Important
La méthodologie de la recherche expérimentale et clinique
On parle de "recherche biomédicale ou clinique" pour désigner les essais ou expérimentations pratiqués sur l’être humain vivant. La recherche biomédicale ou clinique a pour objectif de développer les connaissances biologiques ou médicales. Elle vise à décrire un phénomène de santé, à l’expliquer ou à mettre au point ou évaluer tel ou tel test diagnostique ou pronostique. La recherche biomédicale ou clinique doit obéir à une organisation rationnelle afin d’aboutir à un résultat. Elle obéit aussi à une législation et à une éthique.
Réglementation de la recherche clinique
La recherche clinique est encadrée par la loi du 9 août 2004, qui est venue mettre en conformité la réglementation française, qui datait de la loi Hurier-Sérusclat de 1988, avec les règles européennes. La loi de 2004 définit le cadre légal de la recherche biomédicale, y compris en soins courants, ainsi que les acteurs de cette recherche et leurs obligations.
La loi de 2004 a notamment remplacé l’ancien régime de déclaration par un régime d’autorisation : toute recherche biomédicale doit dès lors avoir un avis favorable d’un comité de protection des personnes (CPP) et une autorisation de l’ANSM ou du ministère de la santé.
Il existe trois types de recherche clinique :
- la recherche non interventionnelle,
- la recherche interventionnelle type biomédicale
- la recherche interventionnelle type soins courants.
La recherche non interventionnelle, ou RNI, n’entre pas dans le champ de la loi de santé publique. Elle concerne tous les actes et produits utilisés habituellement, sans procédure inhabituelle, ni protocole de recherche, ni modalités particulières de surveillance.Le deuxième type de recherche, la recherche interventionnelle type biomédicale (ou RBM), concerne les médicaments. Ce type de recherche vise à évaluer des stratégies ou des actes en dehors de leur utilisation habituelle.
Enfin, la recherche interventionnelle type soins courants (ou RSC) concerne les actes et produits utilisés de manière habituelle, mais avec des modalités de surveillance particulières prévues par un protocole de recherche. La recherche interventionnelle type soins courants exclut l’étude des médicaments, qui entre dans le cadre de la RBM.
Ainsi, pour la loi, une étude observationnelle de type cas-témoin peut être interventionnelle si elle ajoute un examen ou une modalité de surveillance particulière.
Différents avis et autorisations doivent être obtenues avant de débuter la recherche clinique.
Une recherche non interventionnelle nécessite l’avis du CPP et l’avis du CCTIRS, qui est le Comité consultatif sur le traitement de l’information en matière de recherche dans le domaine de la santé. La recherche non interventionnelle doit aussi obtenir l’autorisation de la CNIL, la Commission nationale de l’information et des libertés.
Une recherche biomédicale doit obtenir l’avis du CPP et l’avis de l’ANSM. Le patient doit donner son consentement éclairé écrit. Le patient donne son consentement après avoir reçu une information claire, complète et loyale sur les objectifs de la recherche, son déroulement, les bénéfices attendus et les contraintes et risques potentiels. Il peut se retirer de la recherche à tout moment.
Attention : les majeurs sous sauvegarde de justice ne peuvent pas participer à une recherche.
Pour les mineurs, le consentement est obtenu auprès des titulaires de l’autorité parentale.
Pour les majeurs sous curatelle ou sous tutelle, c’est la personne et son tuteur qui sont habilités à le donner, voire le juge des tutelles suivant les cas.
Pour un majeur hors d’état de s’exprimer ou décédé, le consentement doit être obtenu auprès de la personne de confiance, voire de la famille si le patient ne l’a pas donné lorsqu’il le pouvait.
Une recherche en soins courants enfin doit avoir l’avis du CPP et l’avis du CCTIRS ainsi que l’autorisation de la CNIL. La recherche doit être notifiée à l’ANSM si elle porte sur des dispositifs médicaux. Une non-opposition orale du patient est nécessaire.
Les principes de la recherche clinique
On distingue les études épidémiologiques descriptives et explicatives.
Les études descriptives décrivent la survenue et la distribution d’un événement sans en rechercher la cause (étude de prévalence ou de survie par exemple).
