- Endoc-nutrition
- UE 8
- Item 241
Important
Hypothyroïdie
– Diagnostiquer une hypothyroïdie chez le nouveau-né, l'enfant et l'adulte
– Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient
PHYSIOPATHOLOGIE
Synthèse des hormones thyroïdiennes
- La TSH stimule biosynthèse hormonale via le récepteur transmembranaire du thyréocyte (appelé TSHR)
- Permet la synthèse d'une prohormone qui est la thyroglobuline
- Captation de l'iodure : il pénètre dans la cellule par le canal NIS (= symporteur de l'iodure)
- Organification (par oxydation) des ions iodure par la thyroperoxydase (TPO) en présence d'H2O2
- Recapture et protéolyse de la thyroglobuline stockée dans la colloïde
- Libération dans la circulation : 20% de T3, 80% de T4 + la thyroglobuline
- Fixation de l'iode sur la thyroglobuline au niveau de résidus tyrosyls (iodation) au pôle apical de la cellule thyroïdienne
- Couplage de ces résidus tyrosyls précurseurs par la thyroperoxydase (condensation en monoiodotyrosine et en dioiodotyrosine › forme la trioiodotyrosine (T3) et la tétraiodotyrosine (T4), toujours fixés à la thyroglobuline stockée dans la colloïde)
Signes d'hypo-métabolisme en cas de déficit en hormones thyroïdiennes
- Baisse de la consommation en O2 / baisse del thermogénèse = frilosité
- Repos des récepteurs-bêta adrénergiques : bradycardie / faiblesse musculaire / constipation
- Baisse des dépenses énergétiques = prise de poids modérée / frilosité
Myxœdème
- infiltration cutanéo-phanérienne et muqueuse par des mucoprotéines
- Physiopathologie mal comprise mais en partie liée à la baisse du métabolisme protéique
épidémiologie
- Hypothyroïdie primaire : augmentation de la TSH (frustre ou patente selon le dosage de T4L)
- Hypothyoïdie secondaire (centrale) : baisse de T4L et TSH basse ou normale (non adaptée) ou légèrement augmentée dans le cas d'une TSH immuno-réactive (dosable) mais biologiquement inactive › évoque une atteinte hypothalamique
- Forme la + fréquente : touche 7,5% des femmes et 3% des hommes, 10% des sujets âgés
- Prévalence élevée après 65 ans
- Facteurs de risque : syndrome de Turner, trisomie 21, diabète de type 1.. / diagnostic le + souvent fait au stade d'hypothyroïdie frustre
- Très rare : touche 0,005% de la population / concerne moins de 5% des hypothyroïdies
ORIENTATION DIAGNOSTIQUE
EXAMEN CLINIQUE
Diagnostic positif = syndrome d’insuffisance thyroïdienne
Signes d’HYPOMETABOLISME
- signes généraux
- signes cardio-vasculaires
- signes digestifs
- signes neuropsychologiques
- signes gynéco/sexuels
- Hypothermie / frilosité / perte de la sudation
- Prise de poids (voire obésité) malgré anorexie
- Bradycardie ± assourdissement des bruits du cœur
- Hypotension artérielle seulement si forme évoluée
- Constipation / disparition d'une diarrhée préexistante
- Ralentissement physique : lenteur / asthénie / activités limitées
- Ralentissement psychique : syndrome dépressif / troubles mnésiques
- Troubles du comportement / syndrome démentiel (chez les patients âgés)
- Diminution de la libido
- Aménorrhée secondaire (par hyperprolactinémie), infertilité
Signes d’INFILTRATION (4)
- Myxoedème
Remarque : myxoedème absent si insuffisance thyréotrope centrale
- forme de « faux œdème » : dur / comblement des creux sus-claviculaires-axillaires
- Visage : pâle / rond / bouffi = « faciès lunaire » / paupières gonflées
- Membres : mains et pieds boudinés / syndrome du canal carpien
- Infiltration muqueuse
- Troubles cutanéo-phanériens
- Langue = macroglossie, ronflements
- Cordes vocales = voix rauque
- Trompe d’eustache = hypoacousie
- Muqueuse nasale = ronflements
- Peau sèche, squameuse, froide / teint cireux (carotinodermie par baisse de transformation du carotène en vitamine A) / cheveux secs, cassants
- Erythrocyanose des lèvres et des pommettes
- Alopécie et dépilation diffuse (« queue de sourcil »)
- Infiltration musculaire = syndrome myogène ± neurologique
- Déficit moteur proximal (« marche dandinante »)
- Myalgies / crampes ± pseudo-hypertrophie musculaire
- Rarement : tendinite, arthralgie, neuropathie périphérique, syndrome cérébelleux
Particularités chez l'enfant : troubles du développement staturo-pubertaire
- Retard de croissance staturo-pondéral : avec âge osseux inférieur à l'âge statural lui-même inférieur à l'âge civil
- Retard mental / retard pubertaire
évaluation du retentissement / complications
- Cardio-vasculaires : insuffisance coronaire (faire un électrocardiogramme ++) / péricardite
- Neuropsychologiques : dépression / syndrome myogène / canal carpien
- Endocriniennes : hyperprolactinémie secondaire (dysménorrhée / galactorrhée)
- Hématologiques : syndrome anémique
Orientation étiologique
Interrogatoire
- Rechercher antécédents auto-immuns (polyendocrinopathie auto-immune : association avec une insuffisance surrénale ++)
- Rechercher une cause iatrogène : prise médicamenteuse / thyroïdectomie
- Anamnèse : rechercher un épisode récent de thyrotoxicose
Examen physique
- Palpation cervicale : rechercher et caractériser un goitre
- Volume augmenté (évoque une thyroïdite Hashimoto) ou à peine palpable (évoque une thyroïdite atrophique)
- Souvent goitre hétérogène, pseudo-nodulaire (auto-immun, Hashimoto)
Diagnostic différentiel avec une insuffisance thyréotrope
- Rechercher un syndrome sécrétant (hyperprolactinémie ++)
- Rechercher d’autres déficits anté-hypophysaires
- Rechercher un syndrome tumoral : hypertension intracrânienne/ hémianopsie...
EXAMENS COMPLéMENTAIRES
Pour diagnostic POSITIF
- En 1ère intention : dosage de la TSH seule
- En 2nde intention : dosage de T4L
- TSH augmentée (TSH > 5μg/L) = hypothyroïdie périphérique
- si normale (rarement basse) = possible insuffisance thyréotrope centrale
- Aucun intérêt de doser la T3L ou la thyroglobuline ou de test à la TRH
- T4L diminuée = c'est une hypothyroïdie patente
- T4L normale = c'est une hypothyroïdie frustre (= infra-clinique)
Pour évaluation du RETENTISSEMENT
- NFS : anémie arégénérative normo ± macrocytaire
- Ionogramme sanguin : hyponatrémie de dilution (hyperhydratation intracellulaire isolée par opsiruie)
- Bilan lipidique : dyslipidémie = hypercholestérolémie ± hypertriglycéridémie (par baisse de dégradation des lipoprtéines)
- Rechercher une maladie de Biermer en cas d'anémie macrocytaire (notamment si macrocytose persistant après le traitement de l'hypothyroïdie)
Ne faire de bilan lipidique au début de la prise en charge / à réaliser une fois le patient traité pour évaluation (sauf en cas d'hypothyroïdie frustre : un bilan lipidique altéré pourrait justifier d'un éventuel traitement)
- Enzymes musculaires : syndrome myogène : augmentation des CPK ± augmentation de LDH-ASAT (+ aldolase augmentée)
- ± troubles de la coagulation associés (défaut d'adhésivité des plaquettes, anomalies de l'hémostase)
- Prolactine : hyper-prolactinémie secondaire (car la TRH stimule la prolactine) (rarement vue en pratique)
- ± recherche d'insuffisance cardiaque (échographie cardiaque…), syndrome d'apnées obstructives du sommeil (polysomnographie)
Pour diagnostic éTIOLOGIQUE
- Bilan immunologique : anticorps anti-TPO / anticorps TRAB / anticorps anti-thyroglobuline
- Imagerie : échographie cervicale (scintigraphie inutile au contraire de l'hyperthyroïdie où elle est utile)
Pour bilan PRE-THéRAPEUTIQUE
ECG : Rechercher une insuffisance coronaire avant de débuter toute hormonothérapie substitutive
Remarques
« hypothyroïdie frustre »
Fréquent / patient asymptomatique ou pauci-symptomatique / découverte fortuite
avec TSH > 4 µg/L et T4L = normale (9-25 pmol/L)
devant une hypothyroïdie et hyperprolactinémie : 2 possibilités
- Insuffisance thyréotrope : insuffisance antéhypophysaire sur adénome hypophysaire à prolactine ou hyperprolactinémie de déconnexion associée
- Hypothyroïdie périphérique : hyperprolactinémie par rétrocontrôle positif de la T4 sur la TRH
Hypothyroïdie et goitre : évoquer
- Thyroïdite lymphocytaire (Hashimoto, post-partum) / de Reidel / de De Quervain
- Iatrogène : traitement médicamenteux, antithyroïdiens de synthèse
- Atteinte congénitale : anomalie de l'hormonosynthèse
- Carence en iode / infiltration métastatique
DIAGNOSTIC éTIOLOGIQUE
Thyroïdites auto-immunes = chroniques lymphocytaires (55% des cas)
Thyroïdite = 3 phases : thyrotoxicose › hypothyroïdie ± récupération ensuite
Thyroïdite de Hashimoto
Généralités
- Maladie auto-immune : inhibition de la thyroperxodyase (TPO) par auto-anticorps anti-TPO
1ère cause d’hypothyroïdie en France
- Risque évolutif de lymphome thyroïdien (moins de 1% des cas)Physiopathologie
- Réaction auto-immune sur terrain génétique + facteurs environnementaux
- Infiltration lymphocytaire du corps de la thyroïde › forme un goitre
- Thyroïdite (± thyrotoxicose initiale) › évolue vers une atrophie donc une hypothyroïdie séquellaire
Clinique
- Interrogatoire
- Examen physique
- Femme (9 femmes touchées pour 1 homme) / âge moyen = 40-60ans / possible aussi chez l'enfant !
