Retrouvez les fiches par Thématique ou par Unité d’enseignement Universitaire

Important

Seules les personnes ayant un compte et étant connectées peuvent proposer des modifications

Dyslipidémies

Le risque principal des dyslipidémies est le risque de développement de maladie cardiovasculaire athéromateuse dont les facteurs causaux principaux sont les taux élevés de triglycérides et de LDL-c alors qu’au contraire le HDL-c est un facteur protecteur de l’appareil cardiovasculaire.

Ne pas oublier que les hypertriglycéridémies importantes (en règle > 10 g/L) sont à risque de pancréatite aiguë!

Diagnostic phénotypique

Le bilan lipidique, également appelé EXPLORATION DES ANOMALIES LIPIDIQUES (EAL), correspond à une analyse ponctuelle (comme une photographie ou une enquête de prévalence en santé publique) de la quantité de lipides présents dans le sang mais également la répartition entre les différentes particules lipidiques existantes et ayant des fonctions différentes dans l’organisme. Cette distribution entre les différentes particules lipidiques est très dépendante de facteurs environnementaux aux premiers rangs desquels on trouve l’alimentation et le statut pondéral. Ces résultats sont très variables en fonction du moment de la journée où le prélèvement est fait (période postprandiale vs à jeun). C’est pourquoi son prélèvement est standardisé et doit se faire après au moins 12 heures de jeûne.

Si son prélèvement est standardisé, il en est de même de l’étude du prélèvement. En effet, les dosages effectués permettent d’évaluer les taux de cholestérol total (CT), de triglycérides (TG) et de HDL-c. A partir de ces données, il est obtenu la valeur du taux de LDL-c par un calcul utilisant la formule de Friedewald (le LDL-c n’est donc pas déterminé par dosage direct!). Cette formule n’étant applicable que si le taux de TG est inférieur à 4 g/L.

Formule de Friedewald :

LDL-c (g/L) = CT (g/L) - HDL-c (g/L) - [TG (g/L)/5] ou

LDL-c (mmol/L) = CT (mmol/L) - HDL-c (mmol/L) - [TG (mmol/L)/2.2]

Selon les recommandations de l’AFSSAPS de 2005, un bilan lipidique normal répond à ces critères :

  • LDL-c < 1.6 g/L ;
  • HDL-c > 0.4 g/L ;
  • TG < 1.5 g/L.

En cas d’EAL anormale, il nécessaire de confirmer les anomalies constatées par un second dosage. Par contre il n’est pas nécessaire de répéter un dosage si l’EAL est normale.

Ainsi, selon les particules lipidiques retrouvées à un taux anormal dans le sang, on conçoit qu’il existe plusieurs types de dyslipidémies possibles. La classification de Fredrickson (type I, IIa, IIb, III, IV, V) permet de classer ses anomalies selon la particule circulant en excès ou en défaut et d’exposer ses caractéristiques et ses risques. Elle est désormais de moins en moins utilisée au profit d’une classification en 3 types qu’on peut relier avec la classification historique de la manière suivante :

Hypertriglycéridémies puresType I : hypertriglycéridémie exogène (augmentation chylomicrons) Type IV : hypertriglycéridémie endogène (augmentation VLDL) Type V : hypertriglycéridémie mixte (I + IV)
Hypercholestérolémies puresType IIa : hypercholestérolémie essentielle (augmentation LDL)
Hyperlipidémies mixtesType IIb : hyperlipidémie combinée familiale (augmentation LDL + VLDL) Type III : dysbêtalipoprotéinémie (augmentation IDL)

Les recommandations françaises de 2005 et européennes de 2011 recommandent un dépistage des dyslipidémies dans les situations suivantes :

  • homme > 40 ans ou femme > 50 ans;
  • DIABÈTE DE TYPE 2
  • HTA
  • TABAGISME
  • OBÉSITÉ OU TOUR DE TAILLE ≥ 94 CM CHEZ L’HOMME ou ≥ 80 CM CHEZ LA FEMME;
  • INSUFFISANCE RÉNALE;
  • MALADIE CARDIOVASCULAIRE;
  • MALADIE INFLAMMATOIRE CHRONIQUE;
  • ANTÉCÉDENTS FAMILIAUX de dyslipidémie ou maladie cardiovasculaire précoce;
  • PRESCRIPTION DE CERTAINS MÉDICAMENTS (corticoïdes, rétinoïdes, antirétroviraux ...)