L’étude explicative identifie le lien entre l’exposition et l’événement de santé. Si le facteur d’exposition est maîtrisé, on fait une étude expérimentale (essai clinique contrôlé). Si le facteur n’est pas maîtrisé, on fait une étude analytique, qui peut être une étude rétrospective comparative (cas témoin) ou une étude prospective comparative (étude de cohorte exposé non-exposé).
Le niveau de preuve scientifique varie selon le type d’étude.
- Un niveau de preuve 1 correspond aux essais comparatifs randomisés de forte puissance, aux méta-analyses d’essais comparatifs randomisés, et à l’analyse de décision fondée sur des études bien menées.
- Un niveau de preuve 2 est donné aux essais comparatifs randomisés de faible puissance, aux études comparatives non randomisées bien menées et aux études de cohortes.
- Le niveau 3 correspond aux études cas-témoins
- Le niveau 4 correspond aux études épidémiologiques descriptives, aux études comparatives comportant des biais importants, aux études rétrospectives et aux séries de cas.
Les quatre phases de l’essai clinique doivent être parfaitement connues.
- En phase I, l’essai clinique se fait sur des volontaires sains en petit nombre (ou des volontaires malades en cancérologie notamment). La phase I vise à étudier la tolérance d’un médicament, sa toxicité et sa pharmacocinétique.
- En phase II, l’essai inclut des malades en petit nombre. Les essais cliniques de phase II ont pour objectif de définir l’efficacité (la dose efficace) et la pharmacodynamie d’un médicament.
- En phase III, l’essai est fait sur des malades en grand nombre. Les essais de phase III sont destinés à évaluer l’efficacité comparative, la toxicité et le rapport bénéfice/risque.
- La phase IV est une phase post-AMM, où l’essai clinique est fait sur la population générale. C’est une phase de pharmacovigilance et de recherche de nouvelles indications.
Les acteurs de la recherche clinique
Le promoteur d’une recherche est la personne, physique ou morale, qui prend l’initiative de cette recherche, la conduit et en assure le financement. Le promoteur est le responsable légal de la recherche. Il obtient les avis et autorisations nécessaires, sélectionne les investigateurs, assure l’indemnisation des conséquences dommageables. C’est lui qui informe le CCP et le CCTIRS des effets indésirables et de la fin de la recherche. Le promoteur peut être un établissement de santé, un organisme public ou un industriel.
Le ou les investigateurs dirige et surveille la réalisation de la recherche. C’est un docteur en médecine inscrit à l’Ordre. Il doit respecter les règles déontologiques et se porte garant de la protection des personnes et de la qualité des soins. En cas de recherche en équipe, il y a un investigateur principal et des collaborateurs. L’investigateur inclut les patients après les avoir informés et obtenu leur consentement. Il recueille les données, le cas échéant administre le traitement selon le protocole de la recherche et rapporte les événements indésirables.
Venons-en aux participants à la recherche. Toute personne volontaire peut participer. Elle doit être affiliée à un régime de sécurité sociale et donner son consentement. Elle peut se retirer à tout moment de l’investigation et a un droit d’accès et de modification aux données la concernant.
Dernier acteur de la recherche : le CPP, ou comité de protection des personnes. Il y a 40 CPP agréés en France, composés de 14 personnes nommées par le préfet. On y trouve à parts égales des professionnels de santé dont des méthodologistes et statisticiens et des professionnels civils de l’éthique et de la loi.
Le CPP vérifie que la recherche respecte la loi, et émet un avis sur sa validité scientifique et sur ses aspects éthiques.
Le protocole de la recherche clinique
Toute recherche clinique doit suivre une méthodologie précise : justification de l’étude, définition de ses objectifs, définition du matériel et de la méthode, définition des méthodes statistiques. Le succès d’une recherche dépend très largement de cette étape de mise au point.
La justification de l’essai nécessite l’analyse de la littérature existante. Un essai est justifié par la nature, la fréquence, les facteurs de risque ou les conséquences d’un problème de santé publique. Il peut aussi être justifié par le bénéfice attendu d’une intervention.
L’objectif découle de la justification. C’est la question à laquelle l’essai doit répondre. Il doit être précis, clair, pertinent cliniquement. Une étude peut avoir plusieurs objectifs mais dans ce cas, l’objectif principal et les objectifs secondaires doivent être clairement définis.
On parle d’ "hypothèse" pour une proposition spécifiée a priori et testée par l’essai clinique.
