones non-systématisées par le réseau coronaire et plutôt sous-épicardiques ;
- SYNDROME DE TAKO-TSUBO OU CARDIOMYOPATHIE DE STRESS : douleur thoracique, modifications ECG avec sus-décalage du segment ST puis au bout de 24-48 heures, évolution vers des ondes T négatives profondes et symétriques (généralement dans les dérivations précordiales), et parfois des ondes Q transitoires dans le territoire antéroseptal. Associée à ces anomalies cliniques et ECG, on note également une élévation des enzymes cardiaques (troponine, CPK-MB). A l'échocardiographie trans-thoracique (ETT), on constate classiquement une akinésie voire une dyskinésie touchant l'apex («apical ballooning») et la région médioventriculaire. Ce tableau mime donc un IDM. La coronarographie, souvent réalisée dans ce contexte, ne retrouve pas d'occlusion ni de sténose. Si l'IRM était réalisée, elle serait également normale. L'explication physiopathologique de ce syndrome n'est pas encore claire. Elle est appelée cardiomyopathie de stress car elle est fréquemment associée à un facteur déclenchant de type stress aigu (peur ou émotion) de type annonce d'un décès, accident, catastrophe naturelle ou encore intervention chirurgicale. Ce stress est alors à l'origine d'une augmentation de la sécrétion des catécholamines qui pourraient avoir une toxicité directe sur le myocarde. Ce syndrome touche préférentiellement les femmes après la ménopause.
Complications précoces
Troubles du rythme et de la conduction
Troubles du rythme ventriculaire
Extrêmement fréquents à la phase initiale d'un IDM, ils sont indépendants de l'étendue de la zone ischémique. Il peut ainsi s'agir d'extrasystoles ventriculaires (ESV), de tachycardie ventriculaire (TV) soutenue ou non soutenue voire de fibrillation ventriculaire (FV). La plupart des morts subites durant la phase aiguë des IDM est due à une FV (mort subite préhospitalière), d'où les politiques de généralisation de la mise à disposition des défibrillateurs semi-automatiques (DSA) pour permettre une meilleure prise en charge préhospitalière de ces troubles du rythme et en diminuer la mortalité. Effectivement, une FV n'est jamais réversible spontanément et nécessite un choc électrique externe (CEE) immédiat.
En pratique, ce risque de FV justifie une prise en charge médicalisée immédiate (SMUR), dès le diagnostic évoqué, et le transfert médicalisé en USIC (après admission en salle de cathétérisme si une intervention coronaire percutanée primaire est proposée) permettant la réalisation d'un CEE si nécessaire.
Par contre, il est à noter que la survenue d'un trouble du rythme de ce type à la phase initiale d'un IDM n'aura pas d'impact sur le pronostic ultérieur et n'augmente pas le risque d'accidents rythmiques ou de mort subite après la phase aiguë. Ainsi, un trouble du rythme ventriculaire, aussi grave soit il, à la phase aiguë d'un IDM n'est pas une indication à la pose d'un défribillateur implantable en urgence car il y a un facteur déclenchant aigu à ce trouble.
Troubles du rythme supraventriculaire
Fibrillation atriale, tachycardie atriale, flutter atrial. Ces troubles du rythme atriaux peuvent être à l'origine d'une décompensation hémodynamique ou responsables d'accidents emboliques. A noter que l'ischémie aiguë est une contre indication à l'utilisation des digitaliques.
Troubles de la conduction
Le plus grave est le bloc atrioventriculaire (BAV). Il en existe principalement 2 types :
- BAV DE L'IDM INFÉRIEUR : de mécanisme vagal, il correspond à un BAV du 2ème degré de type Mobitz 1, soit un bloc nodal (le nœud atrioventriculaire étant vascularisé par l'artère rétroventriculaire gauche naissant de l'artère coronaire droite). Il est bénin et répond généralement à l'atropine ;
- BAV DE L'IDM ANTÉRIEUR : par lésions ischémiques irréversibles des branches du faisceau de His, il correspond à un BAV 2 de type Mobitz 2 voire à un BAV 3 avec en général un échappement ventriculaire lent mal toléré nécessitant le recours à l'atropine mais également la mise en place d'un entraînement électrosystolique externe puis interne.
L'hypervagatomie, fréquente dans les IDM inférieurs, peut aussi être responsable d'une bradycardie sinusale voire de paralysie sinusale ou de bloc sino-auriculaire (BSA) répondant généralement à l'atropine.
Complications hémodynamiques
Insuffisance ventriculaire gauche
C'est un facteur de mauvais pronostic à court et moyen terme pouvant être la conséquence de l'étendue de la nécrose myocardique, d'une complication mécanique (insuffisance mitrale ischémique, CIV), ou être favorisée par une arythmie. De ce fait, elle justifie, au cours de la prise en charge d'un IDM, une évaluation échocardiographie précoce. Une altération de la FEVG < 50 % justifie l'alitement du patient durant les 24 premières heures (correspondant au délai d'apparition classique des complications).
La sévérité de l'insuffisance ventriculaire gauche est définie selon la classification de Killip :
- STADE 1 : absence de râles crépitants à l'auscultation pulmonaire (IDM non compliqué avec une mortalité hospitalière < 10 %) ;
- STADE 2 : râles crépitants aux bases ne dépassant pas la moitié des champs pulmonaires ;
- STADE 3 : râles crépitants dépassant la moitié des champs pulmonaires (OAP), galop auscultatoire ;
- STADE 4 : choc cardiogénique.