- Recherche antécédents personnels et familiaux de maladie auto-immune (notamment maladie de Basedow)
- Toujours rechercher une surcharge iodée ou une cause iatrogène
- GOITRE = irrégulier/ hétérogène/ diffus ± volumineux/ ferme/ indolore
- Rechercher d’autres pathologies auto-immunes (insuffisance surrénale ++)
- De progression lente / à un stade tardif : la thyroïde est non palpable
- En cas de croissance rapide du goitre, avec une zone pseudo-nodulaire: évoquer un lymphome thyroïdien ++
- Paraclinique
- Bilan immunologique : anticorps anti-TPO positifs dans 95% des cas / anticorps anti-Tg (thyroglobuline) si anticorps anti-TPO négatifs
- Echographie thyroïdienne : systématique
- Scintigraphie : INUTILE (montrerait une fixation irrégulière « en damier »)
- Goitre modéré / hypo-échogène / hétérogène (avec des zones hyperplasiques pseudo-nodulaires hyperéchogènes) / le volume thyroïdien total est ± augmenté
- Vascularisation hétérogène avec accentuation de la lobulation (incisures créant une rétraction de parenchyme prédominant en face postérieure des lobes)
- Avec images de pseudo-nodules hyperfixants trompeurs
- Intérêt en cas de TSH basse : rarement on retrouve une phase de thyrotoxicose initiale › montre une fixation faible et hétérogène
- TerrainRechercher d'autres atteintes auto-immunes : diabète de type 1 / vitiligo / insuffisance surrénale / insuffisance ovarienne / polyarthrite rhumatoïde / anémie de Biermer / maladie cœliaque… › évoquer une polyendocrinopathie auto-immune ++
Thyroïdite atrophique
Généralités
(= ex-myxœdème idiopathique) / 2 types d’inhibition auto-immune : Par anticorps anti-TPO (= thyroïdite de Hashimoto) ou anticorps anti-TSH-R bloquants (dits anticorps TRAB)
Clinique
- Interrogatoire
- Examen physique pas de goitre › thyroïde impalpable
- Paraclinique
- Souvent l'évolution d'une maladie de Hashimoto
- Femme en post-ménopause +++ (âge de plus de 50ans)
- Recherche de polyendocrinopathie auto-immune (antécédents personnels / familiaux) + recherche d'une surcharge iodée iatrogène
- Bilan immunologique : anticorps anti-TPO (présents à taux faibles) ± TRAB en 2nde intention
- Echographie thyroïdienne : hypoéchogène (pauvreté en colloïde, infiltrats) et hétérogène mais avec une atrophie (taille normale ou diminuée selon le stade)
- Scintigraphie thyroïdienne : INUTILE
Thyroïdite du post-partum
Fréquente = touche 5% des grossesses / récidivant
- Phase d’hyperthyroïdie vers les 2 mois après l'accouchement (passant ± inaperçue)
- puis hypothyroïdie typique vers 3-6 mois
- Goitre de petit volume / homogène / sans thrill / ferme
- Récupération dans 70% des cas / hypothyroïdie séquellaire sinon
- Souvent non diagnostiquée car les symptômes sont attribués à la grossesse
Thyroïdites non auto-immunes
Thyroïdite subaiguë de De Quervain (= granulomateuse)
- Examen physique : thyroïde douloureuse, inflammatoire, granulomateuse
- Histoire naturelle : destruction des follicules thyroïdiens (phase de thyrotoxicose initiale avec libération des hormones thyroïdiennes stockées dans la colloïde) puis survenue secondaire (environ 1 à 3 mois après) d'une hypothyroïdie (transitoire le + souvent)
- Biologie : VS ou CRP augmentée à la phase aiguë
Thyroïdite sans anticorps
Tableau proche d'une thyroïdite auto-immune mais les anticorps sont absents Ø
Thyroïdites iatrogènes
- A rechercher systématiquement à l’interrogatoire
- Physiopathologie et clinique proche de la thyroïdite de De Quervain
- Souvent "silencieuses" mas parfois douloureuses
- Causes :
- Médicamenteuse : typiquement avec un goitre
- Post-chirurgie : post-thyroïdectomie totale ± subtotale
- Post-iode 131 radioactif : fréquent = 50% d’hypothyroïdies séquellaires
- Radiothérapie cervicale externe : pour Hodgkin ou cancer ORL par exemple
- Amiodarone : par surcharge iodée = par effet Wolff-Chaikoff
- Interféron = hypothyroïdie auto-immune retrouvée dans 30% des cas
- Lithium (possiblement à l'origine d'un goitre euthyroïdien)
- Anti-tyrosine kinase (thérapie anticancéreuse)
- Produits de contraste iodés
- Antithyroïdiens de synthèse (hypothyroïdie régressive à l'arrêt)
- Pour l'iode 131 et la radiothérapie cervicale : l'hypothyroïdie survient parfois plusieurs années après : surveillance par dosage de TSH 1x/an
Autres causes
- Thyroïdite infectieuse (parasitaire, bactérienne)
- Thyroïdite de Reidel (thyroïdite fibreuse compliquant parfois un Hashmioto)
Carence en iode
Généralités
1ère cause d’hypothyroïdie dans le monde = « zones d’endémie goitreuse »
- Devenue très rare en Europe (car iode dans le sel de cuisine)
- Zones à risque : montagnes (Népal, Vosges, « crétin des Alpes ») et Afrique centrale
Clinique
- Syndrome d’hypothyroïdie classique : hypométabolisme + infiltration
- Goitre = ancien et homogène ± remaniements nodulaires
Paraclinique
Bilan thyroïdien = TSH augmentée / baisse de T4 plus prononcée que la baisse de T3 / iodurie des 24h diminuée
Hypothyroïdie congénitale
Maladie endocrinienne la plus fréquente de l’enfant (touche 1/3500 naissances)
étiologies
- Dysgénésie thyroïdienne (80% des cas) = ectopie thyroïdienne / athyréose
- Avec "glande en place" : hypoplasie de la thyroïde, goitre par troubles de l'hormonogenèse
- Rarement : hypothyroïdie transitoire sur surcharge iodée maternelle (accouchement avec Bétadine..) / insuffisance antéhypophysaire
Diagnostic
- Tableau clinique progressif dès les premiers jours de vie :
- Dépistage obligatoire à J3 = test de Guthrie avec mesure de la TSH (donc ne dépiste que les hypothyroïdies primaires et pas les exceptionnelles formes centrales)
- En cas d'hypothyroïdie sur surcharge iodée : l'échographie retrouve thyroïde en place ou une discrète augmentation de volume / scintigraphie à l'iode 123 : goitre modéré, hyperfixant en précoce, avec un test au perchlorate positif
- Initialement ictère prolongé / constipation / hypotonie / pleurs rauques / difficultés à la succion / fontannelles larges (en postérieur ++) / hypothermie
- En l'absence de traitement : retard psychomoteur profond (irréversible) / ostéodystrophie avec retard de croissance / retard statural (avec âge osseux inférieur à l'âge statural lui-même inférieur à l'âge chronologique)
- Causes génétiques
- Dysgénésie : la scintigraphie à l'iode 123 montre une absence de tissu de la bouche au médiastin en cas d'agénésie / elle retrouve un tissu de faible contraste en cas d'hypoplasie thyroïdienne / on observe une fixation localisée hors de la loge thyroïdienne en cas d'ectopie / en échographie : examen moins sensible, peut retrouver du tissu dystrophique (nodules, kystes) en cas d'hypoplasie
- Troubles de l'hormonogenèse : la scintigraphie retrouve un goitre hyperfixant au temps précoce, avec diminution de la fixation en iode 123 après administration de perchlorate / en échographie : on observe un goitre eutopique ± volumineux
Syndrome de résistance généralisée aux hormones thyroïdiennes
Très rare / sans goitre / TSH, T4L & T3L élevées
Causes centrales d'hypothyroïdie
Toujours recherche d'autres déficits / faire une IRM hypophysaire
- Clinique : pas de goitre (pas de stimulation du tissu thyroïdien par la TSH qui est effondrée) / pas d'infiltration myxœdémateuse
- Paraclinique : diagnostic étiologique par IRM hypothalamo-hypophysaire
- étiologies
- Tumeur de la région sellaire (adénome, craniopharyngiome)