Il n’est pas recommandé de faire de prélèvement à visée de dépistage en prévention primaire chez les personnes de plus de 80 ans.Lorsqu’une anomalie est découverte sur un bilan lipidique, il faut d’abord éliminer une dyslipidémie secondaire avant de rechercher une dyslipidémie primitive!

Eliminer une cause d’hyperlipidémie secondaire

Le collège de cardiologie répertorie les principales causes d’hyperlipidémie secondaire à éliminer et les moyens diagnostiques à disposition pour le refaire, le tableau a été recréée ci-dessous.

EtiologiesMoyen diagnostiqueType d’hyperlipidémie*
Hypothyroïdie Cholestase Syndrome néphrotique Insuffisance rénale chronique Alcoolisme Diabète Hyperlipidémie iatrogène EstrogènesTSH Bilirubine, phosphatase alcaline Protéinurie, œdème Créatinine Interrogatoire Glycémie, HbA1c Interrogatoire InterrogatoireHCH / HLM HCH HLM HTG / HLM HTG HTG HTG
*HCH : hypercholestérolémie ; HTG : hypertriglycéridémie ; HLM : hyperlipidémie mixte
EtiologiesMoyen diagnostiqueType d’hyperlipidémie*
Corticoïdes Rétinoïdes Antirétroviraux Ciclosporine Diurétiques, β-bloquantsInterrogatoire InterrogatoireInterrogatoire Interrogatoire InterrogatoireHLM / HTG HTG HTG HCH / HLM HTG modérée
*HCH : hypercholestérolémie ; HTG : hypertriglycéridémie ; HLM : hyperlipidémie mixte

Diagnostic des hyperlipidémies primitives

Hypercholestérolémies familiales monogéniques

Par mutation du gêne du récepteur au LDL-c

  • FORME HÉTÉROZYGOTE : Elle atteint 1 personne sur 500. Elle correspond à une forme de la maladie où 50 % des récepteurs sont effectivement mutés mais les 50 % restants sont fonctionnels. Elle est donc moins sévère que le forme homozygote. Elle est caractérisée par une augmentation franche du LDL-c entre 2 et 5 g/L et associée à une risque cardiovasculaire élevé. Cliniquement, on peut retrouver des dépôts lipidiques caractéristiques tels que des xanthomes tendineux, un arc cornéen prématuré.
  • FORME HOMOZYGOTE : Dans sa forme homozygote, la maladie est très rare (1/1 000 000). Elle est caractérisée par une élévation majeure du LDL-c > 5 g/L par impossibilité de l’incorporer dans les cellules car aucun des récepteurs au LDL-c ne sont fonctionnels. Cliniquement, on peut constater des dépôts lipidiques xanthomateux présents classiquement dès l’enfance. Cette forme de la pathologie est très pourvoyeuse de complications athéromateuses pouvant survenir dès la première décennie de la vie!

Liée à une mutation de l’apolipoprotéine B

Cette mutation entraîne une gêne à la reconnaissance du LDL-c par son récepteur. Elle touche 1 personne/600. Classiquement, le taux de LDL-c est moins élevé que dans les mutations du récepteur au LDL-c avec un taux compris entre 2 et 3 g/L et cliniquement de rares xanthomes.

