- Rhumatologie
- UE 5
- Item 126
Important
Arthrose
Généralités sur l’Arthrose
Il s’agit d’une maladie de l’articulation qui atteint la membrane synoviale, le cartilage et l’os sous chondral.
Schématiquement, le cartilage contient des chondrocytes, du collagène et des protéoglycanes retenant l’eau. Il est avasculaire et non innervé. La dégénérescence retrouvée dans l’arthrose peut être décrite en trois phases. La première phase est marquée par une hyperhydratation délétère du cartilage et des anomalies des protéoglycanes qui induisent de l’œdème. Secondairement, un hyper-catabolisme du cartilage et de la membrane synoviale s’installe par le biais de cytokines inflammatoires, d’enzymes protéolytiques. Le stade final correspond à l’atteinte des couches profondes jusqu’à l’os sous chondral.
Plusieurs facteurs de risque d’arthrose sont connus :
- L’âge de plus de soixante ans
- Le surpoids et obésité
- L’hérédité
- Le statut hormonal avec une prévalence plus élevée chez la femme et surtout ménopausée
- Les sollicitations articulaires : microtraumatismes, port de charges,
- Les troubles de la statique ou d’axe d’un membre
- Les antécédents de traumatisme, de chirurgie ligamentaire ou méniscale
- Le diabète
- L’arthrite microcristalline
- L’hémochromatose
La coxarthrose
La prévalence de la coxarthrose symptomatique est de 1 à 5% de la population de 40 à 75 ans. On retrouve dans plus de 50% des cas une anomalie architecturale sous jacente de la hanche.
La coxarthrose se traduit la plupart du temps par des douleurs d’horaire mécanique, la plus spécifique est au pli de l’aine.
Parfois, elle irradie sur la face antéro-interne de la cuisse, elle peut aussi se localiser sur le grand trochanter, dans la fesse ou apparaître de manière brutale au niveau du creux inguinal lors d’un changement de position ce qui évoque une fissuration du labrum auquel cas la douleur régresse rapidement.
À noter que la douleur peut être isolée au niveau du genou. En plus des douleurs, la coxarthrose se complique parfois d’un important retentissement fonctionnel surtout du fait de la limitation de la rotation de la hanche.
La marche peut être limitée et doit être évaluée, mais également la montée et descente des escaliers, la sortie de voiture, les rapports sexuels, l’habillage comme mettre des chaussettes ou un collant, ou même les changements de position comme l’accroupissement. Ces répercussions sont évaluables par des indices algofonctionnels comme le Lequesne, le HOOS ou le WOMAC. Certains retiennent l’indication chirurgicale à partir de 10 ou 12 points à l’indice de Lequesne.
Les diagnostics différentiels à évoquer sont les cruralgies neurogènes, l’ostéonécrose aseptique de hanche, la tendinopathie du moyen fessier, une fracture ostéoporotique du bassin.
L’examen clinique de la hanche doit se faire debout pour la recherche d’une attitude vicieuse, à la marche pour rechercher une boiterie (d’esquive si douleur et de Trendelenburg si déficit du moyen glutéal), couché pour rechercher une douleur ou une limitation à la mobilisation qui débute au niveau de la rotation interne et extension. On peut également observer un clinostatisme (impossibilité de décoller la jambe du plan du lit) ou une amyotrophie musculaire.
Le diagnostic repose sur les radiographies avec un cliché bassin debout de face et des membres inférieurs en rotation interne à 20° et un faux profil de Lequesne de chaque hanche. On recherche les signes d’arthrose que sont : le pincement localisé de l’interligne, l’ostéophytose, l’ostéosclérose condensante de l’os sous chondral sous jacent, et les géodes en regard du pincement. La classification de Kellgren et Lawrence permet de coter l’atteinte.
Par ailleurs, on distingue quatre angles à connaître qui permettent de rechercher un vice architectural sous jacent.
- LE VCE : angle de la verticale et de la couverture externe du cotyle normalement supérieur à 25°.
- LE HTE : angle de l’horizontale et de l’obliquité du cotyle normalement inférieur à 10°.