- Selle turcique vide / arachnoïdocèle / apoplexie hypophysaire
- Hypophysite lymphocytaire (en post-partum) / syndrome de Sheehan
- Séquelles de chirurgie / antécédents de radiothérapie, méningite, traumatisme crânien
- Pathologie infiltrative : hémochromatose… / génétique : déficit de l'ontogenèse pituitaire
Maladies infiltratives (rares)
Tuberculose / sarcoïdose / amylose / hémochromatose…
COMPLICATIONS
Complications de l’insuffisance thyroïdienne
Formes neuromusculaires (cf item 108)
- Syndrome d'apnées obstructives du sommeil : ronflements / somnolence diurne / céphalées matinales / syndrome métabolique
- Etat dépressif / syndrome confusionnel ou démence (chez le sujet âgé ++)
- Myopathie proximale (CPK élevées)
Complications cardio-vasculaires
Insuffisance coronaire
- Fréquente car même terrain : âge / dyslipidémie / hypertension artérielle
- Souvent asymptomatique car baisse du débit cardiaque par hypométabolisme
- A rechercher = ECG systématique devant toute hypothyroïdie
- La coronaropathie est alors « démasquée » par l'hormothérapie substitutive
Péricardite myxœdémateuse
- Rare / en général bien tolérée : asymptomatique
- Rarement compliquée tamponnade s'il s'agit d'une forme évoluée
- Diagnostic par échographie transthoracique / ± épanchement pleural ou péritonéal associé
Atteinte fonctionnelle
- Modification de l'activité et du métabolisme du muscle cardiaque : baisse de fréquence cardiaque, baisse de la force contractile (baisse de l'action chronotrope et inotrope positive)
- Insuffisance cardiaque et troubles du rythme ventriculaires rarement
Coma myxœdémateux
Exceptionnel désormais mais grave : 50% de mortalité…
Terrain
- Typiquement chez une femme âgée non traitée +++ / avec une hypothyroïdie profonde / volontiers en hiver
- Rechercher un facteur déclenchant = chute / chirurgie / infection / sédatif
Examen clinique
- Signes généraux : hypothermie sévère / hyponatrémie sévère / bradypnée
- Signes cardiologiques : bradycardie + hypotension artérielle (voire choc)
- Signes neurologiques : syndrome confusionnel / convulsions / coma calme, hypotonique / réflexes ostéo-tendineux lents, décomposés / sans signe de localisation
Examens complémentaires
Aucun ne doit faire retarder le traitement : ECG / TSH – T4L en urgence
- Anémie / hyponatrémie marquée (de dilution) / augmentation des CPK (rhabdomyolyse) / hypoglycémie
- Electroencéphalogramme / ponction lombaire : retrouve une hyperprotéinorachie inconstante
- + bilan infectieux : hémocultures + examen cytobactériologique des urines
Diagnostic différentiel
Devant hypothermie + hypotension : évoquer un choc septique
- Myxœdème possiblement accompagné d'une insuffisance surrénale aiguë
- Syndrome de basse T3 : en cas de pathologie grave et évolutive / baisse de T3 ± suivie de la baisse de T4-TSH selon la gravité
Pathologies auto-immunes associées : recherche de polyendocrinopathie
Rechercher une polyendocrinopathie devant toute hypothyroïdie (Hashimoto et atrophique notamment)
Polyendocrinopathie auto-immune de type 1 (rare) : de transmission autosomique récessive | Polyendocrinopathie auto-immune de type 2 (fréquente) : de transmission autosomique dominante |
---|---|
Hypoparathyroïdie (80%) Insuffisance surrénale (70%) Candidose diffuse (70%) Alopécie (30%) Autres: Biermer, diabète, dysthyroïdie | Insuffisance surrénale (100%) Dysthyroïdie (70%) Diabète de type 1 (50%) Vitiligo / Biermer / ovarite auto-immune Connectivites (lupus, polyaryhrite rhumatoïde, etc.) |
Syndrome de Schmidt
- Hypothyroïdie + insuffisance surrénale chronique auto-immune (dans le cadre d'une polyendocrinopathie auto-immune de type 2)
- Recherche de signes d'insuffisance surrénale chronique devant toute hypothyroïdie : mélanodermie notamment
TRAITEMENT
Prise en charge
Ambulatoire hors complication / hospitalisation pour le sujet âgé ou coronarien
HORMONOTHERAPIE SUBSTITUTIVE ( opothérapie )
Indications
Hypothyroïdie patente de l’adulte
Indication formelle à une hormonothérapie substitutive
Hypothyroïdie infraclinique (« hypothyroïdie frustre »
- TSH > 10 mUI/L et/ou anticorps anti-TPO positif › hormonothérapie indiquée
- A discuter si TSH < 10 mais présence d'anticorps, de signes cliniques, d'une hypercholestérolémie
- TSH entre 4-10 et anticorps anti-TPO négatif / sans risque cardiovasculaire › TSH à 6 mois puis 1 fois par an
Si désir de grossesse › traiter dès que TSH ≥ 3mUI/l
Chez l’enfant
Urgence absolue / Lévothyrox® dès que possible
Modalités : hormones thyroïdiennes de synthèse
- L-Thyroxine (L-T4 / Lévothyrox®) orale (+ forme buvable : L-Thyroxine® / forme intraveineuse en cas de coma myxoedémateux ou impossibilité à avaler)
- Posologie = 1-1,5μg/kg/jour en général / en 1 prise le matin / à jeun / A VIE
- Le traitement par T3 existe (seul : Cynomel® ou associé à de la T4 : Euthyral®) mais il n'existe que de rares indications
Objectif du traitement :
Évaluation sur la TSH seule ++
- Norme : < 4 mUI/L / mais obtenue entre 0,5 et 2,5 mUI/L chez la majorité des sujets
- En situation standard : objectif de TSH entre 0,5 et 2,5 mUI/L
- En cas de coronaropathie non contrôlée, chez des sujets très âgés : ne pas avoir une TSH normale, la stabiliser autour de 10 mUI/L selon la tolérance / si coronaropathie, on traite d'abord les lésions puis on normalise la TSH
- Chez une femme enceinte : objectif de TSH inférieure à 2,5 mUI/L
Objectifs en cas d'insuffisance thyréotrope
- TSH effondrée dans tous les cas › Surveillance sur la T4L qui doit être dans le milieu ou le 1/ 3 supérieur de la normale + T3L dans la normale
Introduction et adaptation posologique
- Posologie initiale de 1-1,5 µg / kg / jour (soit 50-150 µg/j) (sauf sujet coronarien ou de plus de 70 ans)
- Sujet coronarien, à risque ou patient très âgé : posologie initiale de 12,5 à 25 µg/jour / augmentation progressive par paliers toutes les 2-3 semaines jusqu'à obtention de dose théoriquement efficace
Risque d'autant + élevé de démasquer une coronaropathie qu'hypothyroïdie profonde et ancienne
- Surveillance adaptée au risque :
- En cas de d'hypothyroïdie frustre : besoins inférieurs entre 25 et 75 µg/j
- Education du patient âgé ou coronarien stable : consulter si douleurs thoraciques / ECG 1 fois par semaine chez le coronarien grave si possible
- Patient coronarien récent ou non contrôlé : hospitalisation pour surveillance clinique + ECG 1 fois par jour durant l'instauration du traitement
- Parfois bêtabloquants utilisés en association avec la lévothyroxine
Prévention du surdosage chronique car risques osseux et cardiovasculaire ++
Absorption de la L-thyroxine
Influencée par l'horaire de prise / la galénique / les interactions ± éventuelle malabsorption
Horaire de prise fixe / la galénique ne doit pas être modifiée une fois l'équilibre de TSH atteint / éviter les substances diminuant l'absorption : sulfate de fer, carbonate de calcium, hydroxyde d'aluminium, cholestyramine…
Métabolisme :
influencé par les interactions / la grossesse / l'âge
- Grossesse (besoins augmentés de 30-50%) / âge (besoins diminuent)
- Substances augmentant la clairance de la T4 : phénobarbital / carbamazépine / rifampicine / phénytoïne / sertraline / chloroquine… pilule estro-progestative (diminue la fraction libre de T4 par l'augmentation de la liaison à la TBG)
Hypothyroïdie néonatale
- L-thyroxine à ≥ 10 µg/kg quotidiennement