On distingue les essais de supériorité : le traitement X est-il plus efficace que le traitement Y. Et les essais d’équivalence ou de non-infériorité : le traitement X est-il aussi efficace que le traitement Y.
La méthode correspond au plan d’étude mis en œuvre. Le plan de l’essai définit comment seront répartis les patients et les traitements. Les deux méthodes principales sont les essais croisés et les essais en parallèle.
ESSAIS CROISéS
Dans les essais croisés, aussi appelés "en cross over", chaque sujet est pris comme son propre témoin :
Chaque personne reçoit deux traitements avec des périodes de wash out entre les deux pour qu’au début de la 2e période, le sujet soit dans le même état de santé qu’au début de la 1re.
C’est un type d’essai utilisé dans les maladies chroniques et stables, qui permet de diminuer la variabilité des réponses au traitement et d’avoir une meilleure puissance statistique avec moins de sujets nécessaires. Ils sont en revanche plus longs à mener et ne peuvent s’appliquer à des traitements à effet rebond ou à effet rémanent.
essais en parallèle
Dans les essais en parallèle, on compare si la survenue de l’événement, ou le critère de jugement, est différent ou semblable entre plusieurs groupes.
On parle de randomisation quand les participants sont assignés aux groupes d’un essai en fonction d’un processus aléatoire imprévisible. Pour les traitements, afin de garantir l’imprévisibilité, l’étude s’appuie sur un centre extérieur ou des enveloppes scellées individuelles. La randomisation permet d’assurer la comparabilité des groupes et de diminuer les biais de confusion. Les deux groupes seront identiques, sauf en ce qui concerne le traitement. On distingue la randomisation simple de la randomisation restreinte, qui permet de contrôler le tirage au sort pour avoir un équilibre en termes de caractéristique et de taille des groupes.
Idéalement, l’essai est mené en double aveugle. On parle d’essai en double aveugle quand ni le médecin ni le malade ne sait quel est le traitement reçu, par opposition au simple aveugle où seul le patient ignore le traitement, et par opposition à l’essai ouvert, ou médecin et patient connaissent le traitement. Le double aveugle permet de diminuer les biais de classement à plusieurs titres : pour le patient, la connaissance du traitement peut influer sa réponse (effet placebo) ou son observance ; pour le soignant, la connaissance du traitement peut modifier son attitude (biais de réalisation) ou son évaluation (biais d’évaluation).
Une étude descriptive définit aussi, dans sa méthode, la période d’étude. Une étude explicative définit ses comparateurs.
le matériel
On définit le groupe d’intérêt et le lieu de recrutement, ainsi que le groupe comparateur. Les chercheurs restreignent en général leur population à un échantillon en utilisant des critères d’éligibilité. Ils doivent être explicites. Pour être inclus, un patient doit respecter les critères d’inclusion (âge, forme clinique de la maladie par exemple), et les critères de non inclusion (comorbidités par exemple). Les critères d’exclusion sont ceux dont la survenue conduit à sortir un sujet de l’étude. En pratique, les critères de non inclusion et d’exclusion sont souvent confondus. Les patients doivent en outre respecter la clause d’ambivalence qui veut que tout patient puisse recevoir l’un ou l’autre traitement.
Les traitements à comparer sont définis pour les deux groupes. Dans le cas d’une comparaison à un traitement de référence, celui-ci est administré dans ses conditions d’efficacité optimale. Les traitements associés interdits ou autorisés doivent aussi être définis. Des procédures permettant de recueillir et d’évaluer des événements indésirables doivent être prévues.
le protocole
Il définit les critères de jugement, c’est-à-dire les variables d’évaluation permettant de répondre à l’objectif de l’essai. Le critère de jugement principal est la variable la plus importante. Il doit être précis, pertinent, unique et consensuel, et objectif si possible. Des critères de jugement secondaires peuvent être utiles pour évaluer les effets supplémentaires d’une intervention. Les méthodes de mesure des critères de jugement doivent être simples, reproductibles, valides et objectifs. Si l’on s’intéresse à l’évolution de critères de jugement, il faut aussi définit le nombre de mesures à faire et leur timing.les aspects statistiques
Le nombre de sujets nécessaires est le nombre de personnes à inclure pour garantir la puissance statistique de l’étude. Six éléments sont nécessaires pour calculer ce nombre :
- le risque alpha, c’est-à-dire la probabilité de conclure à une différence entre les traitements alors qu’il n’y en a pas
- la puissance de l’étude, calculée par 1 moins beta, où beta est la probabilité de ne pas conclure à une différence entre les traitements alors qu’il y en a une
- la différence minimale intéressante (delta).