- LE VCA : angle de profil de la verticale et de la couverture antérieure du cotyle.
- L’angle céphalo-cervico-diaphysaire normalement inférieur à 135°.
Ainsi, on peut repérer les coxarthroses secondaires à une anomalie d’architecture.
- LA DYSPLASIE SUPÉRO-EXTERNE : dans ce cas soit le col est trop vertical avec un angle diaphysaire supérieur à 140° dit coxa valga et antéversé. L’autre possibilité est une dysplasie du toit du cotyle avec insuffisance de couverture du toit du cotyle qui ne recouvre pas la tête fémorale avec un VCA et un VCE inférieurs à 20°. Ces deux anomalies sont souvent associées.
- LA DYSPLASIE INTERNE : il s’agit d’une protrusion au cours de laquelle la ligne acétabulaire déborde en dedans de la ligne ilio-ischiatique avec un angle VCE supérieur à 35° et un HTE entre 0 et 5°.
- COXA PLANA : il s’agit d’une déformation de la fête fémorale fragmentée en « béret basque » suite à une ostéochondrite dans l’enfance.
- COXA RETORSA : on peut observer un glissement de la tête fémorale en bas et en arrière en conséquence d’une épiphysiolyse à l’adolescence.
L’évolution est très variable d’un sujet à l’autre avec en moyenne un pincement évoluant au rythme de 0,2 mm/an parfois certaines formes très rapides et d’autres n’évoluant pratiquement pas.
À noter : une forme particulière, la coxarthrose destructrice rapide. Elle se définit par un pincement très évolutif avec une progression de plus de 50% ou de 2 mm en un an avec une évolution rapide vers un pincement global sans ostéophytose du fait de la progression trop aigüe pour qu’une réponse osseuse puisse se faire.
Elle peut même évoluer vers l’ostéolyse de la tête fémorale. Elle nécessite un suivi radiologique au moins tous les 3 mois pour la déceler. Elle se traduit souvent par des douleurs intenses parfois nocturnes et de début brutal. Elle peut débuter après un traumatisme et se voit surtout chez des femmes obèses de plus de 65 ans. Parfois, une ponction articulaire est nécessaire pour la distinguer d’une coxite.
Le traitement associe
- Règles hygiéno-diététiques : repos quotidien en extension de hanche, favoriser la piscine, le vélo et la marche sauf lors des poussées douloureuses pour cette dernière, éviter la station debout prolongée ou le port de charges, perdre du poids si surpoids.
- Une canne du côté opposé peut être proposée.
- La rééducation et la balnéothérapie pour conserver les mobilités, réduire le flessum et prévenir l’amyotrophie.
- Les antalgiques avec usage de paliers 1 au long cours et parfois d’AINS lors des poussées les plus douloureuses.
- D’autres traitements n’ont pas prouvé leur efficacité sur le cartilage : les anti-arthrosiques à action lente et les injections d’acide hyaluronique. Ils peuvent cependant avoir un effet modeste sur la douleur ou les capacités fonctionnelles.
- La chirurgie a deux indications :
- la prévention en cas de vice architectural pour éviter la progression d’une coxopathie luxante symptomatique
- et le stade évolué d’une coxarthrose symptomatique.
L’indication ne repose jamais sur l’imagerie en tant que telle, elle repose sur le retentissement douloureux et fonctionnel. Dans le premier cas, on peut proposer une ostéotomie fémorale supérieure de varisation ou une butée cotyloïdienne ou une ostéotomie du bassin de Chiari. La seconde situation nécessite la pose d’une prothèse totale de hanche. Chez 90% des patients elle devra être changée sous 15 ans, ce qui pose un problème chez les sujets jeunes et doit faire rediscuter son indication. La pose de prothèse peut se compliquer d’infection, à évoquer devant un tableau de descellement mécanique, d’usure du cotyle, de fissure péri-prothétique ou d’ossification péri-prothétique.
La gonarthrose
C’est l’atteinte la plus fréquente du membre inférieur, elle peut atteindre jusque 3 à 15% des femmes de 40 à 65 ans, et un peu moins les hommes.