- Traitement précoce (en 12-15 jours après la naissance) : évite retard mental, troubles de croissance…
Toujours traiter insuffisance surrénalienne avant substitution T4 (risque d'insuffisance surrénale aiguë)
éducation du patient
- éducation thérapeutique : le traitement est A VIE / ne jamais arrêter
- Interactions médicamenteuses (pansements gastriques / inducteurs enzymatiques...)
- Signes d’alarme et conduite à tenir en cas d’urgence / auto-surveillance
- Contraception efficace / pas de procréation tant que pas d'équilibre de la thyroïde
- Causes de déséquilibre de l'hypothyroïdie : défaut d'observance / posologie inadaptée / changement de galénique / prise de substance associée / malabsorption / grossesse
- Port d’une carte d’hypothyroïdien (avec posologie de l'hormonothérapie)
- Expliquer les signes annonçant une complication ou un mauvais équilibre, la conduite à tenir
- Avertir sur l'automédication / thé, café à prendre à distance du médicament
Traitement des complications
Traitement des complications associées
- Dyslipidémie : pas de traitement si correction après hormonothérapie
- Anémie : supplémentation martiale + folates orales jusqu’à correction
- Si sujet âgé coronarien : introduction ou majoration d’un traitement (bêtabloquants)
Coma myxœdémateux
Mise en condition
- Urgence thérapeutique / pronostic vital engagé
- Hospitalisation en réanimation / pose de voie veineuse périphérique / monitoring cardio-tensionnel / libération des voies aériennes supérieures
Traitement curatif en urgence
- Hormonothérapie parentérale : L-Thyroxine en IVSE puis relais oral
- Prévention d’une décompensation en insuffisance surrénale aiguë › discuter l'hydrocortisone en IVSE
Traitement symptomatique
- Expansion volumique avec objectif de pression artérielle moyenne ≥ 65 mmHg
- Rééquilibration hydro-électrolyique (hyponatrémie)
- Réchauffement progressif externe
- Oxygénothérapie pour saturation en oxygène supérieure à 95%
Traitement étiologique
- Recherche et traitement du facteur déclenchant
- Exemples : traitement d’une infection / arrêt de médicament / rechercher un infarctus du myocarde, une insuffisance cardiaque…c
Mesures associées
- Prise en charge à 100% au titre des affections longue durée
- Port d’une carte d’hypothyroïdien
- Proposer adhésion à une association de malades
Surveillance
Clinique
- Fréquence des consultations : médecin traitant 1 fois par an A VIE
- Régression du syndrome d’hypothyroïdie / complications du traitement
- Comorbidités auto-immunes (au moins cliniquement)
Paraclinique
TSH à +6-8 semaines après le début du traitement (ou 6-8 semaines après posologie efficace si traitement progressif)
Une fois l'objectif de TSH atteint : contrôle TSH à 6 mois puis 1 fois par an
Dysthyroïdie & grossesse
Peut survenir même chez une femme euthyroïdienne
Doser systématiquement la TSH chez la femme enceinte si facteurs de risque de dysthyroïdie
- Antécédents personnels ou familiaux de dysthyroïdie, auto-immunité, de traitement à risque thyroïdien
- Signes morphologiques : goitre, nodule thyroïdien / signes fonctionnels
- Antécédents obstétricaux : infertilité, fausse couche, menace d'accouchement prématuré
Prévention d’une hypothyroïdie au cours de la grossesse
- Les besoins en iode augmentent au cours de la grossesse / allaitement (à 200µg/jour) car utilisation des hormones thyroïdiennes de la mère par le fœtus
- Carence iodée + stimulation de la thyroïde par hCG & TSH › entraîne une hyperplasie de la thyroïde (goitre) / parfois hypothyroïdie maternelle entraînant une hypothyroïdie fœtale
- Conduite à tenir : dépister des carences en iode (enquête alimentaire) / dépister un goitre / supplémentation iodée et/ou mesures alimentaires
Hypothyroïdie lors de la grossesse
- Si hypothyroïdie connue avant la grossesse
- Si hypothyroïdie non connue : précocité du diagnostic et de la prise en charge
- Préparer et programmer la grossesse / prise en charge multidisciplinaire
- Grossesse nécessite une normalisation stricte de la TSH (< 2,5 mUI/l)
- Augmentation posologique de 25-50% du traitement substitutif dès que la grossesse est connue
- Objectif : obtenir une T4L normale et TSH dans la 1/2 inférieure de la normale
- Surveillance de la TSH toutes les 4-6 semaines / objectif de TSH < 2,5
- Surveillance régulière / allaitement possible
- Diagnostic sur signes cliniques ou biologiques
- Bilan étiologique / mise en place d'une hormonothérapie substitutive à dose supposée efficace d'emblée / objectif TSH < 2,5 le + rapidement possible
Dépistage de l'hypothyroïdie frustre
Population générale
Jamais de manière systématique : Dépistage ciblé
- Femme de plus de 60 ans avec antécédents thyroïdiens
- Présence d'anticorps antithyroïdiens
- Antécédents de chirurgie ou d'irradiation thyroïdienne ou cervicale
- Traitements à risque thyroïdien (amiodarone, lithium, interféron, autres cytokines)
Chez la femme enceinte
- Signes cliniques évocateurs (goitre…)
- Contexte auto-immun (diabète de type 1…)
- Contexte thyroïdien ou familial : antécédents personnels ou familiaux de dysthyroïdie, intervention chirurgicale sur la thyroïde, notion d'élévation des anticorps antithyroïdiens
- Probablement associée à une augmentation du risque d'hématome rétro-placentaire, de prématurité, de détresse respiratoire néonatale / mais pas d'altération des fonctions cognitives ou développement psychomoteur de l'enfant (différent de l'hypothyroïdie patente)
Fœtus
Pas de thyroïde fœtale fonctionnelle au 1e trimestre : le fœtus dépend de la mère pour développement du système nerveux central › ± entraîne des troubles du développement neuro-intellectuel (discuté) / hypotrophie
Biologie chez la femme enceinte non malade
- A T1 : TSH diminuée et T4L normale ou légère augmentation physiologique
- Puis : TSH redevient normale et T4L basse ou normale (toujours interpréter les 2)
– Diagnostiquer une hypothyroïdie chez le nouveau-né, l'enfant et l'adulte
– Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi du patient
PHYSIOPATHOLOGIE
Synthèse des hormones thyroïdiennes
- La TSH stimule biosynthèse hormonale via le récepteur transmembranaire du thyréocyte (appelé TSHR)
- Permet la synthèse d'une prohormone qui est la thyroglobuline
- Captation de l'iodure : il pénètre dans la cellule par le canal NIS (= symporteur de l'iodure)
- Organification (par oxydation) des ions iodure par la thyroperoxydase (TPO) en présence d'H2O2
- Recapture et protéolyse de la thyroglobuline stockée dans la colloïde
- Libération dans la circulation : 20% de T3, 80% de T4 + la thyroglobuline
- Fixation de l'iode sur la thyroglobuline au niveau de résidus tyrosyls (iodation) au pôle apical de la cellule thyroïdienne
- Couplage de ces résidus tyrosyls précurseurs par la thyroperoxydase (condensation en monoiodotyrosine et en dioiodotyrosine › forme la trioiodotyrosine (T3) et la tétraiodotyrosine (T4), toujours fixés à la thyroglobuline stockée dans la colloïde)
Signes d'hypo-métabolisme en cas de déficit en hormones thyroïdiennes
- Baisse de la consommation en O2 / baisse del thermogénèse = frilosité
- Repos des récepteurs-bêta adrénergiques : bradycardie / faiblesse musculaire / constipation
- Baisse des dépenses énergétiques = prise de poids modérée / frilosité
Myxœdème
- infiltration cutanéo-phanérienne et muqueuse par des mucoprotéines
- Physiopathologie mal comprise mais en partie liée à la baisse du métabolisme protéique