Hypercholestérolémies polygéniques

C’est une hyperlipidémie très fréquente dans la population générale avec classiquement une prédisposition familiale polygénique et donc des antécédents familiaux. Le taux de LDL-c oscille généralement entre 1.3 et 2.5 g/L et l’hypercholestérolémie peut être associée à une hypertriglycéridémie. La particularité de cette forme d’hyperlipidémie est qu’elle est sensible à l’alimentation. Le risque cardiovasculaire des patients atteints est à apprécier en fonction du taux de LDL-c et de la présence d’autres FDR cardiovasculaire.Hyperlipidémie familiale combinée (ex type IIb)

Elle atteint 1 -2 % de la population. Elle peut s’exprimer différemment selon les personnes et selon le poids et l’alimentation, pouvant ainsi se présenter sous la forme d’une hypercholestérolémie ou d’une hypertriglycéridémie voire d’une hyperlipidémie mixte. Généralement, le CT varie entre 2.5 et 3.5 g/L et les TG entre 1.5 et 5 g/L.

Dysbêtalipoprotéinémie (ex type III)

Pathologie rare (1/5 000 - 1/10 000) nécessitant 2 conditions pour s’exprimer :

  • PRÉDISPOSITION GÉNÉTIQUE avec l’isoforme E2 de l’apolipoprotéine E à l’état homozygote ;
  • PRÉSENCE D’UN AUTRE FDR TEL QU’UN SURPOIDS, un diabète, une hypothyroïdie ou encore la prise de certains traitements.

Dans cette hyperlipidémie, le CT est compris entre 3 et 6 g/L, les TG entre 4 et 10 g/L. Elle est associée à un risque cardiovasculaire élevé.

Cliniquement, on peut relever des xanthomes plans palmaires et des xanthomes tubéreux jaune orangé caractéristiques mais rares.

Son traitement est basé sur les règles hygiéno-diététiques et les fibrates (plus efficaces que les statines sur les hypertriglycéridémies).Hypertriglycéridémie familiale (ex type IV)

PATHOLOGIE RARE. C’est une hypertriglycéridémie pure, avec souvent des antécédents familiaux, qui présente une grande variabilité d’expression en fonction du surpoids, de la consommation alcoolique et des apports sucrées. Elle est dite glucido-pléthoro-alcoolo-dépendante. Elle peut être associée à une hyperchylomicronémie (ex type I) rentrant alors dans le cadre des hypertriglycéridémies mixtes (ex type V). Elle présente un risque athérogène incertain.

Hyperchylomicronémies primitives (ex types I et V)

Pathologies très rares se présentant sous la forme d’une hypertriglycéridémie majeure > 10 g/L pouvant même aller jusqu’à 100 g/L (toujours penser aux risques de pancréatites aiguës à la vue de ce genre d’anomalie biologique!).

Prise en charge des dyslipidémies

Objectifs thérapeutiques

Les objectifs à obtenir ont été développés dans l’item 219 et sont basés sur les recommandations AFSSAPS 2005 et ESC 2012.

Pour rappel, voici les objectifs retenus dans les recommandations françaises.

Niveaux de risque cardiovasculaireObjectifs de LDL-c (g/L)
0 FDR 1 FDR 2 FDR ≥ 3 FDR Prévention secondaire cardiovasculaire ou risque équivalent< 2.20 < 1.90< 1.60 < 1.30 < 1.00

Ci-dessous les objectifs recommandés par l’ESC (2012).

Niveaux de risque cardiovasculaireObjectifs de LDL-c (g/L)
Faible Modéré Elevé Très élevé< 1.90 < 1.15 < 1.00 < 0.70 ou réduction du taux d’au moins 50 %

A noter que ces objectifs ne s’appliquent pas à l’hypercholestérolémie familiale dont le risque cardiovasculaire est considéré comme élevé et justifie ainsi un traitement plus précoce.

Traitement diététique

Il est indiqué devant toute anomalie lipidique et en présence de FDR cardiovasculaire.

En prévention primaire, il est initié seul pendant au moins 3 mois alors qu’en prévention secondaire, le traitement médicamenteux peut être introduit plus précocement, généralement d’emblée lors de l’instauration des RHD.