Choc cardiogénique
Il complique 6-7 % des IDM et associe typiquement une hypotension et des signes d'hypoperfusion périphérique (marbrures, extrémités froides, oligurie, confusion ...).
Il est défini par une PAS < 90 mmHg ou une pression capillaire < 20 mmHg ou un index cardiaque < 1.8 L/min/m². Ce diagnostic est aussi établi si un support inotrope ou la mise en place d'une assistance par contre-pulsion par ballon intra-aortique (CPBIA) sont nécessaires pour maintenir une PAS > 90 mmHg et un index cardiaque > 1.8 L/min/m².
Le diagnostic est posé initialement en présence d'une hypotension mal tolérée qui ni répond pas au remplissage vasculaire, après avoir corrigé une éventuelle bradycardie d'origine vagale ou une arythmie. Un choc cardiogénique est généralement associé à une nécrose étendue du VG mais peut également être la conséquence d'une atteinte ischémique du ventricule droit voire d'une complication mécanique. Il est rarement inaugural et survient plutôt secondairement dans les 24-48 heures suivant l'occlusion artérielle soit à l'occasion d'une récidive ischémique soit après une détérioration hémodynamique progressive. Les lésions responsables de choc cardiogénique sont en générale des lésions proximales de l'IVA et/ou des lésions pluritronculaires. Le pronostic hospitalier est sombre avec une mortalité > 70 %.
Infarctus du ventricule droit
Il peut prendre le masque d'un choc cardiogénique lorsqu'il est associé à une insuffisance ventriculaire gauche. Il se caractérise chez un patient atteint d'un IDM inférieur par la triade suivante : hypotension artérielle, champs pulmonaires clairs, turgescence jugulaire. Il peut également se présenter sous la forme d'une adiastolie aiguë.
L'ECG (18 dérivations) peut identifier un sus-décalage du segment ST dans les dérivations V3r et V4r (symétriques de V3 et V4 par rapport au sternum). L'ETT peut montrer une dilatation ou une akinésie du VD, une dilatation de l'atrium droit et une insuffisance tricuspidienne par dilatation de l'anneau.
A noter que l'infarctus du VD est souvent compliqué d'une fibrillation atriale compromettant l'hémodynamique. L'administration de vasodilatateurs ou de diurétiques est néfaste car ils diminuent le remplissage du VD et les β-bloquants sont contre indiqués en phase aiguë d'un infarctus du VD. Sa prise en charge repose ainsi principalement sur une revascularisation en urgence de l'artère atteinte (coronaire droite le plus souvent), un remplissage vasculaire par du sérum physiologique associé en général à un traitement inotrope de type dobutamine.
Complications mécaniques
Rupture de la paroi libre du VG
Cette rupture, lorsqu'elle est aiguë, est responsable d'un collapsus cardiovasculaire avec dissociation électromécanique (présence d'une activité électrique mais absence de contraction myocardique et de pouls). Elle est rare mais rapidement fatale (10 % de la mortalité des IDM).
Lorsqu'elle est subaiguë, elle se traduit par une récidive douloureuse pseudo-angineuse avec sus-décalage ST ou par une hypotension artérielle brutale et prolongée avec apparition d'une clinique de tamponnade. Le diagnostic est confirmé par une ETT et justifie d'une chirurgie immédiate.
Dans 1-2 % des IDM (essentiellement antérieurs étendus), une rupture du septum interventriculaire peut survenir et entraîne une communication interventriculaire (CIV). Elle apparaît en général après 24-48 heures. Ce diagnostic est évoqué devant une complication hémodynamique et confirmé par l'apparition d'un souffle précordial systolique irradiant en rayon de roue (mais parfois absent) et surtout par l'ETT (cf ci dessous) avec doppler couleur montrant un flux entre le VG et le VD.
Le cathétérisme droit avec oxymétrie, réalisé lors de la coronarographie préopératoire permet d'identifier un saut oxymétrique au niveau du VD (la saturation en O2 étant plus élevée dans l'artère pulmonaire que dans l'atrium droit par l'arrivée de sang oxygéné directement dans le VD). Malgré la fermeture rapide de la CIV, la mortalité hospitalière reste élevée (25-60 %).
Insuffisance mitrale
3 mécanismes peuvent être à l'origine d'une insuffisance mitrale dans ce contexte :
- DYSFONCTION D'UN PILIER MITRAL (pilier postérieur pour les IDM inférieurs, antéro-latéral pour les IDM antérieurs) ;
- RUPTURE D'UN PILIER MITRAL (IM aiguë) ;
- DILATATION DE L'ANNEAU MITRAL SECONDAIRE À LA DILATATION DU VG (IM tardive).
La rupture d'un pilier (muscle papillaire) entraîne une fuite importante par prolapsus valvulaire induisant une défaillance cardiaque brutale avec apparition d'un souffle systolique. Le diagnostic est échographique et le traitement chirurgical.
Complications thrombotiques
Thrombose veineuse et embolie pulmonaire
Peu fréquente, elle survient essentiellement chez les patients dont l'état justifie un alitement prolongé.