épidémiologie
- Hypothyroïdie primaire : augmentation de la TSH (frustre ou patente selon le dosage de T4L)
- Hypothyoïdie secondaire (centrale) : baisse de T4L et TSH basse ou normale (non adaptée) ou légèrement augmentée dans le cas d'une TSH immuno-réactive (dosable) mais biologiquement inactive › évoque une atteinte hypothalamique
- Forme la + fréquente : touche 7,5% des femmes et 3% des hommes, 10% des sujets âgés
- Prévalence élevée après 65 ans
- Facteurs de risque : syndrome de Turner, trisomie 21, diabète de type 1.. / diagnostic le + souvent fait au stade d'hypothyroïdie frustre
- Très rare : touche 0,005% de la population / concerne moins de 5% des hypothyroïdies
ORIENTATION DIAGNOSTIQUE
EXAMEN CLINIQUE
Diagnostic positif = syndrome d’insuffisance thyroïdienne
Signes d’HYPOMETABOLISME
- signes généraux
- signes cardio-vasculaires
- signes digestifs
- signes neuropsychologiques
- signes gynéco/sexuels
- Hypothermie / frilosité / perte de la sudation
- Prise de poids (voire obésité) malgré anorexie
- Bradycardie ± assourdissement des bruits du cœur
- Hypotension artérielle seulement si forme évoluée
- Constipation / disparition d'une diarrhée préexistante
- Ralentissement physique : lenteur / asthénie / activités limitées
- Ralentissement psychique : syndrome dépressif / troubles mnésiques
- Troubles du comportement / syndrome démentiel (chez les patients âgés)
- Diminution de la libido
- Aménorrhée secondaire (par hyperprolactinémie), infertilité
Signes d’INFILTRATION (4)
- Myxoedème
Remarque : myxoedème absent si insuffisance thyréotrope centrale
- forme de « faux œdème » : dur / comblement des creux sus-claviculaires-axillaires
- Visage : pâle / rond / bouffi = « faciès lunaire » / paupières gonflées
- Membres : mains et pieds boudinés / syndrome du canal carpien
- Infiltration muqueuse
- Troubles cutanéo-phanériens
- Infiltration musculaire = syndrome myogène ± neurologique
- Langue = macroglossie, ronflements
- Cordes vocales = voix rauque
- Trompe d’eustache = hypoacousie
- Muqueuse nasale = ronflements
- Peau sèche, squameuse, froide / teint cireux (carotinodermie par baisse de transformation du carotène en vitamine A) / cheveux secs, cassants
- Erythrocyanose des lèvres et des pommettes
- Alopécie et dépilation diffuse (« queue de sourcil »)
- Déficit moteur proximal (« marche dandinante »)
- Myalgies / crampes ± pseudo-hypertrophie musculaire
- Rarement : tendinite, arthralgie, neuropathie périphérique, syndrome cérébelleux
Particularités chez l'enfant : troubles du développement staturo-pubertaire
- Retard de croissance staturo-pondéral : avec âge osseux inférieur à l'âge statural lui-même inférieur à l'âge civil
- Retard mental / retard pubertaire
évaluation du retentissement / complications
- Cardio-vasculaires : insuffisance coronaire (faire un électrocardiogramme ++) / péricardite
- Neuropsychologiques : dépression / syndrome myogène / canal carpien
- Endocriniennes : hyperprolactinémie secondaire (dysménorrhée / galactorrhée)
- Hématologiques : syndrome anémique
Orientation étiologique
Interrogatoire
- Rechercher antécédents auto-immuns (polyendocrinopathie auto-immune : association avec une insuffisance surrénale ++)
- Rechercher une cause iatrogène : prise médicamenteuse / thyroïdectomie
- Anamnèse : rechercher un épisode récent de thyrotoxicose
Examen physique
- Palpation cervicale : rechercher et caractériser un goitre
- Volume augmenté (évoque une thyroïdite Hashimoto) ou à peine palpable (évoque une thyroïdite atrophique)
- Souvent goitre hétérogène, pseudo-nodulaire (auto-immun, Hashimoto)
Diagnostic différentiel avec une insuffisance thyréotrope
- Rechercher un syndrome sécrétant (hyperprolactinémie ++)
- Rechercher d’autres déficits anté-hypophysaires
- Rechercher un syndrome tumoral : hypertension intracrânienne/ hémianopsie...
EXAMENS COMPLéMENTAIRES
Pour diagnostic POSITIF
- En 1ère intention : dosage de la TSH seule
- En 2nde intention : dosage de T4L
- TSH augmentée (TSH > 5μg/L) = hypothyroïdie périphérique
- si normale (rarement basse) = possible insuffisance thyréotrope centrale
- Aucun intérêt de doser la T3L ou la thyroglobuline ou de test à la TRH
- T4L diminuée = c'est une hypothyroïdie patente
- T4L normale = c'est une hypothyroïdie frustre (= infra-clinique)
Pour évaluation du RETENTISSEMENT
- NFS : anémie arégénérative normo ± macrocytaire
- Ionogramme sanguin : hyponatrémie de dilution (hyperhydratation intracellulaire isolée par opsiruie)
- Bilan lipidique : dyslipidémie = hypercholestérolémie ± hypertriglycéridémie (par baisse de dégradation des lipoprtéines)
- Rechercher une maladie de Biermer en cas d'anémie macrocytaire (notamment si macrocytose persistant après le traitement de l'hypothyroïdie)
Ne faire de bilan lipidique au début de la prise en charge / à réaliser une fois le patient traité pour évaluation (sauf en cas d'hypothyroïdie frustre : un bilan lipidique altéré pourrait justifier d'un éventuel traitement)
- Enzymes musculaires : syndrome myogène : augmentation des CPK ± augmentation de LDH-ASAT (+ aldolase augmentée)
- ± troubles de la coagulation associés (défaut d'adhésivité des plaquettes, anomalies de l'hémostase)
- Prolactine : hyper-prolactinémie secondaire (car la TRH stimule la prolactine) (rarement vue en pratique)
- ± recherche d'insuffisance cardiaque (échographie cardiaque…), syndrome d'apnées obstructives du sommeil (polysomnographie)
Pour diagnostic éTIOLOGIQUE
- Bilan immunologique : anticorps anti-TPO / anticorps TRAB / anticorps anti-thyroglobuline
- Imagerie : échographie cervicale (scintigraphie inutile au contraire de l'hyperthyroïdie où elle est utile)
Pour bilan PRE-THéRAPEUTIQUE
ECG : Rechercher une insuffisance coronaire avant de débuter toute hormonothérapie substitutive
Remarques
« hypothyroïdie frustre »
Fréquent / patient asymptomatique ou pauci-symptomatique / découverte fortuite
avec TSH > 4 µg/L et T4L = normale (9-25 pmol/L)
devant une hypothyroïdie et hyperprolactinémie : 2 possibilités
- Insuffisance thyréotrope : insuffisance antéhypophysaire sur adénome hypophysaire à prolactine ou hyperprolactinémie de déconnexion associée
- Hypothyroïdie périphérique : hyperprolactinémie par rétrocontrôle positif de la T4 sur la TRH
Hypothyroïdie et goitre : évoquer
- Thyroïdite lymphocytaire (Hashimoto, post-partum) / de Reidel / de De Quervain
- Iatrogène : traitement médicamenteux, antithyroïdiens de synthèse
- Atteinte congénitale : anomalie de l'hormonosynthèse
- Carence en iode / infiltration métastatique
DIAGNOSTIC éTIOLOGIQUE
Thyroïdites auto-immunes = chroniques lymphocytaires (55% des cas)
Thyroïdite = 3 phases : thyrotoxicose › hypothyroïdie ± récupération ensuite
Thyroïdite de Hashimoto
Généralités
- Maladie auto-immune : inhibition de la thyroperxodyase (TPO) par auto-anticorps anti-TPO
1ère cause d’hypothyroïdie en France
- Risque évolutif de lymphome thyroïdien (moins de 1% des cas)Physiopathologie
- Réaction auto-immune sur terrain génétique + facteurs environnementaux
- Infiltration lymphocytaire du corps de la thyroïde › forme un goitre
- Thyroïdite (± thyrotoxicose initiale) › évolue vers une atrophie donc une hypothyroïdie séquellaire
Clinique
- Interrogatoire
- Examen physique
- Femme (9 femmes touchées pour 1 homme) / âge moyen = 40-60ans / possible aussi chez l'enfant !