- la variance du critère de jugement
- le caractère unilatéral ou bilatéral du test statistique
- le nombre attendu de perdus de vue.
En pratique, le nombre de sujets nécessaires est calculé à partir des données de la littérature et des hypothèses émises au départ.
L’analyse statistique est définie a priori. Les résultats seront exprimés en termes probabilistes.
Au point de vue éthique, le protocole doit préciser les conditions de réalisation et se conformer aux réglementations en vigueur.
En recherche clinique, les biais doivent être limités dès le départ. Ils peuvent être de différents types.
- Les biais de sélection, quand les enquêtés ne sont pas représentatifs de la population cible ou quand les groupes ne sont pas comparables, peuvent être limités par la randomisation.
- Les biais de mesure, qui surviennent quand on mesure les critères de jugement, peuvent être limités par le double aveugle et le choix de mesures standardisées et reproductibles.
- Les biais de réalisation, dus à des différences dans les soins ou le suivi, peuvent être limités par le double aveugle.
- Les biais de confusion, liés à des facteurs étrangers au test pouvant modifier les résultats, peuvent être limités par la randomisation.
- Les biais d’attribution, dus à des différences entre les groupes au niveau de la sortie de l’étude, peuvent être limités par une analyse en intention de traiter.
Une fois le protocole établi et les différents avis et autorisations légales obtenues, l’essai clinique peut débuter. En cas de survenue d’un événement indésirable, l’investigateur évalue la gravité de l’événement et les liens de causalité. Le promoteur déclare régulièrement au CPP et à l’autorité compétente toutes les suspicions d’effets, d’événements ou d’incidents survenus.
En cas de suspicion d’un événement indésirable grave, l’investigateur doit informer le promoteur qui en informe le CPP et l’autorité compétente. Un événement indésirable grave est un événement qui met en jeu le pronostic vital, entraîne une anomalie, une incapacité ou un handicap important ou durable, entraîne une hospitalisation ou une prolongation de l’hospitalisation voire le décès.
On parle de "recherche biomédicale ou clinique" pour désigner les essais ou expérimentations pratiqués sur l’être humain vivant. La recherche biomédicale ou clinique a pour objectif de développer les connaissances biologiques ou médicales. Elle vise à décrire un phénomène de santé, à l’expliquer ou à mettre au point ou évaluer tel ou tel test diagnostique ou pronostique. La recherche biomédicale ou clinique doit obéir à une organisation rationnelle afin d’aboutir à un résultat. Elle obéit aussi à une législation et à une éthique.
Réglementation de la recherche clinique
La recherche clinique est encadrée par la loi du 9 août 2004, qui est venue mettre en conformité la réglementation française, qui datait de la loi Hurier-Sérusclat de 1988, avec les règles européennes. La loi de 2004 définit le cadre légal de la recherche biomédicale, y compris en soins courants, ainsi que les acteurs de cette recherche et leurs obligations.
La loi de 2004 a notamment remplacé l’ancien régime de déclaration par un régime d’autorisation : toute recherche biomédicale doit dès lors avoir un avis favorable d’un comité de protection des personnes (CPP) et une autorisation de l’ANSM ou du ministère de la santé.
Il existe trois types de recherche clinique :
- la recherche non interventionnelle,
- la recherche interventionnelle type biomédicale
- la recherche interventionnelle type soins courants.
La recherche non interventionnelle, ou RNI, n’entre pas dans le champ de la loi de santé publique. Elle concerne tous les actes et produits utilisés habituellement, sans procédure inhabituelle, ni protocole de recherche, ni modalités particulières de surveillance.Le deuxième type de recherche, la recherche interventionnelle type biomédicale (ou RBM), concerne les médicaments. Ce type de recherche vise à évaluer des stratégies ou des actes en dehors de leur utilisation habituelle.
Enfin, la recherche interventionnelle type soins courants (ou RSC) concerne les actes et produits utilisés de manière habituelle, mais avec des modalités de surveillance particulières prévues par un protocole de recherche. La recherche interventionnelle type soins courants exclut l’étude des médicaments, qui entre dans le cadre de la RBM.