Thrombus intra-VG et embolies systémiques
Ils sont dépistés par l'échocardiographie, précocement, en particulier en cas de nécrose étendue et les IDM antérieurs. Leurs présences justifient la mise en place d'une anticoagulation curative.
Complications péricardiques
La péricardite à la phase aiguë d'un IDM peut être d'origine hémodynamique mais un syndrome inflammatoire est habituel et son intensité croît avec l'étendue de la nécrose justifiant un traitement par aspirine à fortes doses (3 g/j) ou des AINS dans les formes très algiques.
Dans les suites d'une nécrose myocardique, la survenue d'une péricardite est fréquente. Souvent asymptomatique, elle peut toutefois se manifester par une douleur thoracique d'allure péricardique avec possiblement un frottement péricardique à l'auscultation et un épanchement à l'ETT.
Complications ischémiques
Une récidive ischémique peut être secondaire à la réocclusion de l'artère désobstruée ou traduire l'existence d'une sténose résiduelle ou de lésions controlatérales asymptomatiques auparavant.
En pratique, l'épreuve d'effort à la recherche d'une ischémie silencieuse, peut être pratiquée dès le 5ème jour post-IDM en l'absence de contre indication. Elle est justifiée après thrombolyse IV ou en l'absence de reperfusion. Elle peut également être indiquée après revascularisation par intervention coronaire percutanée pour évaluer le retentissement de lésions controlatérales détectées par la coronarographie initiale. La mise en évidence d'une ischémie justifie alors la réalisation d'une revascularisation.
Complications tardives
Péricardite
Elle correspond au syndrome de Dressler, d'origine immunologique secondaire à la libération antigénique du tissu nécrosé myocardique, survenant classiquement à la 3ème semaine.
Ce tableau de péricardite peut s'accompagner d'un épanchement pleural, d'arthralgies, d'une réascension thermique avec un syndrome inflammatoire important. L'évolution est en règle favorable sous traitement anti-inflammatoire.
Dysfonction ventriculaire gauche
La persistance d'une FEVG basse après un IDM peut avoir plusieurs causes :
- LÉSIONS DÉFINITIVES DU MYOCARDE, NÉCROSE PUIS FIBROSE avec remodelage ventriculaire ;
- ANOMALIE FONCTIONNELLE TRANSITOIRE selon 2 mécanismes théoriques :
- sidération myocardique post-ischémique réversible après reperfusion rapide (réversibilité dans les 2 semaines) ;
- hibernation myocardique secondaire à une hypoperfusion myocardique chronique.
En pratique ces mécanismes sont souvent intriqués et il convient de faire la part entre le myocarde viable et celui nécrosé à l'aide de tests fonctionnels comme la scintigraphie myocardique ou encore l'échocardiographie de stress.
Il convient également de faire une ETT après une revascularisation coronaire pour évaluer la FEVG. Effectivement, à distance d'un IDM, la FEVG peut rester altérée. La cardiopathie ischémique est par ailleurs la 1ère étiologie d'insuffisance cardiaque en France.
A noter qu'une FEVG basse est un facteur de risque de décompensation cardiaque et de survenue tardive de trouble du rythme ventriculaire.
L'évolution naturelle d'une altération segmentaire de la cinétique du VG est péjorative et caractérisée par une dilatation globale du VG par remodelage avec parfois la formation d'une zone anévrismale.
En effet, un anévrisme ventriculaire peut se former à la suite d'un IDM, surtout antérieur et apical, et d'autant plus fréquemment que l'étendue de la nécrose est importante. Il correspond à une déformation du VG, comme le montre l'image ci-dessous, faisant saillie à l'extérieur du myocarde en systole et en diastole.
Radiographie thoracique et scanner injecté montrant un anévrisme ventriculaire gauche partiellement thrombosé
La présence de ce type d'anévrisme peut être asymptomatique ou se traduire par des signes d'insuffisance ventriculaire gauche. L'auscultation retrouvant classiquement un double foyer d'auscultation à la pointe. Ce diagnostic doit être évoqué devant la persistance d'un sus-décalage du segment ST au-delà de 3 semaines après l'IDM. La réalisation d'une radiographie thoracique permet alors de visualiser l'aspect ci-dessus avec une cardiomégalie (index cardio-thoracique > 50 %) et aspect en double bosse de l'arc inférieur gauche et possiblement des images d'œdème pulmonaire par dysfonction ventriculaire gauche. L'ETT fait alors le diagnostic en mettant en évidence une poche anévrismale souvent dyskinétique et doit rechercher la présence d'un thrombus intraventriculaire gauche. Si un thrombus est alors mis en évidence, il convient de l'anticoaguler. Autrement, le traitement est celui de l'insuffisance cardiaque associé et rarement chirurgical si la cavité a un volume important et est responsable d'une insuffisance cardiaque mal contrôlée par le traitement médical.
Troubles du rythme ventriculaire
Ces troubles du rythme tardifs (TV ou FV) sont sévères et d'autant plus fréquents que la nécrose myocardique est étendue. Ils naissent généralement d'une cicatrice de nécrose myocardique.
Contrairement aux troubles du rythme survenant à la phase aiguë d'un IDM, la survenue de troubles du rythme à distance d'un IDM sous traitement médical optimal (traitement de l'insuffisance cardiaque chronique voire anti-arythmiques) peuvent justifier la mise en place d'un défibrillateur automatique implantable (DAI) prophylactique lorsque la FEVG est inférieure à 35 % à une distance d'au moins 6 semaines de l'IDM.