- Recherche antécédents personnels et familiaux de maladie auto-immune (notamment maladie de Basedow)
- Toujours rechercher une surcharge iodée ou une cause iatrogène
- GOITRE = irrégulier/ hétérogène/ diffus ± volumineux/ ferme/ indolore
- Rechercher d’autres pathologies auto-immunes (insuffisance surrénale ++)
- De progression lente / à un stade tardif : la thyroïde est non palpable
- En cas de croissance rapide du goitre, avec une zone pseudo-nodulaire: évoquer un lymphome thyroïdien ++
- Paraclinique
- Bilan immunologique : anticorps anti-TPO positifs dans 95% des cas / anticorps anti-Tg (thyroglobuline) si anticorps anti-TPO négatifs
- Echographie thyroïdienne : systématique
- Scintigraphie : INUTILE (montrerait une fixation irrégulière « en damier »)
- Goitre modéré / hypo-échogène / hétérogène (avec des zones hyperplasiques pseudo-nodulaires hyperéchogènes) / le volume thyroïdien total est ± augmenté
- Vascularisation hétérogène avec accentuation de la lobulation (incisures créant une rétraction de parenchyme prédominant en face postérieure des lobes)
- Avec images de pseudo-nodules hyperfixants trompeurs
- Intérêt en cas de TSH basse : rarement on retrouve une phase de thyrotoxicose initiale › montre une fixation faible et hétérogène
- TerrainRechercher d'autres atteintes auto-immunes : diabète de type 1 / vitiligo / insuffisance surrénale / insuffisance ovarienne / polyarthrite rhumatoïde / anémie de Biermer / maladie cœliaque… › évoquer une polyendocrinopathie auto-immune ++
Thyroïdite atrophique
Généralités
(= ex-myxœdème idiopathique) / 2 types d’inhibition auto-immune : Par anticorps anti-TPO (= thyroïdite de Hashimoto) ou anticorps anti-TSH-R bloquants (dits anticorps TRAB)
Clinique
- Interrogatoire
- Examen physique pas de goitre › thyroïde impalpable
- Paraclinique
- Souvent l'évolution d'une maladie de Hashimoto
- Femme en post-ménopause +++ (âge de plus de 50ans)
- Recherche de polyendocrinopathie auto-immune (antécédents personnels / familiaux) + recherche d'une surcharge iodée iatrogène
- Bilan immunologique : anticorps anti-TPO (présents à taux faibles) ± TRAB en 2nde intention
- Echographie thyroïdienne : hypoéchogène (pauvreté en colloïde, infiltrats) et hétérogène mais avec une atrophie (taille normale ou diminuée selon le stade)
- Scintigraphie thyroïdienne : INUTILE
Thyroïdite du post-partum
Fréquente = touche 5% des grossesses / récidivant
- Phase d’hyperthyroïdie vers les 2 mois après l'accouchement (passant ± inaperçue)
- puis hypothyroïdie typique vers 3-6 mois
- Goitre de petit volume / homogène / sans thrill / ferme
- Récupération dans 70% des cas / hypothyroïdie séquellaire sinon
- Souvent non diagnostiquée car les symptômes sont attribués à la grossesse
Thyroïdites non auto-immunes
Thyroïdite subaiguë de De Quervain (= granulomateuse)
- Examen physique : thyroïde douloureuse, inflammatoire, granulomateuse
- Histoire naturelle : destruction des follicules thyroïdiens (phase de thyrotoxicose initiale avec libération des hormones thyroïdiennes stockées dans la colloïde) puis survenue secondaire (environ 1 à 3 mois après) d'une hypothyroïdie (transitoire le + souvent)
- Biologie : VS ou CRP augmentée à la phase aiguë
Thyroïdite sans anticorps
Tableau proche d'une thyroïdite auto-immune mais les anticorps sont absents Ø
Thyroïdites iatrogènes
- A rechercher systématiquement à l’interrogatoire
- Physiopathologie et clinique proche de la thyroïdite de De Quervain
- Souvent "silencieuses" mas parfois douloureuses
- Causes :
- Médicamenteuse : typiquement avec un goitre
- Post-chirurgie : post-thyroïdectomie totale ± subtotale
- Post-iode 131 radioactif : fréquent = 50% d’hypothyroïdies séquellaires
- Radiothérapie cervicale externe : pour Hodgkin ou cancer ORL par exemple
- Amiodarone : par surcharge iodée = par effet Wolff-Chaikoff
- Interféron = hypothyroïdie auto-immune retrouvée dans 30% des cas
- Lithium (possiblement à l'origine d'un goitre euthyroïdien)
- Anti-tyrosine kinase (thérapie anticancéreuse)
- Produits de contraste iodés
- Antithyroïdiens de synthèse (hypothyroïdie régressive à l'arrêt)
- Pour l'iode 131 et la radiothérapie cervicale : l'hypothyroïdie survient parfois plusieurs années après : surveillance par dosage de TSH 1x/an
Autres causes
- Thyroïdite infectieuse (parasitaire, bactérienne)
- Thyroïdite de Reidel (thyroïdite fibreuse compliquant parfois un Hashmioto)
Carence en iode
Généralités
1ère cause d’hypothyroïdie dans le monde = « zones d’endémie goitreuse »
- Devenue très rare en Europe (car iode dans le sel de cuisine)
- Zones à risque : montagnes (Népal, Vosges, « crétin des Alpes ») et Afrique centrale
Clinique
- Syndrome d’hypothyroïdie classique : hypométabolisme + infiltration
- Goitre = ancien et homogène ± remaniements nodulaires
Paraclinique
Bilan thyroïdien = TSH augmentée / baisse de T4 plus prononcée que la baisse de T3 / iodurie des 24h diminuée
Hypothyroïdie congénitale
Maladie endocrinienne la plus fréquente de l’enfant (touche 1/3500 naissances)
étiologies
- Dysgénésie thyroïdienne (80% des cas) = ectopie thyroïdienne / athyréose
- Avec "glande en place" : hypoplasie de la thyroïde, goitre par troubles de l'hormonogenèse
- Rarement : hypothyroïdie transitoire sur surcharge iodée maternelle (accouchement avec Bétadine..) / insuffisance antéhypophysaire
Diagnostic
- Tableau clinique progressif dès les premiers jours de vie :
- Dépistage obligatoire à J3 = test de Guthrie avec mesure de la TSH (donc ne dépiste que les hypothyroïdies primaires et pas les exceptionnelles formes centrales)
- En cas d'hypothyroïdie sur surcharge iodée : l'échographie retrouve thyroïde en place ou une discrète augmentation de volume / scintigraphie à l'iode 123 : goitre modéré, hyperfixant en précoce, avec un test au perchlorate positif
- Initialement ictère prolongé / constipation / hypotonie / pleurs rauques / difficultés à la succion / fontannelles larges (en postérieur ++) / hypothermie
- En l'absence de traitement : retard psychomoteur profond (irréversible) / ostéodystrophie avec retard de croissance / retard statural (avec âge osseux inférieur à l'âge statural lui-même inférieur à l'âge chronologique)
- Causes génétiques
- Dysgénésie : la scintigraphie à l'iode 123 montre une absence de tissu de la bouche au médiastin en cas d'agénésie / elle retrouve un tissu de faible contraste en cas d'hypoplasie thyroïdienne / on observe une fixation localisée hors de la loge thyroïdienne en cas d'ectopie / en échographie : examen moins sensible, peut retrouver du tissu dystrophique (nodules, kystes) en cas d'hypoplasie
- Troubles de l'hormonogenèse : la scintigraphie retrouve un goitre hyperfixant au temps précoce, avec diminution de la fixation en iode 123 après administration de perchlorate / en échographie : on observe un goitre eutopique ± volumineux
Syndrome de résistance généralisée aux hormones thyroïdiennes
Très rare / sans goitre / TSH, T4L & T3L élevées
Causes centrales d'hypothyroïdie
Toujours recherche d'autres déficits / faire une IRM hypophysaire
- Clinique : pas de goitre (pas de stimulation du tissu thyroïdien par la TSH qui est effondrée) / pas d'infiltration myxœdémateuse
- Paraclinique : diagnostic étiologique par IRM hypothalamo-hypophysaire
- étiologies
- Tumeur de la région sellaire (adénome, craniopharyngiome)
- Selle turcique vide / arachnoïdocèle / apoplexie hypophysaire
- Hypophysite lymphocytaire (en post-partum) / syndrome de Sheehan
- Séquelles de chirurgie / antécédents de radiothérapie, méningite, traumatisme crânien