L’arthrose fémoro-tibiale
Elle apparaît surtout chez la femme après 65 ans. La douleur est typiquement mécanique et diffuse dans le genou parfois prédomine dans le secteur interne.
La montée des escaliers déclenche la douleur, de même que la marche et le passage de la position assise à debout. On peut observer des poussées aigües de gonalgies avec douleurs très intenses, nocturnes avec épanchement parfois abondant. Le retentissement fonctionnel s’évalue avec les indices de Lequesne, KOOS et WOMAC.
L’examen se fait debout pour rechercher une déviation axiale (varum, valgum ou recurvatum). À la marche, on recherche un dérobement, un lâchage par faiblesse du quadriceps ou bien une boiterie.
En décubitus dorsal, on analyse la flexion du genou qui peut entraîner un craquement traduisant l’atteinte du cartilage mais cette mobilité est longtemps conservée.
On recherche un flessum, un aspect globuleux, ou un kyste poplité qui en se rompant peut mimer une thrombose veineuse.
On teste les stabilités antéro-postérieures normalement conservées et latérales (laxité interne ou externe) et on évalue la présence d’un épanchement qui dans ce cas n’est pas inflammatoire.
L’évolution est marquée par des périodes d’accalmie et de poussées. On connaît certains facteurs d’évolution : l’obésité, l’arthrose digitale associée, la chondrocalcinose associée, les épanchements articulaires, les traumatismes ou chirurgie ménisco-ligamentaires.
On distingue deux formes cliniques particulières :
- Une forme associée à une anomalie architecturale : la présence d’un genu varum induit une contrainte sur le compartiment interne et le genu valgum sur le compartiment externe.
- Une forme associée à une autre pathologie : en présence d’une forme rapidement destructrice il faut recherche une chondrocalcinose. La gonarthrose peut également être favorisée par une polyarthrite rhumatoïde, une maladie de Paget ou une ostéonécrose.
L’examen doit être complété par des radiographies :
- De face en appui bipodal en extension et parfois en charge unipodal,
- De profil : un défilé fémoro-patellaire à 30°
- Et un examen en schuss de face en charge à 30° de flexion en postéro-antérieur pour analyser le compartiment postérieur.
On recherche un pincement localisé, des ostéophytes, des géodes et une ostéosclérose sous chondral.
Le traitement associe
- RÈGLES HYGIÉNO-DIÉTÉTIQUES : corriger l’excès de poids et favoriser la marche en dehors des poussées, en périodes de poussée éviter la station debout prolongée ou les marches longues.
- UNE CANNE CÔTÉ opposée peut être proposée
- La rééducation est nécessaire au renforcement du quadriceps pour éviter le flessum.
- LES ANTALGIQUES AVEC LES PALIERS 1 en priorité, les AINS par voie locale ou orale sont limités aux poussées les plus douloureuses.
- LES INFILTRATIONS DE CORTICOÏDES peuvent être proposées en cas de poussée avec épanchement.
- D’AUTRES MÉDICAMENTS peuvent avoir un effet antalgique : les anti-arthrosiques à action lente ont un effet antalgique retardé. Ils peuvent être prescrits par cure de 3 mois. Les injections d’acide hyaluronique ont un effet antalgique et peuvent être proposées en l’absence d’épanchement abondant annuellement.
- LES CURES THERMALES ET LE PORT D’UNE GENOUILLÈRE en décharge peuvent également être proposés
- LE TRAITEMENT CHIRURGICAL A DEUX INDICATIONS :
- d’une part, dans la prise en charge préventive d’une anomalie axiale à risque d’arthrose secondaire par des techniques d’ostéotomie de valgisation ou varisation, qui permettent chez les sujets de moins de 65 ans sans laxité de retarder le traitement prothétique.
- D’autre part, dans le traitement d’une gonarthrose avancée avec douleur et handicap auquel cas on propose des prothèses uni-compartimentale ou totale non contrainte à glissement.
L’arthrose fémoro-patellaire Les explorations complémentaires de l’ostéoporose comprennent :
Elle est moins parlante cliniquement et atteint souvent la femme un peu plus jeune. L’atteinte est souvent bilatérale et la douleur concerne la face antérieure du genou. Elle se majore à la descente des escaliers, station assise et agenouillement. Elle évolue souvent de manière intermittente puis permanente avec le temps.
