- Neuro. et Neurochir.
- UE 4
- Item 103
Important
Sclérose en plaques
Introduction
La sclérose en plaque (SEP) est UNE MALADIE INFLAMMATOIRE CHRONIQUE DU SYSTÈME NERVEUX CENTRAL (SNC). Elle peut toucher n’importe quelle zone du SNC et donc provoquer des manifestations cliniques très variées. Il existe des tableaux cliniques fréquents au début de la maladie qui feront facilement évoquer une SEP, mais il faudra y penser plus largement devant tout symptôme neurologique central.
Epidémiologie
- SEX RATIO : la SEP atteint 3 femmes pour 1 homme.
- AGE DE DÉBUT : entre 20 et 40 ans en général.
- PRÉVALENCE : plus de 1 pour 1000 habitants en France
- GRADIENT NORD/SUD : la SEP est 2 fois plus fréquente en Scandinavie qu’en Europe du sud
- FACTEURS DE RISQUES : génétiques (population caucasienne, jumeaux atteint de SEP, …) et environnementaux (infection à EBV, tabagisme, carence en vitamine D et/ou faible ensoleillement, obésité, …).
Physiopathologie
Il s’agit d’une atteinte inflammatoire de la gaine de myéline. La conséquence est la présence de plaques de démyélinisation au sein de la substance blanche.
La remyélinisation des axones reste cependant possible (via les oligodendrocytes), ce qui explique les phases de récupération entre les poussées.
Clinique
Symptômes initiaux les plus fréquents dans la SEP :
- NÉVRITE OPTIQUE RÉTROBULBAIRE (premier symptôme dans 25% des cas) : nom barbare qui correspond à une atteinte du nerf optique (et donc des voies afférentes de la vision). Elle se traduit donc par une baisse d’acuité visuelle apparaissant en quelques heures à quelques jours, avec un œil blanc, une douleur augmentée par les mouvements oculaires (dans 80% des cas). On peut aussi retrouver un scotome (lacune dans le champ de vision) et une dyschromatopsie rouge/vert. L’examen oculaire se révèle normal le plus souvent, mais on peut retrouver dans 10% des cas un œdème papillaire au fond d’œil. La récupération est complète dans 80% des cas après 6 mois. Le phénomène d’Uthoff correspond à l’apparition ou l’aggravation des symptômes de SEP à la chaleur ou lors de l’exercice, par exemple une NORB peut apparaître à la suite d’un jogging ou lors d’un bain chaud.
- TROUBLES DE LA SENSIBILITÉ (premier symptôme dans 20% des cas) : on peut retrouver par exemple des paresthésies ou des douleurs de localisations variables. L’atteinte des cordons postérieurs (où cheminent les voies des sensibilités épicritique et proprioceptive) de la moelle cervicale est évocatrice. Elle se révèle par le signe de Lhermitte qui correspond à une sensation de décharge électrique le long du rachis à la flexion antérieure de la tête.
- TROUBLES DE LA MOTRICITÉ (premier symptôme dans 10 à 20% des cas) : Atteinte motrice centrale sans topographie spécifique. On peut retrouver des parésies plus ou moins étendues, des troubles de la marche, de l’équilibre. Une atteinte motrice initiale est de mauvais pronostic.
Autres symptômes fréquents au cours de l’évolution :
- Atteinte du tronc cérébral (paralysie faciale centrale, syndrome vestibulaire, dysphonie,…), troubles sphinctériens, troubles cognitifs, asthénie…
Les 3 formes évolutives de la SEP :
- FORME RÉMITTENTE-RÉCURRENTE (85% des cas) : la maladie se manifeste par épisodes de poussées, suivis d’épisodes de rémission, la récupération des symptômes est plus ou moins complète durant cette deuxième phase et il peut persister des séquelles. Les symptômes apparaissent en quelques heures à quelques jours. Bien que les durées de ces phases soient variables, les phases de poussées persistent au moins 24h, et les phases de rémission durent au moins un mois.
- FORME PRIMAIRE PROGRESSIVE (15% des cas) : Les symptômes suivent une évolution linéaire (pas de découpage en phases de poussée/rémission) avec une aggravation progressive des symptômes. Le pronostic est moins bon dans cette forme de SEP.
- FORME SECONDAIREMENT PROGRESSIVE : Il s’agit d’une évolution naturelle de la forme rémittente-récurrente environ 15 à 20 ans après le début de la maladie. L’évolution de la SEP perd alors son découpage en phases de poussées/rémissions et devient linéaire avec une aggravation progressive des lésions.
Diagnostic
Le diagnostic de SEP se fait par la mise en évidence clinique et/ou paraclinique de lésions neurologiques inflammatoires centrales de localisations et d’âges différents. Cette mise en évidence correspond aux CRITÈRES DE MCDONALD :
- Dissémination spatiale des lésions : présence de lésion dans au moins 2 zones différentes, cliniquement (par exemple la présence d’une NORB et d’un syndrome pyramidal impliquent la présence de 2 lésions distinctes) ou bien à l’IRM (lésions visibles dans au moins 2 des 4 zones suivantes : juxta-corticale, péri-ventriculaire, sous-tentorielle, médullaire)
- Dissémination temporelle des lésions : apparition de lésions cliniques successives dans le temps, ou présences de lésions différentes sur deux IRM successives ou bien présence de lésions récentes et anciennes sur une seule IRM (voir plus bas pour la distinction des lésions anciennes et récentes). Dans les formes primitivement progressives, ce critère est validé par une évolution des symptômes depuis plus d’un an.