- Pathologie infiltrative : hémochromatose… / génétique : déficit de l'ontogenèse pituitaire
Maladies infiltratives (rares)
Tuberculose / sarcoïdose / amylose / hémochromatose…
COMPLICATIONS
Complications de l’insuffisance thyroïdienne
Formes neuromusculaires (cf item 108)
- Syndrome d'apnées obstructives du sommeil : ronflements / somnolence diurne / céphalées matinales / syndrome métabolique
- Etat dépressif / syndrome confusionnel ou démence (chez le sujet âgé ++)
- Myopathie proximale (CPK élevées)
Complications cardio-vasculaires
Insuffisance coronaire
- Fréquente car même terrain : âge / dyslipidémie / hypertension artérielle
- Souvent asymptomatique car baisse du débit cardiaque par hypométabolisme
- A rechercher = ECG systématique devant toute hypothyroïdie
- La coronaropathie est alors « démasquée » par l'hormothérapie substitutive
Péricardite myxœdémateuse
- Rare / en général bien tolérée : asymptomatique
- Rarement compliquée tamponnade s'il s'agit d'une forme évoluée
- Diagnostic par échographie transthoracique / ± épanchement pleural ou péritonéal associé
Atteinte fonctionnelle
- Modification de l'activité et du métabolisme du muscle cardiaque : baisse de fréquence cardiaque, baisse de la force contractile (baisse de l'action chronotrope et inotrope positive)
- Insuffisance cardiaque et troubles du rythme ventriculaires rarement
Coma myxœdémateux
Exceptionnel désormais mais grave : 50% de mortalité…
Terrain
- Typiquement chez une femme âgée non traitée +++ / avec une hypothyroïdie profonde / volontiers en hiver
- Rechercher un facteur déclenchant = chute / chirurgie / infection / sédatif
Examen clinique
- Signes généraux : hypothermie sévère / hyponatrémie sévère / bradypnée
- Signes cardiologiques : bradycardie + hypotension artérielle (voire choc)
- Signes neurologiques : syndrome confusionnel / convulsions / coma calme, hypotonique / réflexes ostéo-tendineux lents, décomposés / sans signe de localisation
Examens complémentaires
Aucun ne doit faire retarder le traitement : ECG / TSH – T4L en urgence
- Anémie / hyponatrémie marquée (de dilution) / augmentation des CPK (rhabdomyolyse) / hypoglycémie
- Electroencéphalogramme / ponction lombaire : retrouve une hyperprotéinorachie inconstante
- + bilan infectieux : hémocultures + examen cytobactériologique des urines
Diagnostic différentiel
Devant hypothermie + hypotension : évoquer un choc septique
- Myxœdème possiblement accompagné d'une insuffisance surrénale aiguë
- Syndrome de basse T3 : en cas de pathologie grave et évolutive / baisse de T3 ± suivie de la baisse de T4-TSH selon la gravité
Pathologies auto-immunes associées : recherche de polyendocrinopathie
Rechercher une polyendocrinopathie devant toute hypothyroïdie (Hashimoto et atrophique notamment)
Polyendocrinopathie auto-immune de type 1 (rare) : de transmission autosomique récessive | Polyendocrinopathie auto-immune de type 2 (fréquente) : de transmission autosomique dominante |
---|---|
Hypoparathyroïdie (80%) Insuffisance surrénale (70%) Candidose diffuse (70%) Alopécie (30%) Autres: Biermer, diabète, dysthyroïdie | Insuffisance surrénale (100%) Dysthyroïdie (70%) Diabète de type 1 (50%) Vitiligo / Biermer / ovarite auto-immune Connectivites (lupus, polyaryhrite rhumatoïde, etc.) |
Syndrome de Schmidt
- Hypothyroïdie + insuffisance surrénale chronique auto-immune (dans le cadre d'une polyendocrinopathie auto-immune de type 2)
- Recherche de signes d'insuffisance surrénale chronique devant toute hypothyroïdie : mélanodermie notamment
TRAITEMENT
Prise en charge
Ambulatoire hors complication / hospitalisation pour le sujet âgé ou coronarien
HORMONOTHERAPIE SUBSTITUTIVE ( opothérapie )
Indications
Hypothyroïdie patente de l’adulte
Indication formelle à une hormonothérapie substitutive
Hypothyroïdie infraclinique (« hypothyroïdie frustre »
- TSH > 10 mUI/L et/ou anticorps anti-TPO positif › hormonothérapie indiquée
- A discuter si TSH < 10 mais présence d'anticorps, de signes cliniques, d'une hypercholestérolémie
- TSH entre 4-10 et anticorps anti-TPO négatif / sans risque cardiovasculaire › TSH à 6 mois puis 1 fois par an
Si désir de grossesse › traiter dès que TSH ≥ 3mUI/l
Chez l’enfant
Urgence absolue / Lévothyrox® dès que possible
Modalités : hormones thyroïdiennes de synthèse
- L-Thyroxine (L-T4 / Lévothyrox®) orale (+ forme buvable : L-Thyroxine® / forme intraveineuse en cas de coma myxoedémateux ou impossibilité à avaler)
- Posologie = 1-1,5μg/kg/jour en général / en 1 prise le matin / à jeun / A VIE
- Le traitement par T3 existe (seul : Cynomel® ou associé à de la T4 : Euthyral®) mais il n'existe que de rares indications
Objectif du traitement :
Évaluation sur la TSH seule ++
- Norme : < 4 mUI/L / mais obtenue entre 0,5 et 2,5 mUI/L chez la majorité des sujets
- En situation standard : objectif de TSH entre 0,5 et 2,5 mUI/L
- En cas de coronaropathie non contrôlée, chez des sujets très âgés : ne pas avoir une TSH normale, la stabiliser autour de 10 mUI/L selon la tolérance / si coronaropathie, on traite d'abord les lésions puis on normalise la TSH
- Chez une femme enceinte : objectif de TSH inférieure à 2,5 mUI/L
Objectifs en cas d'insuffisance thyréotrope
- TSH effondrée dans tous les cas › Surveillance sur la T4L qui doit être dans le milieu ou le 1/ 3 supérieur de la normale + T3L dans la normale
Introduction et adaptation posologique
- Posologie initiale de 1-1,5 µg / kg / jour (soit 50-150 µg/j) (sauf sujet coronarien ou de plus de 70 ans)
- Sujet coronarien, à risque ou patient très âgé : posologie initiale de 12,5 à 25 µg/jour / augmentation progressive par paliers toutes les 2-3 semaines jusqu'à obtention de dose théoriquement efficace
Risque d'autant + élevé de démasquer une coronaropathie qu'hypothyroïdie profonde et ancienne
- Surveillance adaptée au risque :
- En cas de d'hypothyroïdie frustre : besoins inférieurs entre 25 et 75 µg/j
- Education du patient âgé ou coronarien stable : consulter si douleurs thoraciques / ECG 1 fois par semaine chez le coronarien grave si possible
- Patient coronarien récent ou non contrôlé : hospitalisation pour surveillance clinique + ECG 1 fois par jour durant l'instauration du traitement
- Parfois bêtabloquants utilisés en association avec la lévothyroxine
Prévention du surdosage chronique car risques osseux et cardiovasculaire ++
Absorption de la L-thyroxine
Influencée par l'horaire de prise / la galénique / les interactions ± éventuelle malabsorption
Horaire de prise fixe / la galénique ne doit pas être modifiée une fois l'équilibre de TSH atteint / éviter les substances diminuant l'absorption : sulfate de fer, carbonate de calcium, hydroxyde d'aluminium, cholestyramine…
Métabolisme :
influencé par les interactions / la grossesse / l'âge
- Grossesse (besoins augmentés de 30-50%) / âge (besoins diminuent)
- Substances augmentant la clairance de la T4 : phénobarbital / carbamazépine / rifampicine / phénytoïne / sertraline / chloroquine… pilule estro-progestative (diminue la fraction libre de T4 par l'augmentation de la liaison à la TBG)
Hypothyroïdie néonatale
- L-thyroxine à ≥ 10 µg/kg quotidiennement
- Traitement précoce (en 12-15 jours après la naissance) : évite retard mental, troubles de croissance…
Toujours traiter insuffisance surrénalienne avant substitution T4 (risque d'insuffisance surrénale aiguë)
éducation du patient
- éducation thérapeutique : le traitement est A VIE / ne jamais arrêter
- Interactions médicamenteuses (pansements gastriques / inducteurs enzymatiques...)