On la met en évidence à l’examen lors de l’extension contrariée de la jambe, de la palpation ou pression de la rotule sur genou plié, à la manœuvre du rabot (au frottement de la rotule) et à la manœuvre de Zohlen par opposition à l’ascension de la rotule lors de l’extension de la jambe. Une sensation d’accrochage douloureux peut être rapportée.
Le traitement associe
- RÈGLES HYGIÉNO-DIÉTÉTIQUES avec limitation du ski et vélo lors des poussées.
- LA KINÉSITHÉRAPIE AVEC RÉÉDUCATION du muscle vaste interne qui est un élément clé.
- LES INFILTRATIONS DE CORTICOÏDES peuvent être proposées pendant les poussées inflammatoires.
- LA CHIRURGIE peut se discuter en dernière intention après échec du traitement médical : on peut proposer la patellectomie ou l’arthroplastie totale de rotule.
Arthrose digitale
C’est le site le plus fréquemment touché par l’arthrose, avec une atteinte majoritaire des inter-phalangiennes distales. On note également une atteinte de la base du pouce (rhizarthrose) avec douleur de la racine du pouce et face externe du poignet, et des inter-phalangiennes proximales plus rarement. Lors de l’évolution, les douleurs peuvent diminuer et donner place à des tuméfactions nodulaires appelées nodules d’Heberden au niveau distal et de Bouchard au niveau proximal qui peuvent être déformantes.
Au niveau du pouce, on peut observer un pouce adductus voire une amyotrophie thénarienne. On peut utiliser des indices algofonctionnels comme l’index de Dreiser ou Cochin.
Dans cette forme d’arthrose les radiographies sont inutiles.
Une forme particulière à connaître correspond à l’arthropathie érosive qui se traduit par poussées congestives d’horaire inflammatoire sur quelques semaines. Dans les formes les plus inflammatoires, les poussées peuvent mimer un rhumatisme inflammatoire. Dans ce cas, les radiographies montrent d’importantes érosions avec géodes et pincement complet.Le traitement associe :
- LES ANTALGIQUES DE PALIER 1 et lors de poussées inflammatoires : la colchicine ou les AINS. Les anti-inflammatoires locaux peuvent aussi être utiles lors des poussées.
- LES INFILTRATIONS DE CORTICOÏDES peuvent être proposées dans les poussées les plus douloureuses.
- D’AUTRES TRAITEMENTS peuvent avoir un effet sur le retentissement fonctionnel : les anti-arthrosiques à action lente, le port d’orthèse, souvent nocturne, peut limiter l’installation de déformation.
- LA CHIRURGIE NE CONCERNE QUE DE TRÈS RARES CAS. On peut proposer des techniques de ré-axation ou arthrodèse, voire un remplacement prothétique. La rhizarthrose nécessite rarement une chirurgie mais dans certains cas une trapézectomie peut être proposée.
Autres localisations d’arthrose
L’omarthrose touche la scapulo-humérale majoritairement. La douleur est mécanique et peut évoluer vers la raideur de l’articulation. On distingue la forme excentrée par rupture de la coiffe et la forme centrée liée à une pathologie inflammatoire microcristalline ou à une chondromatose. La radiographie met en évidence les signes cardinaux de l’arthrose, les ostéophytes peuvent être particulièrement volumineux et parfois dits en battant de cloche. La prise en charge est surtout médicale mais le remplacement par prothèse inversée de type Grammont peut se discuter dans l’omarthrose excentrée et par prothèse totale dans l’omarthrose centrée avec de bons résultats.
L’arthrose de cheville se traduit par une douleur à l’appui et à la marche. Parfois un déficit des extenseurs est associé. Elle apparaît souvent dans un contexte particulier : après un traumatisme, une nécrose osseuse, une chondrocalcinose ou une hémochromatose. Le traitement est majoritairement symptomatique, le traitement prothétique est très rare, et l’arthrodèse est réservée aux cas très sévères du fait de la raideur qu’elle entraine.