Ainsi si l’histoire clinique est évocatrice d’une SEP le premier examen à réaliser pour faire le diagnostic sera l’IRM cérébrale (sauf si les symptômes évoquent une lésion médullaire, on réalisera, dans ce cas, une IRM médullaire en premier lieu).
Les lésions inflammatoires du SNC (qu’elles soient anciennes ou récentes) apparaissent en hypersignal dans les séquences T2 et FLAIR (le FLAIR correspondant à une séquence T2 où le liquide cérébro-spinal apparaît en noir), et en isosignal ou en hyposignal dans les séquences T1
Les lésions récentes apparaissent en hypersignal dans les séquences T1 avec injection de gadolinium (on dit qu’elles sont rehaussées par l’injection de gadolinium), alors que les lésions anciennes restent en isosignal ou hyposignal même avec l’injection de gadolinium.
On comprend donc que les séquences d’IRM à réaliser en cas de suspicions de SEP sont : T1, T1 gadolinium, T2, FLAIR.
Si les critères de McDonald ne sont pas remplis par la clinique ni la première IRM cérébrale, on réalise un IRM médullaire à la recherche des lésions décrites. Si ,malgré tout, les critères ne sont toujours pas remplis, il y a indication à réaliser une nouvelle IRM dans 3 à 6 mois pour évaluer l’évolution des lésions.
Place des autres examens :
Ces examens ne sont pas indispensables au diagnostic de SEP mais ils peuvent apporter des arguments supplémentaires en faveur du diagnostic de SEP, ou au contraire suggérer un autre diagnostic.
- Ponction lombaire : en cas de SEP on retrouve un LCS inflammatoire et stérile. On retrouve des bandes oligoclonales d’immunoglobulines (Ig) dans 90% des cas, ainsi qu’un index IgG augmenté. Cela correspond à une synthèse d’IgG dans le LCR (dite synthèse intrathécale) et est très évocateur de SEP. On peut parfois retrouver une élévation modérée de la protéinorachie et de la cytorachie.
- Potentiels évoqués visuels : de moins en moins réalisés, ils peuvent apporter des arguments en faveur d’une NORB (augmentation des latences de conduction)
Diagnostics différentiels
Les principaux diagnostics différentiels seront les autres atteintes du SNC. On peut citer les maladies inflammatoires systémiques (lupus, sarcoïdose,...), les infections neuroméningées, les AVC successifs ; ces diagnostics seront évoqués selon le contexte clinique et paraclinique, en cas d’altération de l’état général, de manifestations cliniques non liées au SNC, de contexte infectieux, de syndrome inflammatoire biologique sanguin. En cas d’atteinte localisée du SNC, l’IRM permettra d’éliminer une tumeur, une malformation vasculaire ou une compression médullaire.
Pronostic
Le pronostic de la SEP est très variable, 25% des patients auront une forme bénigne avec peu de symptômes alors que 10% auront une forme rapidement grave avec handicap et dépendance majeure.
On estime que sans traitement 50% des patients auront des troubles de la marche après 8 ans, besoin d’une canne à 15 ans, besoin d’un fauteuil roulant après 30 ans.
Les facteurs de bon pronostic sont un âge de début jeune, une forme rémittente-récurrente, et un long délai entre les poussées.
Traitement
Il se divise en trois parties : le traitement des poussées de SEP, le traitement de fond et le traitement des complications de la maladie.
- TRAITEMENT DES POUSSÉES : hospitalisation et bolus de corticoïdes à fortes doses (1g/j en intraveineuse pendant 3 jours). Il permet d’accélérer la récupération de la poussée.
- TRAITEMENT DE FOND : leur but n’est pas la guérison de la maladie mais la diminution de la fréquence et de la progression des poussées, d’accélérer la récupération après les poussées et d’améliorer les symptômes résiduels. Il n’existe pas de traitement de fond qui ait démontré son efficacité dans les formes primitivement progressives.
- Immunomodulateurs : Interférons béta (injectable, 50% de syndrome pseudo-grippal les premières semaines, surveillance nécessaire de la NFS et des transaminases), acétate de glatiramère (injectable, pas de syndrome pseudo-grippal), dyméthylfumarate et tériflunomide (per os, effets indésirables digestifs, surveillance de la NFS et des transaminases)
- Immunosuppresseurs (réservés aux formes sévères) : Mitoxanthrone (anthracycline avec toxicité cardiaque et hématologique), Natalizumab (risque d’encéphalopathie à JC virus, aussi appelée LEMP), Fingolimod (toxicité cardiaque, oculaire, risque infectieux)
- TRAITEMENT DES COMPLICATIONS : Spasticité (baclofène, kinésithérapie, injection de toxine botulique), troubles urinaires (anticholinergiques si hyperactivité vésicale, alpha-bloquants si dysurie), troubles sexuels (prise en charge psychologique et médicamenteuse), douleurs (antalgiques classiques, voire antidépresseurs tricycliques ou antiépileptiques).
- NE PAS OUBLIER LA PRISE EN CHARGE GLOBALE DU PATIENT PAR UNE ÉQUIPE MULTIDISCIPLINAIRE ET LA PRISE EN CHARGE PSYCHOLOGIQUE.
Conclusion
La SEP est une maladie inflammatoire se caractérisant par une démyélinisation du SNC. Le diagnostic se fait grâce aux critères cliniques et/ou paracliniques de McDonald, avec une place majeure pour la clinique et l’IRM, et un rôle d’orientation de la ponction lombaire en cas de doute.
Le traitement repose sur trois piliers (symptomatique, fond, complications) avec une prise en charge globale et multidisciplinaire du patient.