Syndrome épaule-main
Il survient classiquement dans les mois suivant la nécrose myocardique. Il correspond à une neuro-algodystrophie associant une périarthrite scapulo-humérale, des troubles trophiques et des phénomènes vasomoteurs de la main. Son traitement comporte essentiellement le repos, des antalgiques non spécifiques, de la kinésithérapie, des anti-ostéoclastiques tels que les biphosphonates et éventuellement des infiltrations de corticoïdes.
Thrombose tardive de stent
Pouvant survenir jusqu'à 2-3 ans après leur mise en place, elle est plus fréquente avec les stents actifs et se manifeste par des SCA ST - ou + nécessitant une prise en charge en urgence avec une coronarographie.
Resténose intra-stent
Elle est liée à la prolifération intimale intra-stent, maximale au 6ème mois post implantation. Elle est plus fréquente avec les stents nus et prévenue par l'application de produits antimitotiques sur les stents actifs. Cliniquement, elle se manifeste par des symptômes d'angor chronique stable. Elle est dépistée par un test d'ischémie qui doit être réalisé à 6 mois de la mise en place du stent.
Traitement
Il repose sur la reperfusion coronaire en urgence («time is muscle»).
Prise en charge préhospitalière
Dès le diagnostic évoqué, une équipe médicalisée (SMUR) est dépêchée sur les lieux. Le diagnostic doit être suspecté sur la seule clinique et sera confirmé par l'enregistrement ECG réalisé à l'arrivée de l'équipe médicale, d'où l'intérêt de sensibiliser la population générale à cette clinique particulière pour que l'alerte soit donnée le plus rapidement possible.
Dès l'arrivée de l'équipe médicale, il est important de calmer et rassurer le patient face à cette douleur thoracique et de la prendre en charge (anxiolytiques si besoin et morphiniques si EVA > 3). Dans un premier temps, il faut expliquer au patient ce qui va être fait, réaliser un ECG puis poser une voie veineuse périphérique. Si l'ECG est évocateur, il faut transférer le patient vers un hôpital en discutant avec les cardiologues de la prise en charge la plus adaptée. Ce transfert doit être médicalisé avec un défibrillateur utilisable du fait des risques de troubles du rythme de cette pathologie mais également du risque d'instabilité hémodynamique. Une oxygénothérapie doit être dispensée si le patient présente une dyspnée ou une SpO2 < 95 %. En plus de ces traitements symptomatiques, 3 types de molécules doivent être données dès cette phase de la prise en charge :
- ASPIRINE : systématiquement, une dose de charge puis relayée à une dose de 75 mg/j (voir infra) ;
- INHIBITEURS DES RÉCEPTEURS P2Y12 : systématiquement, pour les 3 molécules disponibles (ticagrelor, prasugrel et clopidogrel) on utilise une dose de charge per os relayée ensuite par une dose conventionnelle (voir infra). A noter que la prise de ticagrelor ou de prasugrel est contre indiquée si une thrombolyse est envisagée ;
- ANTICOAGULANTS : systématiquement, HNF ou bivalirudine ou HBPM à doses curatives.
Ainsi, la technique de revascularisation est discutée en tenant du compte du délai écoulé depuis le début des symptômes et de celui qui sera nécessaire pour transférer le patient vers un hôpital équipé d'une salle de cathétérisme. Si la décision de réaliser une intervention coronaire percutanée est prise, elle justifie un transfert direct en salle de cathétérisme. Quelque soit la stratégie choisie, le patient devra par la suite être surveillé quelques jours en USIC.
Reperfusion myocardique
A réaliser le plus rapidement possible pour sauver le maximum de muscle cardiaque et espérer la meilleure récupération possible de la FEVG.
La nécrose myocardique débute à partir de 20 minutes d'occlusion coronaire. Elle est considérée comme complète pour le myocarde concerné au bout de 12 heures, rendant alors la reperfusion inutile. L'efficacité de la reperfusion est maximale lorsqu'elle est réalisée dans les 2 premières heures suivant l'occlusion artérielle.
Il existe 2 stratégies de reperfusion coronaire :
- INTERVENTION CORONAIRE PERCUTANÉE (ICP) (ou angioplastie coronaire primaire) consistant en la réalisation d'une coronarographie pour dilatation de lésion responsable ischémique et mise en place d'un stent ;
- FIBRINOLYSE INTRAVEINEUSE (FIV).
L'ICP est plus efficace que la reperfusion par FIV mais une FIV très précoce est plus utile qu'une ICP trop tardive. A noter que le choix d'une reperfusion coronaire ne tient pas compte du dosage de la troponinémie (la cinétique d'apparition n'étant pas adaptée à cette prise de décision urgente, elle servira à confirmer le diagnostic a posteriori).
Le choix de la stratégie de reperfusion tient ainsi compte des contre indications des 2 techniques et de 2 délais estimés lors de la prise en charge :
- délai du 1er contact médical écoulé entre le début de la douleur et le diagnostic confirmé par l'ECG
- délai de réalisation d'une ICP primaire à partir du 1er contact médical (incluant le temps de transfert du patient et de mise en place du guide dans l'artère coronaire)
En pratique, en l'absence de contre indication pour les stratégies pré-citées, le choix se fera selon les conditions suivantes :
- ICP PRIMAIRE SI :
- FIV rapide si les délais pour l'ICP primaire ne peuvent pas être respectés :
- délai ≤ 90-120 min pour les patients en général. Il devrait dans l'idéal être raccourci à 60 min si le patient se présente tôt et que l'IDM est a priori étendu ;
- délai ≤ 60 min si le diagnostic est posé dans un hôpital pouvant réaliser une ICP primaire.