- Signes d’alarme et conduite à tenir en cas d’urgence / auto-surveillance
- Contraception efficace / pas de procréation tant que pas d'équilibre de la thyroïde
- Causes de déséquilibre de l'hypothyroïdie : défaut d'observance / posologie inadaptée / changement de galénique / prise de substance associée / malabsorption / grossesse
- Port d’une carte d’hypothyroïdien (avec posologie de l'hormonothérapie)
- Expliquer les signes annonçant une complication ou un mauvais équilibre, la conduite à tenir
- Avertir sur l'automédication / thé, café à prendre à distance du médicament
Traitement des complications
Traitement des complications associées
- Dyslipidémie : pas de traitement si correction après hormonothérapie
- Anémie : supplémentation martiale + folates orales jusqu’à correction
- Si sujet âgé coronarien : introduction ou majoration d’un traitement (bêtabloquants)
Coma myxœdémateux
Mise en condition
- Urgence thérapeutique / pronostic vital engagé
- Hospitalisation en réanimation / pose de voie veineuse périphérique / monitoring cardio-tensionnel / libération des voies aériennes supérieures
Traitement curatif en urgence
- Hormonothérapie parentérale : L-Thyroxine en IVSE puis relais oral
- Prévention d’une décompensation en insuffisance surrénale aiguë › discuter l'hydrocortisone en IVSE
Traitement symptomatique
- Expansion volumique avec objectif de pression artérielle moyenne ≥ 65 mmHg
- Rééquilibration hydro-électrolyique (hyponatrémie)
- Réchauffement progressif externe
- Oxygénothérapie pour saturation en oxygène supérieure à 95%
Traitement étiologique
- Recherche et traitement du facteur déclenchant
- Exemples : traitement d’une infection / arrêt de médicament / rechercher un infarctus du myocarde, une insuffisance cardiaque…c
Mesures associées
- Prise en charge à 100% au titre des affections longue durée
- Port d’une carte d’hypothyroïdien
- Proposer adhésion à une association de malades
Surveillance
Clinique
- Fréquence des consultations : médecin traitant 1 fois par an A VIE
- Régression du syndrome d’hypothyroïdie / complications du traitement
- Comorbidités auto-immunes (au moins cliniquement)
Paraclinique
TSH à +6-8 semaines après le début du traitement (ou 6-8 semaines après posologie efficace si traitement progressif)
Une fois l'objectif de TSH atteint : contrôle TSH à 6 mois puis 1 fois par an
Dysthyroïdie & grossesse
Peut survenir même chez une femme euthyroïdienne
Doser systématiquement la TSH chez la femme enceinte si facteurs de risque de dysthyroïdie
- Antécédents personnels ou familiaux de dysthyroïdie, auto-immunité, de traitement à risque thyroïdien
- Signes morphologiques : goitre, nodule thyroïdien / signes fonctionnels
- Antécédents obstétricaux : infertilité, fausse couche, menace d'accouchement prématuré
Prévention d’une hypothyroïdie au cours de la grossesse
- Les besoins en iode augmentent au cours de la grossesse / allaitement (à 200µg/jour) car utilisation des hormones thyroïdiennes de la mère par le fœtus
- Carence iodée + stimulation de la thyroïde par hCG & TSH › entraîne une hyperplasie de la thyroïde (goitre) / parfois hypothyroïdie maternelle entraînant une hypothyroïdie fœtale
- Conduite à tenir : dépister des carences en iode (enquête alimentaire) / dépister un goitre / supplémentation iodée et/ou mesures alimentaires
Hypothyroïdie lors de la grossesse
- Si hypothyroïdie connue avant la grossesse
- Si hypothyroïdie non connue : précocité du diagnostic et de la prise en charge
- Préparer et programmer la grossesse / prise en charge multidisciplinaire
- Grossesse nécessite une normalisation stricte de la TSH (< 2,5 mUI/l)
- Augmentation posologique de 25-50% du traitement substitutif dès que la grossesse est connue
- Objectif : obtenir une T4L normale et TSH dans la 1/2 inférieure de la normale
- Surveillance de la TSH toutes les 4-6 semaines / objectif de TSH < 2,5
- Surveillance régulière / allaitement possible
- Diagnostic sur signes cliniques ou biologiques
- Bilan étiologique / mise en place d'une hormonothérapie substitutive à dose supposée efficace d'emblée / objectif TSH < 2,5 le + rapidement possible
Dépistage de l'hypothyroïdie frustre
Population générale
Jamais de manière systématique : Dépistage ciblé
- Femme de plus de 60 ans avec antécédents thyroïdiens
- Présence d'anticorps antithyroïdiens
- Antécédents de chirurgie ou d'irradiation thyroïdienne ou cervicale
- Traitements à risque thyroïdien (amiodarone, lithium, interféron, autres cytokines)
Chez la femme enceinte
- Signes cliniques évocateurs (goitre…)
- Contexte auto-immun (diabète de type 1…)
- Contexte thyroïdien ou familial : antécédents personnels ou familiaux de dysthyroïdie, intervention chirurgicale sur la thyroïde, notion d'élévation des anticorps antithyroïdiens
- Probablement associée à une augmentation du risque d'hématome rétro-placentaire, de prématurité, de détresse respiratoire néonatale / mais pas d'altération des fonctions cognitives ou développement psychomoteur de l'enfant (différent de l'hypothyroïdie patente)
Fœtus
Pas de thyroïde fœtale fonctionnelle au 1e trimestre : le fœtus dépend de la mère pour développement du système nerveux central › ± entraîne des troubles du développement neuro-intellectuel (discuté) / hypotrophie
Biologie chez la femme enceinte non malade
- A T1 : TSH diminuée et T4L normale ou légère augmentation physiologique
- Puis : TSH redevient normale et T4L basse ou normale (toujours interpréter les 2)