Ainsi, pour la loi, une étude observationnelle de type cas-témoin peut être interventionnelle si elle ajoute un examen ou une modalité de surveillance particulière.
Différents avis et autorisations doivent être obtenues avant de débuter la recherche clinique.
Une recherche non interventionnelle nécessite l’avis du CPP et l’avis du CCTIRS, qui est le Comité consultatif sur le traitement de l’information en matière de recherche dans le domaine de la santé. La recherche non interventionnelle doit aussi obtenir l’autorisation de la CNIL, la Commission nationale de l’information et des libertés.
Une recherche biomédicale doit obtenir l’avis du CPP et l’avis de l’ANSM. Le patient doit donner son consentement éclairé écrit. Le patient donne son consentement après avoir reçu une information claire, complète et loyale sur les objectifs de la recherche, son déroulement, les bénéfices attendus et les contraintes et risques potentiels. Il peut se retirer de la recherche à tout moment.
Attention : les majeurs sous sauvegarde de justice ne peuvent pas participer à une recherche.
Pour les mineurs, le consentement est obtenu auprès des titulaires de l’autorité parentale.
Pour les majeurs sous curatelle ou sous tutelle, c’est la personne et son tuteur qui sont habilités à le donner, voire le juge des tutelles suivant les cas.
Pour un majeur hors d’état de s’exprimer ou décédé, le consentement doit être obtenu auprès de la personne de confiance, voire de la famille si le patient ne l’a pas donné lorsqu’il le pouvait.
Une recherche en soins courants enfin doit avoir l’avis du CPP et l’avis du CCTIRS ainsi que l’autorisation de la CNIL. La recherche doit être notifiée à l’ANSM si elle porte sur des dispositifs médicaux. Une non-opposition orale du patient est nécessaire.
Les principes de la recherche clinique
On distingue les études épidémiologiques descriptives et explicatives.
Les études descriptives décrivent la survenue et la distribution d’un événement sans en rechercher la cause (étude de prévalence ou de survie par exemple).
L’étude explicative identifie le lien entre l’exposition et l’événement de santé. Si le facteur d’exposition est maîtrisé, on fait une étude expérimentale (essai clinique contrôlé). Si le facteur n’est pas maîtrisé, on fait une étude analytique, qui peut être une étude rétrospective comparative (cas témoin) ou une étude prospective comparative (étude de cohorte exposé non-exposé).
Le niveau de preuve scientifique varie selon le type d’étude.
- Un niveau de preuve 1 correspond aux essais comparatifs randomisés de forte puissance, aux méta-analyses d’essais comparatifs randomisés, et à l’analyse de décision fondée sur des études bien menées.
- Un niveau de preuve 2 est donné aux essais comparatifs randomisés de faible puissance, aux études comparatives non randomisées bien menées et aux études de cohortes.
- Le niveau 3 correspond aux études cas-témoins
- Le niveau 4 correspond aux études épidémiologiques descriptives, aux études comparatives comportant des biais importants, aux études rétrospectives et aux séries de cas.
Les quatre phases de l’essai clinique doivent être parfaitement connues.
- En phase I, l’essai clinique se fait sur des volontaires sains en petit nombre (ou des volontaires malades en cancérologie notamment). La phase I vise à étudier la tolérance d’un médicament, sa toxicité et sa pharmacocinétique.
- En phase II, l’essai inclut des malades en petit nombre. Les essais cliniques de phase II ont pour objectif de définir l’efficacité (la dose efficace) et la pharmacodynamie d’un médicament.
- En phase III, l’essai est fait sur des malades en grand nombre. Les essais de phase III sont destinés à évaluer l’efficacité comparative, la toxicité et le rapport bénéfice/risque.
- La phase IV est une phase post-AMM, où l’essai clinique est fait sur la population générale. C’est une phase de pharmacovigilance et de recherche de nouvelles indications.
Les acteurs de la recherche clinique
Le promoteur d’une recherche est la personne, physique ou morale, qui prend l’initiative de cette recherche, la conduit et en assure le financement. Le promoteur est le responsable légal de la recherche. Il obtient les avis et autorisations nécessaires, sélectionne les investigateurs, assure l’indemnisation des conséquences dommageables. C’est lui qui informe le CCP et le CCTIRS des effets indésirables et de la fin de la recherche. Le promoteur peut être un établissement de santé, un organisme public ou un industriel.