- délai 1er contact médical - FIV ≤ 30 min (FIV préhospitalière) suivie d'un transfert direct vers un centre de coronarographie systématique :
EN CAS D'ÉCHEC DE LA FIV (persistance d'une douleur thoracique ou du sus-décalage du segment ST) : ICP secondaire (de sauvetage) ;
EN CAS DE SUCCÈS DE LA FIV : une coronarographie est à réaliser entre 3 et 24 heures avec réalisation d'une revascularisation adaptée aux lésions constatées.
Cette prise en charge peut être résumée par l'algorithme suivant de l'ESC.
A noter que l'âge du patient (> 65 ans) est également un élément à prendre en compte du fait d'une augmentation du risque hémorragique avec l'âge.
Reperfusion par ICP d'emblée :
Dans cette situation, comme expliqué précédemment, la coronarographie est précédée par l'administration (dès le diagnostic posé) d'aspirine, d'un inhibiteur des récepteurs P2Y12 (ticagrelor ou prasugrel de préférence, en l'absence de contre indication) et d'un anticoagulant (fondaparinux, énoxaparine ou HNF). A noter que les inhibiteurs des récepteurs glycoprotéiques GPIIb/IIIa ne sont pas indiqués avant la coronarographie (abciximab, tirofiban, éptifibatide) mais sont optionnels, à l'appréciation du coronarographiste, dans le traitement des lésions complexes (thrombus volumineux).
La coronarographie permet ainsi de confirmer l'occlusion artérielle et de la traiter dans le même temps par thromboaspiration, dilatation de la lésion par ballonnet et implantation d'une endoprothèse coronaire (stent).
Les critères de reperfusion associent la restauration d'un flux coronaire normal (vitesse d'opacification de l'artère désobstruée devant être identique à celle des vaisseaux controlatéraux : flux TIMI 3) et d'une perfusion capillaire normale (opacification complète et transitoire du myocarde au temps capillaire de l'injection de l'artère coronaire désobstruée : blush 3).
Lorsque la reperfusion est efficace, elle s'accompagne généralement d'une sédation de la douleur et d'une régression du sus-décalage du segment ST.
Reperfusion par fibrinolyse intraveineuse :
Elle est pratiquée lorsque les délais de réalisation précoce de l'angioplastie ne peuvent pas être respectés, dès la prise en charge préhospitalière après avoir éliminé les contre indications liées au risque hémorragique.
Contre indications de la FIV :
- > 75 ANS (contre indication relative à moduler en fonction de l'état physiologique)
- POUSSÉE ULCÉREUSE DATANT DE MOINS DE 6 MOIS
- INTERVENTION DE CHIRURGIE GÉNÉRALE < 10 jours
- intervention de chirurgie générale vasculaire < 1 mois ;
- AVC, malformation vasculaire cérébrale ;
- traumatisme crânien récent ;
- HTA non contrôlée, PAS > 200 mmHg ;
- massage cardiaque récent (contre indication relative en fonction de la gravité du tableau) ;
- ponction récente de gros vaisseaux non comprimables < 24 heures ;
- injection intramusculaire (risque d'hématome induit) ;
- insuffisance hépatocellulaire grave ;
- grossesse et post partum ;
- troubles de l'hémostase ou diathèse hémorragique (tendance au saignement inexpliqué, épistaxis ...)
Produits et protocoles de FIV :
- STREPTOKINASE (STREPTASE®) : fibrinolytique non spécifique de la fibrine à l'origine d'une fibrinogénolyse périphérique, abandonné ;
- ACTIVATEUR TISSULAIRE DU PLASMINOGÈNE (t-PA : Actilyse®) : fibrinolytique spécifique prescrit en bolus puis en perfusion. Plus efficace que le produit précédent, il est remplacé par le produit suivant pour une efficacité similaire et un maniement plus simple ;
- TNK-TPA (MÉTALYSE®) : une seule injection en bolus avec une posologie adaptée au poids du patient, associé au traitement aspirine + clopidogrel en dose de charge et à une héparinothérapie jusqu'à 48h ou jusqu'à réalisation de la coronarographie ou de l'ICP. Il peut également être associé à l'énoxaparine chez les patients de moins de 75 ans.
Critères d'efficacité :
La reperfusion est obtenue dans les 90 minutes suivant l'administration de TNK-tPA dans 50 à 60 % des cas.
Elle se traduit par un syndrome de reperfusion associant une régression rapide (60-90 min) simultanée de la douleur et du sus-décalage ST (régression > 70 % dans les dérivations où il est maximal). A noter que ce syndrome peut être absent malgré un succès confirmé par l'angiographie.
La reperfusion peut être associée à des troubles du rythme ventriculaire à type d'ESV, TV mais aussi d'un rythme idioventriculaire accéléré (RIVA) caractérisé par des complexes QRS larges, atypiques, réguliers et de fréquence plus rapide (55–120/mn) que lors d’un rythme d'échappement ventriculaire (≤ 45/mn). Une dissociation auriculo-jonctionnelle est fréquente avec de nombreuses captures sinusales. Bien tolérés, les RIVA cèdent de façon spontanée et ne nécessitent en général aucun traitement.