Les mesures à suivre sont les suivantes :

  • APPORT LIPIDIQUE TOTAL < 35-40 % de l’apport énergétique total ;
  • RÉDUCTION DES GRAISSES SATURÉES < 12 % ;
  • PRIVILÉGIER LES APPORTS EN ACIDES GRAS MONO-INSATURÉS ET POLY-INSATURÉS en particulier oméga 3 ;
  • LIMITER L’APPORT DE CHOLESTÉROL ALIMENTAIRE < 300 mg/j
  • APPORT DE 5 FRUITS ET LÉGUMES PAR JOUR ;
  • MODÉRER L’APPORT SODÉ < 6 g/j ;
  • RÉGIME HYPOCALORIQUE en cas de surcharge pondérale.

Des règles plus spécifiques peuvent être appliquées aux hypertriglycéridémies pures : réduction pondérale en cas de surcharge, réduction de la consommation alcoolique et des produits sucrés.

Traitement médicamenteux

Les associations de traitements hypolipémiants sont rarement indiquées (avis spécialisé nécessaire).

L’association statine + fibrate est à risque et est de ce fait déconseillée.

Les statines sont contre indiquées en cas de grossesse.

Hypercholestérolémies pures et hyperlipidémies mixtes

Prescription d’une statine en 1ère intention. (Simvastatine, pravastatine, rosuvastatine, atorvastatine)

En cas d’intolérance aux statines (hépatique ou musculaire), on peut utiliser l’ézétimibe (inhibiteur de l’absorption intestinale du cholestérol) et/ou la cholestyramine (résine interrompant le cycle entéro-hépatique du cholestérol et facilitant son élimination dans les selles) et/ou un fibrate et/ou l’acide nicotinique.

Hypertriglycéridémies pures

Pour un taux de TG entre 1.5 et 4 g/L, on optera pour des RHD seules.

Au delà de 4 g/L, malgré des RHD bien suivies, un traitement médicamenteux par fibrate sera instauré en maintenant les RHD, éventuellement associées à des acides gras poly-insaturés oméga 3 à forte posologie.

Surveillance du traitement hypolipémiant

Elle est du ressort de tout médecin prescrivant des traitements hypolipémiants!

Un bilan préalable à l’instauration du traitement comprenant notamment un dosage des transaminases voire des CPK dans les situations à risque (> 70 ans, alcool, insuffisance rénale, hypothyroïdie, antécédent musculaire personnel ou familial, certaines associations médicamenteuses à toxicité musculaire).

L’efficacité du traitement est jugée sur un bilan lipidique réalisé 2-3 mois après l’instauration du traitement puis un bilan est à réaliser annuellement pour s’assurer que les objectifs de LDL-c sont bien respectés.

La tolérance du traitement est jugée sur la clinique mais également sur un dosage des transaminases à réaliser 3 mois après l’instauration du traitement. Le dosage des CPK n’est pas systématique et n’est réalisé qu’en cas de douleurs musculaires ou de situations à risque.

Une élévation des transaminases < 3N permet de continuer le traitement avec tout de même une nécessité de vérifier la normalisation des enzymes au bout de 4-6 semaines. Si l’élévation dépasse 3N, il faut arrêter les statines ou diminuer la dose, vérifier le dosage enzymatique à 4-6 semaines avant d’envisager une éventuelle réintroduction prudente.

Si un dosage des CPK est nécessaire, si celui-ci revient ≤ 5N, la poursuite du traitement est possible tout en prévenant le patient du risque de myalgies et de la nécessité de consulter pour contrôler les CPK. Si les CPK s’élèvent au delà de 5N, il faut alors arrêter le traitement, vérifier la fonction rénale et surveiller les CPK toutes les 2 semaines.

L’incidence des maladies cardiovasculaires est donc inégalement répartie sur le plan géographique. On note également une inégalité homme-femme puisque les hommes présentent 5 fois plus de syndromes coronariens aigus (SCA) que les femmes. Ceci dit, cette différence tend à s’atténuer avec l’avancée en âge. Mais il est à noter que l’incidence des SCA est en augmentation chez les femmes du fait d’une augmentation du tabagisme (de même que les cancers bronchopulmonaires dans cette catégorie de patients ... D’où l’intérêt, on ne le dira jamais assez, d’actions de santé publique, à tous les niveaux, sur le tabac!).