Le ou les investigateurs dirige et surveille la réalisation de la recherche. C’est un docteur en médecine inscrit à l’Ordre. Il doit respecter les règles déontologiques et se porte garant de la protection des personnes et de la qualité des soins. En cas de recherche en équipe, il y a un investigateur principal et des collaborateurs. L’investigateur inclut les patients après les avoir informés et obtenu leur consentement. Il recueille les données, le cas échéant administre le traitement selon le protocole de la recherche et rapporte les événements indésirables.
Venons-en aux participants à la recherche. Toute personne volontaire peut participer. Elle doit être affiliée à un régime de sécurité sociale et donner son consentement. Elle peut se retirer à tout moment de l’investigation et a un droit d’accès et de modification aux données la concernant.
Dernier acteur de la recherche : le CPP, ou comité de protection des personnes. Il y a 40 CPP agréés en France, composés de 14 personnes nommées par le préfet. On y trouve à parts égales des professionnels de santé dont des méthodologistes et statisticiens et des professionnels civils de l’éthique et de la loi.
Le CPP vérifie que la recherche respecte la loi, et émet un avis sur sa validité scientifique et sur ses aspects éthiques.
Le protocole de la recherche clinique
Toute recherche clinique doit suivre une méthodologie précise : justification de l’étude, définition de ses objectifs, définition du matériel et de la méthode, définition des méthodes statistiques. Le succès d’une recherche dépend très largement de cette étape de mise au point.
La justification de l’essai nécessite l’analyse de la littérature existante. Un essai est justifié par la nature, la fréquence, les facteurs de risque ou les conséquences d’un problème de santé publique. Il peut aussi être justifié par le bénéfice attendu d’une intervention.
L’objectif découle de la justification. C’est la question à laquelle l’essai doit répondre. Il doit être précis, clair, pertinent cliniquement. Une étude peut avoir plusieurs objectifs mais dans ce cas, l’objectif principal et les objectifs secondaires doivent être clairement définis.
On parle d’ "hypothèse" pour une proposition spécifiée a priori et testée par l’essai clinique.
On distingue les essais de supériorité : le traitement X est-il plus efficace que le traitement Y. Et les essais d’équivalence ou de non-infériorité : le traitement X est-il aussi efficace que le traitement Y.
La méthode correspond au plan d’étude mis en œuvre. Le plan de l’essai définit comment seront répartis les patients et les traitements. Les deux méthodes principales sont les essais croisés et les essais en parallèle.
ESSAIS CROISéS
Dans les essais croisés, aussi appelés "en cross over", chaque sujet est pris comme son propre témoin :
Chaque personne reçoit deux traitements avec des périodes de wash out entre les deux pour qu’au début de la 2e période, le sujet soit dans le même état de santé qu’au début de la 1re.
C’est un type d’essai utilisé dans les maladies chroniques et stables, qui permet de diminuer la variabilité des réponses au traitement et d’avoir une meilleure puissance statistique avec moins de sujets nécessaires. Ils sont en revanche plus longs à mener et ne peuvent s’appliquer à des traitements à effet rebond ou à effet rémanent.
essais en parallèle
Dans les essais en parallèle, on compare si la survenue de l’événement, ou le critère de jugement, est différent ou semblable entre plusieurs groupes.
On parle de randomisation quand les participants sont assignés aux groupes d’un essai en fonction d’un processus aléatoire imprévisible. Pour les traitements, afin de garantir l’imprévisibilité, l’étude s’appuie sur un centre extérieur ou des enveloppes scellées individuelles. La randomisation permet d’assurer la comparabilité des groupes et de diminuer les biais de confusion. Les deux groupes seront identiques, sauf en ce qui concerne le traitement. On distingue la randomisation simple de la randomisation restreinte, qui permet de contrôler le tirage au sort pour avoir un équilibre en termes de caractéristique et de taille des groupes.
Idéalement, l’essai est mené en double aveugle. On parle d’essai en double aveugle quand ni le médecin ni le malade ne sait quel est le traitement reçu, par opposition au simple aveugle où seul le patient ignore le traitement, et par opposition à l’essai ouvert, ou médecin et patient connaissent le traitement. Le double aveugle permet de diminuer les biais de classement à plusieurs titres : pour le patient, la connaissance du traitement peut influer sa réponse (effet placebo) ou son observance ; pour le soignant, la connaissance du traitement peut modifier son attitude (biais de réalisation) ou son évaluation (biais d’évaluation).