Elle peut également s'accompagner d'un BAV (en particulier après désobstruction de l'artère coronaire droite), d'une augmentation paradoxale de la douleur voire d'un sus-décalage du segment ST, d'un syndrome hypotension-bradycardie.
Complications :
En respectant les contre indications, la survenue d'un AVC est toutefois noté dans 0.6-2 % des cas et il est hémorragique dans 50 % des cas. Ce type de complication justifie alors l'adaptation voire l'arrêt du traitement anticoagulant pouvant avoir des conséquences sur le pronostic vital immédiat (risque de réocclusion et de récidive ischémique).
La reperfusion expose à un risque de réocclusion, en particulier en cas de mauvaise observance du traitement antiagrégant plaquettaire ou d'arrêt dans le cas d'une complication hémorragique. Elle se manifestera alors par une récidive ischémique clinique et ECG suivie d'une nouvelle augmentation des CPK-MB (la troponine n'étant pas influencée du fait de sa cinétique de décroissance plus longue).
Traitements associés à la reperfusion
Comme il l'a été dit dans le 1er paragraphe, les traitements symptomatiques, antiagrégants plaquettaires et anticoagulants sont administrés d'emblée lors de la prise en charge préhospitalière.
Traitement symptomatique :
On peut d'emblée avoir recours aux antalgiques morphiniques en cas de douleurs majeurs (chlorhydrate de morphine) et aux anxiolytiques. L'oxygénothérapie nasale à un début de 2-4 L/min est proposée en cas de dyspnée ou de désaturation.
Antiagrégants plaquettaires :
L'aspirine est systématiquement administrée, initialement à une dose de charge de 250 mg en IVD puis relayée per os à une dose quotidienne de 75 mg/j.
Associé à l'aspirine, on prescrit un inhibiteur des récepteurs P2Y12 qui peut être :
- CLOPIDOGREL, per os à une dose de charge de 600 mg suivie d'une dose d'entretien de 75 à 150 mg/j. A noter que c'est le seul médicament de cette classe thérapeutique utilisable chez les patients traités par FIV ;
- PRASUGREL, per os à une dose de charge de 60 mg puis une dose d'entretien de 10 mg/j en respectant ses contre indications (> 75 ans, < 60 kg, antécédents d'AVC ou AIT) ;
- TICAGRELOR, per os à une dose de charge de 180 mg puis à une dose d'entretien de 90 mg deux fois par jour en l'absence d'antécédent d'AVC hémorragique.
Anticoagulants :
Quelque soit la stratégie de reperfusion coronaire, il est systématique d'administrer un anticoagulant par voie IV. Par contre, son relais per os n'est justifié que dans certains cas (thrombus intra-VG, FA, complication thrombotique veineuse).
Peuvent être utilisés :
- HNF : bolus initial de 60 UI/kg avec un relais en IVSE à 12 UI/kg/h initialement, à adapter au TCA mesuré à 3, 6 et 12 heures puis deux fois par jour ;
- ÉNOXAPARINE (Lovenox®) : bolus initial de 30 mg (ou 0.5 mg/kg) puis 1 injection sous-cutanée de 1 mg/kg toutes les 12 heures. Il est cependant contre indiqué en cas d'âge > 75 ans, FIV ou insuffisance rénale) ;
- BIVALIRUDINE : bolus initial de 0.75 mg/kg suivi d'une perfusion de 1.75 mg/kg/h.
Le choix de l'anticoagulant dépend ainsi de la stratégie de reperfusion utilisée :
- si une ICP est envisagée, on utilisera plutôt la bivalirudine mais elle n'est pas indiquée en association avec la FIV ;
- lorsqu'une ICP est pratiquée, l'anticoagulation doit être arrêtée à la fin de la procédure sauf cas particuliers ;
- après FIV, l'anticoagulation est à poursuivre jusqu'à réalisation de la coronarographie.
β-bloquants :
Ils permettent de limiter l'extension de la nécrose myocardique, réduire l'incidence de survenue de troubles du rythme cardiaque sont aussi prescrits à visée antalgique en diminuant les besoins en O2 du myocarde.
Ils sont utilisés en 1ère intention par voie IV avant la revascularisation en cas de TV avec une hémodynamique conservée, HTA ou de douleur persistante malgré les morphiniques. Ils peuvent généralement être prescrits d'emblée per os après revascularisation. Ils sont à prescrire le plus précocement possible après revascularisation, en fonction de la clinique et de la FEVG, préférentiellement en USIC du fait du risque de décompensation cardiaque.
A noter qu'ils sont contre indiqués dans la prise en charge des SCA ST+ inférieurs avant revascularisation du fait que la coronaire droite vascularise le VD et expose de ce fait à un risque d'extension de l'infarctus du VD et que cette même artère vascularise le nœud sinusal avec un risque de bradycardie sinusale voire de BSA ou de BAV. Ils sont également contre indiqués en cas d'infarctus du VD à la phase aiguë et tant que la fraction d'éjection du VD ne s'est pas normalisée.
On peut prescrire : Aténolol 100 mg en cas de FEVG normale ou bisoprolol 1.25 mg en cas de FEVG < 35 %.