Une étude descriptive définit aussi, dans sa méthode, la période d’étude. Une étude explicative définit ses comparateurs.
le matériel
On définit le groupe d’intérêt et le lieu de recrutement, ainsi que le groupe comparateur. Les chercheurs restreignent en général leur population à un échantillon en utilisant des critères d’éligibilité. Ils doivent être explicites. Pour être inclus, un patient doit respecter les critères d’inclusion (âge, forme clinique de la maladie par exemple), et les critères de non inclusion (comorbidités par exemple). Les critères d’exclusion sont ceux dont la survenue conduit à sortir un sujet de l’étude. En pratique, les critères de non inclusion et d’exclusion sont souvent confondus. Les patients doivent en outre respecter la clause d’ambivalence qui veut que tout patient puisse recevoir l’un ou l’autre traitement.
Les traitements à comparer sont définis pour les deux groupes. Dans le cas d’une comparaison à un traitement de référence, celui-ci est administré dans ses conditions d’efficacité optimale. Les traitements associés interdits ou autorisés doivent aussi être définis. Des procédures permettant de recueillir et d’évaluer des événements indésirables doivent être prévues.
le protocole
Il définit les critères de jugement, c’est-à-dire les variables d’évaluation permettant de répondre à l’objectif de l’essai. Le critère de jugement principal est la variable la plus importante. Il doit être précis, pertinent, unique et consensuel, et objectif si possible. Des critères de jugement secondaires peuvent être utiles pour évaluer les effets supplémentaires d’une intervention. Les méthodes de mesure des critères de jugement doivent être simples, reproductibles, valides et objectifs. Si l’on s’intéresse à l’évolution de critères de jugement, il faut aussi définit le nombre de mesures à faire et leur timing.
les aspects statistiques
Le nombre de sujets nécessaires est le nombre de personnes à inclure pour garantir la puissance statistique de l’étude. Six éléments sont nécessaires pour calculer ce nombre :
- le risque alpha, c’est-à-dire la probabilité de conclure à une différence entre les traitements alors qu’il n’y en a pas
- la puissance de l’étude, calculée par 1 moins beta, où beta est la probabilité de ne pas conclure à une différence entre les traitements alors qu’il y en a une
- la différence minimale intéressante (delta).
- la variance du critère de jugement
- le caractère unilatéral ou bilatéral du test statistique
- le nombre attendu de perdus de vue.
En pratique, le nombre de sujets nécessaires est calculé à partir des données de la littérature et des hypothèses émises au départ.
L’analyse statistique est définie a priori. Les résultats seront exprimés en termes probabilistes.
Au point de vue éthique, le protocole doit préciser les conditions de réalisation et se conformer aux réglementations en vigueur.
En recherche clinique, les biais doivent être limités dès le départ. Ils peuvent être de différents types.
- Les biais de sélection, quand les enquêtés ne sont pas représentatifs de la population cible ou quand les groupes ne sont pas comparables, peuvent être limités par la randomisation.
- Les biais de mesure, qui surviennent quand on mesure les critères de jugement, peuvent être limités par le double aveugle et le choix de mesures standardisées et reproductibles.
- Les biais de réalisation, dus à des différences dans les soins ou le suivi, peuvent être limités par le double aveugle.
- Les biais de confusion, liés à des facteurs étrangers au test pouvant modifier les résultats, peuvent être limités par la randomisation.
- Les biais d’attribution, dus à des différences entre les groupes au niveau de la sortie de l’étude, peuvent être limités par une analyse en intention de traiter.
Une fois le protocole établi et les différents avis et autorisations légales obtenues, l’essai clinique peut débuter. En cas de survenue d’un événement indésirable, l’investigateur évalue la gravité de l’événement et les liens de causalité. Le promoteur déclare régulièrement au CPP et à l’autorité compétente toutes les suspicions d’effets, d’événements ou d’incidents survenus.
En cas de suspicion d’un événement indésirable grave, l’investigateur doit informer le promoteur qui en informe le CPP et l’autorité compétente. Un événement indésirable grave est un événement qui met en jeu le pronostic vital, entraîne une anomalie, une incapacité ou un handicap important ou durable, entraîne une hospitalisation ou une prolongation de l’hospitalisation voire le décès.