IEC :
Ils doivent être débutés dans les 24 premières heures, à doses progressives, en tenant compte de la tolérance fonctionnelle et de la fonction rénale.
Inhibiteurs des récepteurs aux minéralocorticoïdes : éplérénone
Ce médicament fait partie de la famille des antialdostérones. Il doit être introduit précocement en cas d'IDM étendu (FEVG < 40 %) ou de signes d'insuffisance cardiaque.
Traitements ne devant pas être utilisés systématiquement
Dérivés nitrés :
Ils sont utilisés per os à visée diagnostique (sus-décalage trinitro-résistant) et ne sont plus prescrits systématiquement par voie IV (effets délétères lorsque la nécrose s'étend au VD). Ils sont utilisables en cas d'OAP compliquant un SCA.
Anticalciques :
A utiliser en cas de contre indications aux β-bloquants et en l'absence de dysfonction VG sévère.
Anti-arythmiques :
Ils ne préviennent pas le risque d'arythmie sévère.
Surveillance en USIC
A l'issue de la prise en charge aiguë de l'IDM, le patient est surveillé en USIC sous monitoring cardiaque avec des contrôles biologiques quotidiens (cycle enzymatique à 6h, 12h, troponinémie, glycémie, créatininémie, NFS, plaquettes). Une ETT doit être réalisée après revascularisation pour évaluer la FEVG, la présence d'une IM, d'un épanchement péricardique ou encore d'un thrombus.
En l'absence de complications, le patient peut classiquement s'asseoir au bord du lit au bout de 12 heures d'hospitalisation en USIC et déjeuner par ses propres moyens. La marche à plat est autorisée dès le 2ème jour puis les efforts plus soutenus par la suite (l'épreuve d'effort n'est autorisée qu'à partir du 5ème jour).
La sortie de l'hôpital peut être envisagée dès le 5ème jour, éventuellement vers un centre de réadaptation à l'effort. Un arrêt de travail est à proposé pour au minimum un mois et les soins sont pris en charge à 100 %.
Traitement des complications hospitalières
Troubles du rythme ventriculaire :
Le traitement anti-arythmique à utiliser en 1ère intention est la lidocaïne (Xylocaïne® 1 mg/kg en bolus suivi d'un relais de 20 mg/kg/24h IVSE) dans les situations suivantes :
- ESV nombreuses, polymorphes, en doublets ou triplets avec phénomène R/T
- TV après choc électrique externe (CEE) si elle est soutenue et mal tolérée (300 J sous brève AG si le patient est conscient)
- FV après massage cardiaque externe et CEE
La lidocaïne tend à être remplacée par l'amiodarone IV à 150-300 mg sur 30-60 min puis en perfusion de 600-900 mg/24h.
Le RIVA, témoin de la reperfusion coronaire, s'apparentant à une TV lente à environ 80 bpm, ne nécessite aucun traitement sauf s'il est mal toléré.. Il peut alors être réduit par accélération du rythme auriculaire (atropine ou stimulation électrique).
Troubles du rythme supraventriculaire :
Les digitaliques sont contre indiqués à la phase aiguë et les anti-arythmiques de classe Ia (disopyramide) et Ic (flécaïne) de la classification de Vaughan Williams sont contre indiqués ultérieurement à titre préventif.
En cas de mauvaise tolérance, la réduction du trouble du rythme est indiquée mais cette réduction est souvent spontanée dans ce contexte. La survenue de ces troubles du rythme justifient un traitement anticoagulant au long cours.
Bradycardie sinusale et troubles de la conduction :
Le BAV transitoire de l'IDM inférieur, de mécanisme vagal, relève d'un traitement par atropine IV (0.5 à 1 mg) lorsqu'il est symptomatique et très rarement un entraînement électrosystolique temporaire.
Au contraire, le BAV compliquant l'IDM antérieur nécessite toujours la mise en place d'une sonde d'entraînement électrosystolique. Dans l'attente de sa mise en place, la fréquence cardiaque peut être accélérée par l'administration prudente d'isoprénaline (Isuprel®), 5 ampoules dans 250 cc de G5, malgré le risque de déclencher une arythmie ventriculaire maligne. La rapidité d'installation de ce BAV justifie la mise en place préventive d'une sonde de stimulation si apparaît une alternance BBG-BBD, un BBD et un HBPG ou un HBAG, voire un BBG pour certains auteurs.
Insuffisance ventriculaire gauche :
Son traitement est non spécifique au contexte et se base essentiellement sur les diurétiques de l'anse pour diminuer la rétention hydrosodée et les IEC voire un antialdostérone en cas de FEVG basse.
En cas de FEVG < 35 % avec des symptômes d'insuffisance ventriculaire gauche (NYHA 2-3) sous traitement médical optimal à distance d'au moins 6 semaines de l'IDM, il y a une indication à mettre en place un défibrillateur automatique implantable (DAI) en prévention primaire lorsque la l'espérance de vie est supérieure à 1 an afin de diminuer le risque de mort subite par troubles du rythme au cours du suivi post IDM.
Choc cardiogénique :
La prise en charge d'un choc cardiogénique repose tout d'abord sur la correction des facteurs aggravants le choc tels qu'une hypovolémie ou un trouble du rythme. Après avoir procéder à un remplissage vasculaire prudent, il convient de traiter la cause du choc (revascularisation myocardique) et de lutter contre la sidération myocardique à l'aide d'un support inotrope tel que la dobutamine. Dans les cas les plus graves ou réfractaires au traitement, une assistance circulatoire peut être nécessaire. Le traitement peut ainsi comprendre les élément suivants :
- ASSISTANCE CIRCULATOIRE PAR MISE EN PLACE D'UN BALLONNET DE CONTRE-PULSION INTRA-AORTIQUE ;
- rEVASCULARISATION PAR ANGIOPLASTIE OU CHIRURGIE (pontage) ;
- ASSISTANCE CARDIAQUE PAR CIRCULATION EXTRA-CORPORELLE (ECMO : extracorporeal membrane oxygenation) ;
- ASSISTANCE CARDIOCIRCULATOIRE PAR CŒUR ARTIFICIEl, en attente d'une transplantation cardiaque.
Complications mécaniques :
Elles relèvent généralement d'un traitement chirurgical réalisé dans des conditions difficiles (urgence, caractère inflammatoire des lésions, myocarde ischémique friable) sources de complications (lâchage de sutures). La préparation préopératoire consiste en la mise en place d'une assistance circulatoire par ballon de contre-pulsion intra-aortique associé à l'administration de support inotrope et de diurétiques.
RUPTURE DE LA PAROI LIBRE DU VG :En règle rapidement mortelle, il est rare que le patient puisse être confié à une équipe chirurgicale.
RUPTURE SEPTALE :Son traitement est chirurgical est consiste en une suture chirurgicale d'un patch de fermeture au niveau de la rupture septale. Exceptionnellement, la fermeture peut se faire par implantation percutanée d'une prothèse. Le délai de réparation dépend principalement de la tolérance clinique et il est important de noter que les résultats sont meilleurs lorsque la chirurgie peut être différée de quelques jours.
IM PAR RUPTURE DE PILIER : Son traitement consiste en un remplacement valvulaire.
Planifier le suivi chez un coronarien stable ou après un SCA
Un patient coronarien nécessite un suivi rapproché à la fois par son médecin traitant et son cardiologue avec une fréquence des consultations qui va dépendre de la sévérité de son atteinte coronaire (en moyenne une fois tous les 3-4 mois chez le médecin traitant et 2 fois par an chez le cardiologue, en sachant qu'une consultation 1 mois après un SCA peut être recommandée chez un cardiologue).
Le suivi thérapeutique de ces patients après le traitement de la phase aiguë est primordial et peut être résumé par le moyen mnémotechnique déjà évoqué BASIC : β-bloquant, antiplaquettaires, statine, IEC et contrôle des FDRCV au quel on peut rajouter LEON : lasilix en cas de signes congestifs (insuffisance ventriculaire gauche voire globale), éplérénone si FEVG < 40 % associée à des signes d'insuffisance ventriculaire gauche, oméga 3 rentrant dans le cadre d'un régime sain et équilibré, dérivés nitrés à toujours avoir sur soi et à utiliser par voie sublinguale en cas de douleur angineuse.
Le suivi permet de s'assurer du bon contrôle des FDRCV : arrêt total et définitif du tabac, abaissement du LDL-c < 1 g/L voire 0.7 g/L selon les recommandations (voir item 219), contrôle de la glycémie chez les diabétiques, contrôle de pression artérielle, reprise d'une activité physique et instauration d'un régime méditerranéen. Il recherche également d'autres localisations de la maladie athéromateuse par échographie-doppler.
Il permet également la gestion des médicaments instaurés :
- ANTIAGRÉGANTS PLAQUETTAIRES :
- quelque soit le traitement d'un SCA ou d'un IDM : association aspirine + inhibiteur des récepteurs P2Y12 pour un an puis poursuite de l'aspirine seule ;
- dans l'angor chronique stable : la mise en place d'un stent nu nécessite une double antiagrégation pendant 1 mois puis une monothérapie par aspirine au long cours alors qu'un stent actif nécessite une double antiagrégation plaquettaire pendant un an suivie de l'aspirine seule au long cours ;
- dans l'angor chronique stable : un traitement par pontage aorto-coronarien nécessitera la prise d'aspirine seule au long cours ;
- STATINES : systématiques dans l'angor chronique, elles le sont également après un SCA, à fortes doses ;
- β-BLOQUANTS : systématiques chez tout patient ayant fait un IDM ;
- IEC : systématique chez tous les coronariens ;
- ÉPLÉRÉNONE : réservé aux patients ayant fait un IDM étendu avec une FEVG initiale < 40 % ou ayant des signes d'insuffisance cardiaque.
Ce suivi permet aussi de poser l'éventuelle indication à la pose d'un DAI en prévention primaire de troubles du rythme lorsque la FEVG reste < 35 % au moins 6 semaines après l'IDM.
Il doit aussi être réalisé à chaque consultation cardiologique un enregistrement ECG à la recherche de signes d'ischémie ou de troubles du rythme et régulièrement des ETT pour évaluer la FEVG, un remodelage du VG ou d'éventuelles complications comme une insuffisance mitrale. Il convient également après revascularisation coronaire de rechercher une ischémie myocardique dans la zone revascularisée ou à distance de celle-ci par un test fonctionnel à 6 mois de la mis en place d'un stent (dépistage de la resténose intra- stent) puis tous les 1-2 ans.